Chapitre 81

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 Lemon dans ce chapitre

PDV Lester

Je n'ai jamais vraiment apprécié ce genre de moment. Décorer une pièce, un sapin, choisir où mettre les guirlandes. Ce ne sont pas des choses que je fais, d'ordinaire. Je reste le plus souvent au fond du canapé, ou devant la fenêtre à fumer une clope, pendant que les trois autres habitants de cet appartement gèrent ça. Deux d'entre eux étant bien plus impliqués que le troisième. En général, je finis toujours par me réfugier dans ma chambre, quand Sam et Carter commencent à se disputer pour savoir qui mettra l'étoile, ou qui allumera les lumières.

Mon jugement est peut-être biaisé par mon expérience désastreuse de cette fête. Sans aucun doute, même. Ou bien tout simplement ces trois-là sont trop bruyant pour être supportables. Ce n'est pas faux non plus.

Toujours étant que je ne me rappelle pas d'avoir apprécié un de ces instants au cours de ma vie. J'ai forcément dû aimer ça, les années précédant le départ de ma génitrice. Mais je ne m'en souviens plus. Ce sentiment qui leurs donne à tous le sourire, je ne l'ai pas senti depuis des années.

Pourtant aujourd'hui... la voir s'affairer autour de ce sapin synthétique affreusement laid d'origine, comme si c'était la plus belle chose au monde, ça a gonflé mon cœur d'une sensation que je voudrais ressentir un peu plus fort, un peu plus longtemps, un peu plus souvent. Ses yeux ont brillé chaque fois qu'elle a découvert une nouvelle décoration, dans une des nombreuses boites que Sam, Carter et Arthur ont rassemblées. Je crois qu'on a de quoi décorer les sapins de tout l'immeuble.

Elle a passé des heures à choisir lesquelles seraient utilisées cette année, la place de chacune d'entre elles. Elle a recommencé trop de fois pour que je ne puisse le compter. Et quand bien même j'ai pu râler, j'ai passé chaque minute à l'observer.

Cette petite moue qu'elle affiche, quand le résultat la chiffonne. Ce trait qui barre son front, quand elle est concentrée sur ce qu'elle fait. Et puis ce petit sourire satisfait, quand elle aime ce qu'elle a sous les yeux.

Je crois que je n'aurais jamais envie de faire un sapin. Mais je voudrais la regarder le faire encore et encore.

J'ai tout de même commencé à saturer au bout de trois bonnes heures. Peut-être qu'au fond, j'en avais égoïstement assez que son attention soit sur ces branches en plastique plutôt que sur moi. Ça ne m'étonnerait même pas, tant mes réactions depuis qu'elle est entrée dans ma vie me sont étrangères. Pas dérangeantes, seulement... nouvelles.

Aujourd'hui, j'ai eu l'occasion de voir une Lyra que je côtoie de plus en plus, et que j'aime découvrir. Une Lyra qui se laisse aller à être joyeuse. Qui laisse tomber les barrières qu'elle a érigées autour d'elle depuis 5 ans. Quoi qu'elles étaient déjà là avant, et seulement abaissées pour Aria, de ce que j'ai pu comprendre. Je ressens une certaine satisfaction, à pouvoir aller au-delà de ce mur entre elle et le monde. A la voir laisser de plus en plus de monde le franchir.

Je n'ai jamais voulu laisser personne entrer dans ma vie. J'avais mes 3 amis, mon père et Hélène en quelques sortes, et je n'avais besoin de personne en plus. Pourtant je me rends compte que j'avais besoin d'elle. Elle est cette touche de lumière que je ne pensais pas un jour apprécier, au milieu de la noirceur que je me plais à habiter. Je ne sais même pas comment elle a réussi à prendre cette place. Les petites broderies sur cette housse de guitare en sont sûrement une réponse.

C'est une succession de moments, de regards, de sourires, de paroles, de pensées. Des petits détails, qui lui ont donnés un grand pouvoir : celui de compter.

Mais il y a une Lyra que je ne découvre pas et que j'aime tout autant avoir en face de moi. Celle qui rougit, sous mes paroles, mes regards.

Celle que je sais en train d'imaginer mille et une choses, son cadeau entre les mains. J'aime qu'elle l'imagine. Parce que je ne peux m'empêcher de faire pareil. Et de vouloir la voir encore un peu plus, ses yeux vairons brillant d'envie, ses joues rouges parsemées de tâche de rousseur, alors que ses dents viennent saisir sa lèvre inférieure, dans un mélange de gêne et de désir.

Amour Sourd - Aime-Moi Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant