« Chapitre 53 : Printemps »

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   Lorsque je me réveille le lendemain, il me faut un moment pour réaliser où je suis. Je ne suis pas sous une couette, mais sous des draps. Le matelas est beaucoup plus mou que ce à quoi je suis habituée, que ça soit à l'appartement à Birmingham ou à Londres et...

   Il y a Michael. Ça y est, tout me revient. Charlie, Billy Kimber, ma mère, Polly. Michael.

   Il est assis de l'autre côté du lit, son ordinateur en équilibre sur une pile de coussins posée sur ses genoux, les yeux rivés sur l'écran. Je ne crois pas qu'il ait remarqué que je me sois réveillée. 

- Coucou, dis-je d'une voix rauque pour le lui signaler. 

- Linn. 

   Il tourne la tête vers moi, ce qui me donne envie de prendre un coussin et de cacher mon visage derrière tellement je dois faire peur à voir. 

- Je peux aller me doucher? je demande en me redressant beaucoup trop vite, ce qui me fait tourner la tête.

- Euh... oui, bien sûr, répond-il en fermant son ordinateur et en se levant aussi.

   Je remarque qu'il porte encore un t-shirt et un jogging, mais pas les mêmes qu'hier soir. Ses cheveux encore mouillés lui tombent un peu devant le visage. Mon Dieu. Même comme ça, je crois qu'il pourrait entrer dans n'importe quelle salle de réunion et négocier je ne sais quoi comme contrat à un million de Pounds et personne ne remarquerait la différence. 

   Je le suis jusqu'à la salle de bains et il me passe une serviette propre et des habits frais. Au moment où je m'apprête à fermer la porte, il se penche en avant et me dépose un minuscule tout petit baiser sur le front avant de s'éloigner dans le couloir. Je meurs cinq fois intérieurement et le miroir me renvoie l'image d'une Linn avec un sourire que je n'ai rarement vu aussi niais collé au visage.

   Mais petit à petit, à l'endroit où ses lèvres m'ont touchées, je vois apparaître une tâche noire dans mon reflet, comme si Billy Kimber m'avait tiré dessus pour de vrai. Et tout à coup, du sang dégouline de la tâche. 

   Je sais que ce n'est pas réel, mais j'ai du mal à respirer. Je cligne plusieurs fois des yeux, mais le sang coule encore.

   J'allume le robinet et m'asperge le visage d'eau, en frottant mon front tellement fort que je ne crains qu'il va se mettre à saigner pour de vrai. Lorsque je regarde à nouveau dans le miroir, la tâche a disparu.

* * *

   Quand je sors de la salle de bains, je traverse le couloir jusqu'à retrouver Michael sur le lit, les yeux rivés sur l'écran de son ordinateur, exactement comme avant. Je porte un autre jogging, ainsi qu'un tee-shirt blanc et un gilet beaucoup trop grand par dessus.    

   Au moment où il me voit, il se redresse, mais je l'interromps.

- Non non non, bouge pas...

   Il hausse perplexement un sourcil et me regarde grimper sur le lit, puis me glisser à côté de lui tout en attrapant un de ses bras pour le mettre autour de mes épaules.

- C'est bon, tu peux continuer à travailler, dis-je en désignant son ordinateur d'un signe de tête. 

- Linn...

- S'il te plaît, je réponds un peu trop rapidement. Comme ça, on fait comme si tout était normal et que tout aillait bien. Et comme si je ne venais pas de te prendre en otage contre ton gré de façon très gênante. Tu peux me le dire, quand je suis de trop. J'ai pas envie d'être de trop.

   Je l'entends soupirer et le bras que je lui avais fait passer autour de mes épaules se resserre et il me colle contre lui.

- Linn, Linn, Linn...

Michael Gray » Peaky Blinders AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant