R O U G E

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LXXX


Yunes tourna donc les talons, la tête trop remplie d'informations pour regretter de ne pas voir Rudy plus longtemps. Il finit de descendre les escaliers, s'apprêtant à se diriger vers l'entrée jusqu'à ce qu'il aperçoive l'oncle de Rudy débarquer avec sa femme d'une autre pièce de la maison. Le blond recula d'un pas, sachant parfaitement qu'il n'était pas spécialement le bienvenu ici avec toute la pagaille que l'agression de Jack avait causée dans cette famille.
Il observa les deux adultes. L'oncle de Rudy — dont il avait oublié le nom — semblait assez remonté. Sa femme l'aidait à mettre sa veste de costume.

— Ne soyez pas trop dur avec lui. Quémanda la femme en rajustant la cravate de son mari.

— Merde Giovanna, tu as vu dans quelle merde il nous met, il aura ce qu'il mérite.

— Calme toi et réfléchit, tu sais bien que ça ne sert à rien de s'énerver contre lui.

— Ça a trop duré. Le chantage ne marchera pas une seconde fois avec moi.

La femme soupira.

— Laisse Chlaus gérer tout ça.

— Mon frère est incapable de gérer son fils tu m'entends ? On est pas trop de deux pour le canaliser. Il est taré comme sa mère, et il est hors de question que Gabrielle passe toute son enfance à côté de lui.

Il attacha ses boutons de manchette et respira un grand coup.

— Calme toi, ça va bien se passer. Toi et Chlaus êtes inébranlables.

L'homme étira un sourire.

— Oui tu as raison. Bon, à ce soir.

Et il partit, laissant sa femme refermer la grande porte d'entrée derrière lui. Elle s'éclipsa a son tour vers ce qui semblait être un salon. Yunes en profita pour prendre ses affaires et sortir une fois qu'il eut entendu la voiture de l'oncle de Rudy s'en aller.
Il marcha un long moment comme à l'allée, choqué par ce qu'il venait d'entendre de chaque côté. Cette famille était réellement en guerre à chaque instant. La tension régnait dans chaque recoin... Il prit le bus, puis le métro, puis arriva chez lui. Il se sentait une fois de plus dépassé par les événements, à croire que cela devenait inévitable... Il avait envie de pleurer mais se retint pour installer ses plantes dans son appartement. Puis il se rendit sur la tombe de sa mère, sans enlever la neige qui la recouvrait, car cela lui faisait comme une couverture. Il ferma les yeux un long moment, cherchant à se ressourcer et à vider son esprit. Mais un marteau tapait à l'intérieur de son crâne, le prévenant d'un danger, d'une insécurité, d'un doute, d'une peur.
Les yeux fermés il se mordit la lèvre jusqu'au sang.

C'était plus fort que lui, il ne pouvait se résigner à laisser Rudy entre les mains de Chlaus et Dolce. Il tourna les talons, laissant le cimetière encore plus silencieux qu'à son arrivée.




11:41 ~ Fondation Walter Blue

Le blond hésita un moment à s'introduire dans l'immense tour de verre maintenant qu'il n'y était plus le bienvenu. Mais son inquiétude était trop grande, il utilisa la petite clé dorée que l'on lui avait donné lors de son stage pour utiliser l'ascenseur jusqu'aux derniers étages.
A chaque étage à partir du trente et unième, il débarquait dans une salle d'attente qui menait de toute évidence à un bureau. Mais tout était désert et sans bruit, il écouta aux portes mais n'entendit rien et remonta dans l'ascenseur à chaque fois... jusqu'au trente troisième où il n'eut pas besoin d'oreillettes pour entendre un bruit sourd et des voix d'hommes qui s'élevaient dans l'air. Il resta dans le petit salon d'attente de velours rouge et de marbre blanc, sans bouger, pétrifier à l'idée de se faire repérer... et encore plus en entendant la colère qui éclatait derrière la porte du bureau sur laquelle était inscrite en lettres d'or « C. Gianelli ».

HEY, RUDYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant