Amour Sourd - Aime-Moi Tome 1

Chapitre 55

PDV Lyra

Maussade, triste, écœurée, c'est un rapide résumé de ce que je suis en ce moment, et de l'état dans lequel j'ai fini mon week-end. C'est peu affriolant, je l'accorde volontiers à qui le veut le bien. Mais je n'arrive pas à être autrement. Rien ne me fait rire, rien ne me donne envie de sourire, même pas Note et ses tentatives désespérées. Mon visage reste résolument sombre, comme tout ce qui me passe par la tête. Ma mère a bien tenté d'en savoir plus, mais impossible pour moi de dire quoi que ce soit sur ce qui me met dans cet état.

Parce que de toute façon, j'ai bien du mal à l'appréhender moi-même. Je pensais être en colère contre lui, pour tout ce qu'il a pu dire. Triste, de me rappeler tout ce que je n'ai plus, ce que je ne suis plus. Mais au final, ce n'est pas cela, et j'ai du mal à le comprendre. Parce que la seule chose que je ressens là maintenant, c'est le manque. De lui. Sa personne, sa présence, rien que ses messages. Sa silhouette qui m'apparaît au loin ne fait que le renforcer. Je voudrais m'avancer. Je voudrais oublier tout ce qui a pu se produire ce week-end, mais c'est plus fort que moi. Je continue de ruminer contre lui et contre moi-même.

Alors je reste là, appuyée contre ce casier, sans oser faire un pas dans sa direction. Pourtant, son regard me détaille. Il l'a fait toute la journée. Et bordel comme ça a été dur de le supporter. Je voudrais avoir plus qu'un regard. Je voudrais qu'il mette un terme à la distance qu'il y a entre nous. Qu'il fasse ce premier pas que je ne parviens pas à faire. Mais il ne le fera pas ici. Si jamais il se décide à le faire tout court.

Je détourne les yeux des siens, incapable de les soutenir plus longtemps. Est-ce possible de ressentir le manque d'une personne en à peine plus d'une journée ? Il faut croire que oui, parce que j'ai déjà l'impression qu'on me crève le cœur. Au fond, ce n'est pas juste parce que je ne suis pas proche de lui. Mais parce que j'ai peur que quelque chose se soit brisé samedi. Et si ça ne redevenait pas comme avant ? Le monde entier dirait sûrement que je m'inquiète pour pas grand-chose. Mais les relations sociales, c'est nouveau pour moi. Et je ne sais pas ce qui peut être considéré comme minime ou grave.

La tête de Talia qui apparaît soudainement devant moi me fait sursauter. Son bonnet de toutes les couleurs s'agite devant mes yeux, alors qu'elle me fait un regard sévère. J'ai presque l'impression d'être une petite fille sur le point de se faire gronder, surtout quand elle place ses poings sur ses hanches. Son air sérieux dénote grandement avec sa tenue, affichant un t-shirt rose bonbon « Friend of unicorn » dont je ne n'ose pas croire qu'un jour une personne ai pu le designer. Si je n'étais pas dans un tel état intérieur, le contraste m'aurait sûrement fait rire.

- Bon, est-ce qu'on peut savoir ce qui t'arrive ?

- Je ne vois pas de quoi tu parles.

Elle lève les yeux au ciel dans un signe volontaire me signifiant que mon mensonge est loin d'être crédible.

- Tu es sourde, pas aveugle. Je suis persuadée que tu t'es vu dans un miroir ce matin, et que tu as remarqué qu'on dirait un zombie qui a perdu la cervelle qu'il voulait déguster.

Je ne fais pas attention à sa comparaison légèrement exagérée, et ne prend pas la mouche n'ont plus sur sa réplique. Elle n'a pas tort, en un sens. Mon visage est le reflet exact des dernières heures que j'ai passé : horrible. Ma mère a même retenue une grimace ce matin, qui ne m'a pas échappée.

Voyant qu'elle ne compte pas céder et qu'elle est déterminée à obtenir des réponses, je me décide à lui conter mon week-end, et plus particulièrement mon samedi.

- Et on s'est disputé, parce qu'il insiste pour que je reprenne la musique, et que je n'en suis pas capable.

Elle reste silencieuse un moment, me fixant derrière ses grandes lunettes jaune fluo.