Installé à l'établi de l'Atelier des Liens, Willhem examinait le mécanisme d'un verrou complexe que venait de leur livrer un des artisans du Temple de Dywill, lorsqu'un cliquetis retentit dans son dos. Il ferma les yeux pour écouter la mélodie des manipulations effectuées par le visiteur. Aucune hésitation, une vitesse élevée, rotation, traction, rotation encore, un léger mouvement de levier, roulement, pression. Un habitué, qui évaluait rapidement les modifications et les ajustements à apporter, sans s'énerver, sûr de lui. La serrure céda avec générosité et l'agent reposa sa loupe. Il devinait déjà qui venait lui rendre visite.
« Willhem.
— Chef ? »
Il fit pivoter son tabouret pour faire face à Kerun. L'elfe portait une tenue d'intervention près du corps, qui mettait en évidence une silhouette si mince qu'on aurait pu le croire fragile. Tamara disait que le corps des elfes était soutenu par une magie intrinsèque, ce qui expliquait qu'ils soient capables d'autant de prouesses malgré leur carcasse maigrichonne.
« Je déteste te demander ça mais... »
L'ancien voleur croisa les bras et se carra sur son siège.
« J'ai besoin que tu me couvres. Je dois absolument sortir. »
Willhem opina du chef, sans parvenir à s'empêcher de sourire. L'elfe afficha une moue interdite, inclinant la tête de cette manière étrange qui le faisait ressembler à un oiseau.
« Je suis surpris que tu aies tenu toute la nuit », expliqua son subordonné.
Kerun lâcha un rire amer.
« Difficilement.
— Kerun, est-ce que tu es certain que je ne peux pas sortir à ta place ? Tu me dis ce qu'il faut faire, comment... Je me débrouille pour ce genre de choses. En général.
— Je sais. Et ce n'est pas un désaveu de tes compétences. C'est juste... quelque chose que je dois gérer moi-même. Je n'en ai que pour deux heures... En revanche, je vais avoir besoin que tu me sortes plusieurs artefacts de la réserve. Nora a sûrement prévenu Jasper de me garder à l'oeil.
— Je peux m'en occuper.
— Merci. Franchement, je suis désolé, mais je promets de faire vite.
— Pas de soucis. »
L'elfe soupira et frotta son visage des deux paumes.
« Je nous ai réservé la salle d'exercices du troisième sous-sol.
— Ouah, carrément.
— Il faut justifier les deux heures.
— Tu aurais pu me prévenir hier. Je ne suis pas en état !
— Pas besoin de déclencher les mécanismes. Prends de quoi bosser ou profites-en pour faire une sieste ? »
Willhem secoua la tête.
« Il faut au moins que je me change. Personne ne va croire que je vais affronter ce parcours dans une tenue pareille. »
L'elfe acquiesça dans un sourire. Willhem pinça les lèvres. Tamara avait beau dire, Kerun avait l'air vraiment crevé. Mais il détestait l'idée de remettre son jugement en question. Nora se trompait. Il savait ce qu'il faisait, il l'avait toujours su. C'était cet imbécile de Maelwyn qui lui mettait des idées fausses en tête, à douter publiquement des compétences de l'elfe.
Mais comment tourner les choses, pour ne pas l'insulter ?
« Hum... Tu sais que... si tu as besoin d'un coup de main... Je veux dire... un vrai coup de main... »
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Le Printemps des Obscurs - 2. Un désir de crépuscule
FantasyAttention, ceci est la seconde partie du Printemps des Obscurs... La lire sans avoir terminé le premier tome est absolument inutile. De même, le résumé qui suit contient immanquablement de nombreux spoilers ! *** Après le coup d'éclat des prêtres, l...