LXII
Yunes resta assit sur le canapé aux côté d'Andrew sans bouger, consumant sa cigarette et réfléchissant à ce qu'il venait d'apprendre. Zak et Alice le tirèrent à ses pensées en sortant de la cuisine. Le garçon avait arrêté de pleurer, et paraissait même avec une mine laissant penser que jamais il n'avait été triste.
Andrew se leva alors et s'avança vers lui, tandis qu'Alice était venue s'assoir à côté de Yunes et avait posé sa tête sur son épaule.
— On est tous aussi perdu que toi, alors ne te sent pas seul à affronter tout ça. Affirma-t-elle à voix basse en caressant sa main.
Yunes aurait aimé sourire ou lui répondre, mais il était trop fatigué pour mentir.
Il se sentait désespérément seul dans ce bourbier, et Alice et Andrew avaient au moins cette chance d'être à deux.
— Ça ne change rien, je me sentirai toujours seul tant qu'il ne sera pas revenu. Avoua-t-il en observant Zak et Andrew qui se faisaient une accolade sûrement en signe de réconciliation.
07:21 ~ lendemain, appartement
Yunes les avait quitté juste après, n'ayant pas la ferveur de rester plus longtemps avec eux, sachant qu'il avait maintenant toutes les réponses à ses questions.
Et puis sommes toutes, Alice et Andrew lui inspiraient désormais une paire qui n'hésiterait pas un seul instant à lui planter un couteau dans le dos si la situation leurs était profitable, à eux ou à Rudy. L'image du revolver planté devant lui lui revenait sans cesse en mémoire comme un traumatisme, alors qu'il n'avait pas réagit sur le moment. Cette sensation d'avoir fait un tête à tête avec la mort l'empêchait de penser normalement et avait troublé son sommeil autant que faire se pouvait.
Il resta allongé dans ses draps un petit moment, alors que l'aube n'était même pas encore là. Son réveil n'avait pas sonné, mais il n'avait aucune envie de se rendormir durant les quelques précieuses minutes de sommeil qui lui restaient.
Il se leva doucement dans la pénombre et alluma sa lampe de chevet avant d'enfiler un pantalon et un col roulé ainsi que ses chaussures, prenant soins d'ingurgiter ses médicaments dépourvus du moindre goût.
Il passa une main dans ses cheveux et enfila son manteau dans lequel il fourra son téléphone et ses clés. Son sac de cours fut rempli de quelques cahiers à l'aveuglette et il éteignit la lumière avant de sortir rapidement de l'appartement.
Jamais il ne s'était préparé aussi vite, sans même pendre le temps de prendre une douche ou de manger convenablement. Mais ce matin quelque chose le pressait.
Il remonta les rues enseignées jusqu'au cimetière en contrehaut. Ses pas laissaient des traces et des craquelures dans la neige toute fraîche de la nuit. Tout était silencieux, l'aube rosée pointait le bout de son nez sur la ville encore endormie et déjà fumante dans l'air glacé.
Il croisa un corbeau perché sur une des poubelles dans lesquelles terminent les fleurs pourries et desséchées des tombes.
Le calme semblait peser sur tout l'espace des morts, et rien n'était encore venu troubler leur tranquillité.
Le garçon commença à avancer dans les allées, se souvenant parfaitement du chemin qu'il avait emprunté avec Rudy quelques jours auparavant.
La tombe de sa mère l'appelait comme un aimant, maintenant qu'il connaissait son existence. Il se planta devant, les pieds dans la neige.
Elle en était recouverte comme toutes les autres. Sa gorge s'était serrée d'un sentiment de tristesse et il s'accroupit devant comme s'il n'était pas encore assez proche d'elle.
Sa main encore chaude de l'intérieur de sa poche frôla la couche de neige immaculée sur la dalle de granit et son esprit s'attela à faire rejaillir quelques bribes de souvenirs de sa mère dans son enfance.
C'était une sensation à la fois désagréable et nécessaire, et il songea alors que cela devait être ce que l'on appelait communément le deuil.
Treize ans d'ignorance alors qu'il frôlait les dix-huit ans d'existence... C'était décidément saugrenu.
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HEY, RUDY
RomanceTERMINÉ [boyxboy] « Rudy c'est comme un orage, ça prévient pas, c'est derrière le brouillard, et le jour où ça pête à la gueule de tout le monde, on est bien emmerdé. » C'était ce qu'on disait. Yunes est dans sa dix-huitième année, lorsqu'il le renc...
