Il lui fallut un long moment pour s'habituer à l'abondance de lumière. Celle-ci n'était pourtant guère vive, mais omniprésente. Disséminée dans les angles du caveau, elle provenait de minces tubes, parfois montés sur un carcan collé au mur. Cet éclairage oscillant entre le bleu et le vert pâle révélait une voûte incurvée et des ogives perçant les parois. Elle avait débouché sur un piédestal, ou un empilement de marches aux arrêtes triangulaires, face à une tranchée.
Immobile, Aresh se tenait à ses côtés.
Aélig cligna des paupières à plusieurs reprises et les contours de la salle se précisèrent. Alignés au-dessus de chaque bordure de la saignée, des silhouettes bipèdes attendaient, trop acérées pour être humaines. Elle distingua les reflets discrets d'armures sombres et exotiques, surmontées par des gueules reptiliennes d'une couleur de charbon. Leurs yeux étaient aussi pâles que la lumière environnante, parfois troublés par des mouchetures actiniques.
Certains serraient une sorte de vouge, ou de lance, contre leur poitrine, des armes d'une sophistication primitive – mais les câblages discrets incrustés aux lames tranchantes trahissaient leur nature véritable. Tous, à l'exception d'un seul, portaient l'umbrarmure, et tous regardaient dans leur direction.
La vision d'Aélig se brouilla et elle chancela. Quelque chose n'allait pas. Une défaillance se glissait dans son esprit, insidieuse. Parmi les figures sombres d'une fixité de pierre, elle en avait aperçu une autre, bien plus haute ; mais cette apparition disparût dans les ténèbres.
Elle sentit Aresh toucher doucement son épaule.
— Nous sommes arrivés, l'entendit-t-elle dire, et sa voix lui parvenait à travers une cascade d'eau déchaînée.
— La dieucité parle à nouveau ! s'exclama quelqu'un au loin. L'ancienne machine a choisi sa voix... notre attente a...
Le reste de la sentence se perdit dans les limbes. Aélig se plia en deux, un pieu de douleur planté sous le cou. La chose incrustée dans son dos devenait un tison ardent, du métal en fusion versé sur ses nerfs. Dans le carré de confusion et de souffrance qu'était devenue sa conscience, Aélig décela une série d'incantations étranges, prononcées dans une langue impropre aux oreilles humaines, une langue des sous-sols.
Une bouillie criarde de réalisme se déversa dans son cerveau. Elle se vit happée par un tourbillon d'aiguilles, à la fois spectatrice extérieure et victime. Elle assista au dépeçage méthodique de son corps, à l'évacuation de tout ce qui n'avait pas été jugé nécessaire, et son esprit se brisa en même temps que ses os. Impuissante, elle se sentit scrutée par une entité fossilisée et calculatrice. Accrochée la tête en bas, disséquée, son système nerveux déroulé par des pinces microscopiques, elle contempla sa reconstruction écœurante. Un processus exécuté comme une routine, le moindre mouvement optimisé jusqu'à la perfection. Des flux noirâtres injectés dans sa nouvelle chair, encore et encore, la secouant comme un pantin.
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IMPACT
Science FictionPersonne n'échappe à Hélion GmbH, le plus gros fabricant d'armes du Système Circulaire. Ni la fille du patron de l'entreprise. Ni le mercenaire malchanceux essayant de revendre du matériel de la compagnie suisse pour arrondir ses fins de mois. Ni M...