Chapitre 10

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PDV Lyra

Quand il m'annonce venir chez moi en ce début de journée, il ne sait sûrement pas l'effet que cela me fait. L'effet que cela va me faire toute la journée. Je n'ai pas cessé d'y penser, d'essayer d'imaginer ce qui allait bien pouvoir se passer.

Je n'ai pas non plus cesser de me demander si je ne ferais pas mieux de tout plaquer. D'annuler, de lui dire qu'on ne va pas faire ça chez moi. Qu'on ne va pas faire ça seul, en fait. Je ne veux pas me retrouver seule avec lui.

Il ne me fait pas spécialement peur. Si il a l'air très asocial, il ne me paraît pas dangereux. Méchant, peut-être, dangereux, non. Mais je n'ai pas envie de me mêler à lui. Comme si je sentais qu'il allait m'apporter des ennuis. De toute façon, nous sommes de deux mondes différents. Même si il n'y a pas beaucoup de personnes dans mon monde.

Je ne veux pas m'ouvrir aux autres. Or, c'est le thème de cet exposé. « Personnel ». Le sens est clair, même si l'on a pas forcément l'habitude d'avoir cette consigne pour un travail de groupe. Une rédaction, à la rigueur. Et encore. Dans le monde dans lequel on vit aujourd'hui, beaucoup considérerait ça comme une atteinte à la vie privée. Alors qu'au final, on peut dévoiler ce que l'on veut. Mais le mensonge est peut-être facile à monter, mais difficile à garder. Il faut donc savoir user de la vérité. N'en dire ni trop ni pas assez. L'écriture, c'est comme la musique. Il faut y mettre un peu de soi pour que cela soit réussi.

Mais là on ne parle pas de rédaction. Mais d'un projet, sur l'amour. Partons du principe que nous avons 18 ans. Est-il si impensable que nous n'ayons jamais connu ce sentiment ? Je sais bien que la plupart des gens pensent aimer à 14 ans. Et pour certains, c'est vrai. Mais pour beaucoup d'ados, le verbe aimer dans son vrai sens leur est encore inconnu. Pour beaucoup, à 18 ans, on ne sait pas vraiment ce que c'est. Alors comment répondre à un tel exposé, qui en plus de nous parler d'un sujet que peu d'entre nous peuvent vraiment aborder, nous demande de mettre une part de nous ? Comment faire du personnel si rien de personnel ne nous raccroche à ce sentiment ?

Je trouve la consigne stupide. Et je n'arrive pas bien à voir comment avancer sur ce travail. Alors cela m'angoisse, plus parce que cela multiplie le temps que je vais devoir passer avec Monsieur Cliché. Il va peut-être falloir que je commence à l'appeler Lester d'ailleurs, où je vais finir par lui révéler son surnom sans le vouloir. Pas sûre qu'il apprécie et que cela nous permette d'avancer.

Je ne veux déjà pas avoir affaire à lui, alors si en plus cela doit durer des mois, ce n'est pas la peine.

Mais j'ai beau me demander si je ne ferais pas mieux de tout arrêter, une petite voix dans ma tête me rappelle que je n'ai pas le choix. Que je vais devoir composer avec lui, peu importe mes réticences et mes doutes. Il va falloir qu'on communique, un minimum. Un point qui ne va pas être spécialement facile à réaliser pour moi. Je ne compte pas devenir amie avec lui. Loin de là. Mais il va falloir se forcer à maintenir une entente cordiale. Pour se débarrasser de cela au plus vite. Clairement, je ne vais pas chercher à avoir une bonne note. Seulement à m'assurer autre chose que 0, de façon à finir cette scolarité que je n'ai jamais voulu reprendre.

Plus vite ce sera fait, mieux ce sera.

Et pour cela, j'ai besoin de savoir comment m'y prendre. Alors sans rien lui révéler de mes doutes -je ne suis pas du genre à me confier- je questionne Talia sur son propre exposé, pour savoir dans quel sens elle a choisit d'avancer. Peut-être pourrais-je simplement faire comme elle.

- Où on en est ? Honnêtement on avance plutôt bien. On a pas commencé l'exposé en lui-même par contre.

Si elle n'a pas commencé, comment peut-elle dire qu'ils avancent ? N'est-ce pas incompatible ?

Amour Sourd - Aime-Moi Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant