Vendredi, samedi, dimanche, lundi.
Lundi.
On est lundi. J'ouvre les yeux trois minutes avant que mon réveil ne sonne. Tant mieux, comme ça je peux l'éteindre avant et, avec un peu de chance, je ne réveillerai pas Olivia qui dort encore paisiblement dans son lit.
Sans faire de bruit - si l'on ignore le moment où je me cogne le petit doigt de pied contre un énorme manuel que j'avais posé au sol -, je me lève et vais dans la salle de bains, où m'attendent les vêtements que j'avais préparés la veille. Cela m'avait pris un moment, car j'avais peur d'arriver soit over-, soit under-dressed pour mon premier jour. Après mûre réflexion, j'ai opté pour un jean noir qui ne fait pas trop jean et pour un chemisier blanc que je garde généralement pour les grandes occasions (pas parce qu'il est excessivement beau ou formel, mais plutôt car mes habits blancs ne restent jamais blanc longtemps - je ne sais même plus pourquoi j'en achète encore, d'ailleurs). Ensuite, je me lave le visage en essayant de ne pas éclabousser mon haut (mission plus ou moins réussie), puis m'occupe un peu de mes sourcils avant de passer à mes cheveux.
Ah, les cheveux. Ils sont un peu trop cours pour que je puisse vraiment les attacher, mais au vu de leur aspect ce matin, les laisser détachés n'est pas une option non plus... J'attrape quelques mèches à l'avant d'une main, tout en fouillant ma trousse de toilette à la recherche d'une pince de l'autre. Voilà, si je retiens ça un peu à l'arrière comme ça... Bon, on va dire que ça va le faire. De loin.
Lorsque je sors de l'immeuble, il fait encore nuit. Le froid matinal me brûle immédiatement les joues et je regrette de ne pas avoir mis un bonnet, quitte à ce que cela ruine complètement ma pseudo-coiffure le temps que j'arrive au travail.
Au travail. Chez Shelby Company Limited. Quelle drôle de vie.
Je prends le même bus qu'habituellement, sauf qu'il faut que je descende deux arrêts plus loin que pour aller à l'université. Les stations défilent : Small Heath University, Garrison, et enfin Siège historique de Shelby Company Limited. Voilà ma destination.
Au moment de descendre du bus, je suis surprise de ne pas voir tant d'autres gens faire de même. Mais après coup, cela me parait logique : ici n'est qu'un modeste bâtiment symbolique, qui n'a pas beaucoup été agrandi depuis que ses fondateurs originaux, dans les années 1920, ont commencé leur activité.
Lorsque je pousse la lourde porte en bois pour entrer, je suis surprise de voir qu'il n'y a ni agents de sécurité, ni détecteur de métal... Rien à part une petite dame d'un certain âge derrière un bureau, devant laquelle est posé une sorte de détecteur de badge.
- Votre badge? me demande-t-elle en m'observant par-dessus les petits verres de ses lunettes.
- Euh... je n'en ai pas, c'est mon premier jour, aujourd'hui. Je m'appelle...
- Ah, vous êtes la huit-dix! m'interrompt-elle sur un ton un peu plus chaleureux. Bienvenue chez Shelby Company Limited. Je suis Mme Joseph. (D'un ton solennel, elle commence à expliquer : ) A votre arrivée chaque matin, ainsi qu'à votre départ, vous devez scanner votre badge chez moi. Tâchez de ne pas l'oublier, c'est important. Monsieur Gray vous donnera votre badge quand vous signerez votre contrat dans... (Elle jette un coup d'œil à une petite montre posée sur le coin de la table.) trois minutes, précisément. Continuez jusqu'au bout dans le couloir derrière moi, vous trouverez un escalier. Ensuite, vous montez et c'est la première porte sur votre gauche. Passez une bonne journée.
Elle m'adresse l'esquisse d'un sourire, puis salue d'autres personnes venant d'entrer. Ok, d'abord l'escalier, ensuite à gauche. Ce n'est pas compliqué. Je me mets en marche et me retrouve quelques secondes plus tard devant une porte fermée où est gravé en grand Michael Gray sur du verre opaque. Qu'est-ce que je suis censée faire, maintenant? Attendre qu'il vienne me chercher? Toquer? Le couloir est plutôt étroit, je ne peux quand-même pas attendre là comme ça, en barrant la moitié du passage... Qu'avait dit cette madame Joseph, de nouveau? Il m'attend logiquement, non? Bon, quand il faut...
Je toque doucement contre le bois de la porte. Merde, on n'entend presque rien. Est-ce que j'ai toqué assez fort? J'attends quelques instants, puis retoque contre le verre. Là, c'est l'effet inverse : je suis sûre que tous les bureaux adjacents ont pensé que c'était chez eux que ça toquait....
- Entrez, dit une voix en me tirant de mes pensées.
Ok, allons-y. J'ouvre la porte pour découvrir un bureau qui, comme l'extérieur du bâtiment, ne semble pas avoir pris une ride depuis près d'un siècle. La lumière est un peu moins forte que dans le couloir, aussi me faut-il un moment pour m'y adapter. Des livres sont disposés le long de chaque mur - des livres aux dos de cuir, de partout - et un grand bureau trône près de la fenêtre.
Assis derrière, Michael Gray. Le même que sur le PowerPoint, le même de la bibliothèque. Il écrit quelque chose sur un ordinateur Apple qui a probablement coûté plus que que je gagnerais ici en six mois.
- Installez-vous, mademoiselle, je suis à vous dans un instant.
Je prends place sur une des deux chaises jumelles lui faisant face. Il continue d'écrire pendant encore une bonne minute avant de cliquer quelques fois sur je ne sais quoi, puis lève finalement la tête.
- Pardonnez-moi pour ce retard, dit-il sur un ton neutre en sortant une montre à gousset de son costume. (Une montre à gousset! Quel monde.) Parfait, nous sommes dans les temps. Au nom de toute la famille Shelby, je vous souhaite la bienvenue dans notre entreprise, mademoiselle...
Il se penche un peu en arrière pour chercher un document dans un tiroir.
- Linn Pritchard, je réponds.
- Mademoiselle Pritchard, parfait, continue-t-il en posant quelques feuilles sur le bureau et en attrapant un stylo. Bien, il ne reste plus qu'à signer ici et tout sera réglé pour ma part. Redescendez ensuite au rez-de-chaussée et demandez à voir Lizzie, c'est elle qui vous expliquera ce que vous aurez à faire.
Il me tend le stylo et j'écris mon nom en bas du contrat. Pendant que je signe, je ne peux m'empêcher de remarquer que ce monsieur Gray a une signature excessivement plus belle que la mienne et pendant une fraction de seconde, je me sens un peu ridicule avec mon «Linn Pritchard» écrit dans mon écriture normale.
- Excellent, dit-il en reprenant les papiers. Bonne journée à vous, mademoiselle.
Une fois les documents rangés dans le tiroir, son attention se reporte sur son ordinateur avant que je n'ai le temps d'ajouter plus qu'un « merci, vous aussi » mal assuré. Je me lève et sors de son bureau, en essayant de faire le moins de bruit possible en refermant la porte derrière moi.
Ensuite, je redescends les escaliers, à la recherche de ladite Lizzie.
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Michael Gray » Peaky Blinders AU
FanfictionBirmingham, 2019. Depuis plus d'un siècle, la famille Shelby est reine de Birmingham, à la tête d'un empire d'import-export aux quatres coins du monde. Rien ne semble pouvoir les arrêter. Mais cela ne plait pas à tout le monde... Linn, 19 ans, revie...