Chapitre 26

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PDV Lyra

Je ne comprends pas, et je ne sais pas comment réagir. Comment peut-il poser cette question, de but en blanc, et tomber aussi juste ? Je n'ai jamais rencontré ce garçon. Ou peut-être que si, si il a pu faire le rapprochement entre la musique classique et moi. Mais je ne veux pas savoir d'où, ni pourquoi. Je ne veux juste pas reparler de cette époque, ni même m'en souvenir. Parce que c'est bien trop douloureux. C'est une partie de ma vie que j'ai perdu et que je ne retrouverais pas. Je ne veux en parler à personne, et surtout pas à un type que je croise au réveil chez mon binôme de philosophie.

Je fonce dans la chambre de Lester comme si j'allais y trouver refuge. C'est idiot. J'aurais dû nier, partir de cette façon revient à acquiescer silencieusement. Mais au même temps, est-ce que je me sens capable d'affirmer n'avoir jamais joué alors que cela a été si important dans ma vie ? Non. Je ne peux pas renier cette partie moi, quand bien même je veux éviter un maximum d'y penser. Un pincement au cœur me fait serrer les dents. Je me revois sur scène, le violon entre les mains, bien calé sur mon épaule. Cette sensation, elle me manque. Entendre les notes se jouer de façon mélodieuse, me laisser emporter par la musique en oubliant tout ce qui m'entoure. C'est à cause de tout ce que je ne peux plus faire que je me retrouve incapable de l'évoquer.

Je veux enterrer cette partie de ma vie parce que je me dis que c'est la seule solution. Parce qu'y penser est trop douloureux. Alors je ne veux pas qu'un mec que je ne connais pas me le remette en pleine face. Il ne pensait sûrement pas à mal. Il ne savait pas. Je ne peux pas lui en vouloir, mais je ne peux pas rester en face de lui maintenant. J'ai besoin de m'éclipser, de me retrouver seule. Dire qu'il est temps de rentrer est sûrement la bonne chose à faire.

J'attrape mon sac et me retourne vers la sortie, mais je m'arrête en voyant Lester devant la porte. Il la referme dans son dos, et fronce les sourcils alors que j'essaye de faire bonne figure.

- Je dois rentrer. Il est déjà tard.

Il n'en croit pas un mot, je peux l'affirmer seulement en plongeant mes yeux dans les siens. Je vois aussi qu'il est intrigué. Le questionnement de son ami a trouvé un écho en lui, mais je n'ai pas envie que ce soit le cas. Je ne veux pas qu'il pose des questions. Je ne veux pas répondre.

Et puis pourquoi est-ce que je parviens à comprendre ce qu'il pense sans qu'il n'ait besoin de la formuler ? Cela m'étonne.

En un sens, il a le droit de se questionner. Je n'ai pas la réaction d'une personne qui ne cherche à ne rien cacher. Mais pourquoi voudrait-il avoir la réponse ? Je suis sûre qu'il ne sait pas lui-même.

- Pourquoi Arthur semble te connaître ?

- Je ne sais pas.

Et ce n'est pas un mensonge. Son visage ne m'est pas familier, pourtant. Pourquoi l'aurais-je déjà croisé ? Je n'habitais même pas dans cette ville. Il y a plusieurs heures de routes avec mon ancien lieu de vie, et si j'étais connue dans mon domaine, ça n'a rien à voir avec le style de musique de ce groupe. Quelle probabilité donc qu'Arthur ait connaissance de mon passé ? Je voudrais croire qu'il a dit ça au hasard, mais c'est bien trop gros. La seule phrase qu'il m'adresserait serait celle-ci ? Je n'y crois pas.

- Pourquoi fuir la question ? Un « je ne veux pas répondre » aurait suffit.

Peut-être, oui. Mais c'est bien plus facile d'esquiver, je trouve. Et puis au fond, si son ami avait abandonné, il aurait continué. Exactement comme maintenant.

- Je dois seulement y aller.

- On sait tous les deux que c'est faux.

Il commence à m'agacer, et je sens que lui aussi, cette conversation l'énerve. Pourquoi la continuer alors ? Parce qu'il est foutrement têtu. C'est bien une des seules choses que j'ai appris sur lui.

Amour Sourd - Aime-Moi Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant