ERIC
Le chevalier déserteur s'était déjà attablé. Il avait troqué les vestiges de son armure pour son costume favori : un pourpoint jaune à épaules bouffantes, une ceinture en cuir, des chausses non semellées noires et des chaussures grises. Il avait croisé à plusieurs reprises le regard amusé de Camille, qui détournait les yeux en dissimulant sa bouche. Eric comprenait qu'elle pût trouver ses vêtements anachroniques, mais il avait eu la politesse de ne pas se moquer de sa coupe au bol qui la faisait ressembler à un champignon.
« Camille, ma petite ! l'appela-t-il. Venez voir. »
La jeune femme grimaça furtivement et se sépara de Julius et Lemnos pour s'approcher de lui. J'ai un peu de temps pour lui inculquer la politesse avant l'arrivée de Charles et Nok. Ses deux premiers amis étaient introuvables, mais il fallait bien admettre que personne ne les avait cherchés. Camille s'attabla avec le chevalier, l'air contrit.
« J'ai vu que vous riiez de mes vêtements, ma petite.
— Ils sont très... représentatifs de votre époque, monsieur.
— Appelez-moi Eric. Vous trouvez mes habits drôles ? Mon pourpoint vous amuse ? Il a coûté une fortune et ne mérite pas le moindre sourire sarcastique.
— Je suis désolée si vous avez cru que je me moquais de vous, Eric ! s'excusa Camille, les larmes aux yeux. C'est juste que... vous êtes habillé comme les images dans mes livres d'Histoire... Ce sont des choses que je n'imaginais pas voir de mes propres yeux...
— Pourtant, vous n'avez jamais ri de mon armure.
— On a porté des armures bien plus longtemps que des pourpoints. »
Eric hocha la tête. Cette petite est très forte. Vraiment très forte et rusée. Il lui tendit la main pour serrer la sienne et déclara :
« La paix est donc effective entre nous !
— Bien sûr ! affirma Camille. Par contre, vous me broyez les phalanges...
— Oh, excusez-moi, parbleu, j'oublie souvent que mes mains sont celles d'un géant ! s'exclama-t-il en éclatant de rire.
— Vous avez bien fait de vous raser, ça vous va mieux. »
Eric s'était taillé la barbe de près avec une lame après avoir fait apparaître des tapisseries magnifiques dans sa nouvelle chambre. Il ne prenait pas soin de son apparence lorsqu'il partait au combat. Quand son menton retrouvait sa douceur, cela signifiait qu'il était enfin de retour chez lui. En vie.
« Merci du compliment ! »
Il entendit un soupir à l'autre bout de la pièce et vit Agnès se lever de sa chaise. Il avait presque oublié sa présence tant elle était restée silencieuse depuis son arrivée.
La jeune femme avait conservé ses lunettes noires et son chignon très serré, au grand dam du chevalier qui désespérait de voir ses yeux. Ses vêtements étaient plus classiques : elle était habillée comme Camille. Cette dernière marmonna un salut poli et retourna vers Julius et Lemnos en voyant Agnès s'approcher de la table. Manifestement, personne n'apprécie cette bonne femme. Mais c'est vrai qu'elle a agressé Stanislas sans raison, à lui crier dessus gratuitement ! Elle est un peu étrange.
Agnès s'assit en face de lui, sans un mot. Eric attendit quelques instants pour voir si elle avait quelque chose à lui dire. Lorsque le silence devint trop pesant, il s'éclaircit bruyamment la voix.
« Que se passe-t-il, mademoiselle ? Avez-vous un problème ?
— T'es bien poli, dis-moi, répliqua-t-elle. Rien de spécial, je me mets à table parce que les deux dépressifs se ramènent enfin. »

VOUS LISEZ
B
AdventureDouze hommes et femmes se réveillent dans une sorte de manoir dont les pièces changent selon le bon vouloir d'un maître des lieux capricieux, dont les objectifs ne semblent pas... limpides. Après quelques quiproquos, les nouveaux "...