L'anesthésique la plongea dans un demi-sommeil cauchemardesque. Ce qui l'entourait ne possédait plus aucun sens. Se débattant à l'intérieur de cette mouise glaciale, elle rêva de sang. Celui de Ninhursag, aussi tiède qu'une pluie de printemps, aussi pourpre qu'un crépuscule, et puis du sien, teinté d'encre, dépourvu d'oxygène, charriant une pourriture noire ; celle qui s'était désormais installée en elle, au plus profond, se logeant à la place de sa capacité à enfanter. Elle rêva de Zhul'Umbra, entité floue, privée de forme concrète, des crochets qu'elle plantait dans son ventre pour en retirer toute la vie en une succion avide, déroulant son intérieur écarlate en une guirlande visqueuse et elle vécut cette dissection enfermée dans une docilité médicamenteuse intolérable.
Enlisée dans un marécage, elle ouvrit les yeux, étouffant un râle. Elle était allongée, nue, le corps couvert d'une sueur malsaine. La fièvre écartelait les parois de son crâne. Elle était malade, un goût acide stagnant dans son palais, une migraine plantée entre ses tempes, comme si elle venait de passer plusieurs heures en compagnie d'Aresh. La réalité et les mauvais rêves s'amalgamèrent encore, la plongeant dans la confusion. Son corps, ouvert en deux comme un fruit trop mûr. La pulpe infecte contenue dans les tuyaux de la mégastructure. Tisse-Circuits, s'y collant pour en boire tout le suc. L'Umbrien dans la fosse, priant qu'on l'achève. Les fougères dégoulinant de condensation, la pierre tiède et transpirante de Thelxinoe. Son esprit mélangeait tout en un jeu de diapositives démentes. Ce flot nauséeux s'étouffa, tarit, comme compressé par un étau, devint ruisseau – puis disparût.
Un bras passé autour d'elle à l'instar d'un harnais de sécurité, Haïdès dormait contre son dos et elle n'eut pas les forces de se dégager, amorphe. Son cœur – ou l'organe affreux qui en mimait le fonctionnement – battait la fin d'une fatigante tachycardie. Au milieu de cette déperdition, un désir pressant lui noua les tripes. Son corps musculeux, imposant, enroulé autour du sien jusqu'à l'étouffer, provoquait en elle un empressement qu'elle maîtrisa avec peine. Elle avait toujours utilisé le sexe en guise de tranquillisant, souvent en toute conscience. Un déficit qu'elle cherchait à combler, d'autant plus maintenant ; des entrailles creuses qui avaient besoin d'être remplies, maigre palliatif à une existence vide de sens ; tout comme son corps asséché de l'intérieur, violé puis recousu. Il ne restait plus que le néant, et ce goût atroce et ferreux dans sa bouche, cette envie de vomir, de rendre ses tripes pourries coincées entre ses os, jusqu'à ce qu'elles disparaissent, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien...
Peut-être qu'elle devrait se retourner pour le réveiller, pour chercher l'oubli, même temporaire – il ne le lui refusait jamais, c'était déjà ça – et puis, il avait une manière de la tenir, de la toucher, qui lui faisait presque croire à une affection réelle, alors... mais au lieu de pivoter, son corps se tordit sous l'assaut d'un spasme et envahie par une clarté d'esprit aux reflets de métal, elle se dégagea de son étreinte. La transpiration recouvrait sa peau tel un linceul humide. Elle eut un haut le cœur et se précipita vers la vasque à moitié pleine près du hublot. L'eau sombre lui renvoya son visage déformé par la nausée et se penchant, elle vomit un long filet huileux, l'œsophage brûlant. La substance ne se délaya pas, flottant à la surface en une flaque de pollution graisseuse. Sa puanteur de désinfectant lui apprit qu'il s'agissait probablement du narcotique qu'Haïdès lui avait administré des heures auparavant – mélangé à des restes de gel dégradé. Il l'avait pourtant piquée dans la cuisse. Son corps n'acceptait plus cette surcharge chimique. Un système de sécurité interne auquel elle voua une colère féroce en régurgitant une nouvelle gorgée couleur charbon. Cette purge involontaire mettait son organisme à rude épreuve. Elle se sentait faible, molle, et se demanda si ce liquide glaireux s'autorépliquait en elle.
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IMPACT
Science FictionPersonne n'échappe à Hélion GmbH, le plus gros fabricant d'armes du Système Circulaire. Ni la fille du patron de l'entreprise. Ni le mercenaire malchanceux essayant de revendre du matériel de la compagnie suisse pour arrondir ses fins de mois. Ni M...