PHILÉMON
Le gentleman regarda Nok et Maurice quitter la pièce. Ils avaient promis de revenir pour le dîner. C'est une excuse pour partir, et je les comprends. Philémon n'avait pas voulu inquiéter les autres, mais ils devaient bien se douter de ce qu'il s'était passé dans la cave à vin. Agnès s'était jetée sur lui, passant instantanément du sommeil à la plus grande violence. Julius avait compris ce qu'il avait vu, même dans la panique. L'explication selon laquelle Agnès possédait un poignard pour tailler les tonneaux ne pouvait pas lui convenir ! Il était le spécialiste des dolia, ces énormes poteries d'argile servant à conserver le vin et autres substances en tout genre. Tailler de l'argile au couteau ? Jamais il ne serait tombé dans le panneau.
Anna non plus ne l'avait pas cru. L'expression qu'elle arborait en traduisant son histoire en grec ancien en disait long. Agnès se promenait avec un poignard parce qu'elle était aussi paranoïaque que Juka, point, pas parce qu'elle taillait des paniers. Combien de temps avant la révélation finale ? Et si Agnès ne pouvait s'empêcher d'attaquer quelqu'un d'autre ?
Philémon se sentait coupable de mentir à Anna, en particulier. Elle avait très mal pris sa blessure et surtout sa désinvolture apparente. La jeune aristocrate le surveillait de près. Elle ne s'était pas détendue devant le film, comme prête à le défendre en cas d'attaque surprise. Rien n'allait la calmer tant qu'Agnès serait parmi eux, c'était certain. Y avait-il un moyen de la mettre hors d'état de nuire ? La question pouvait se poser. On ne peut pas l'enfermer quelque part, ce serait cruel. Un gentleman se devait de respecter les femmes tant qu'elles n'avaient pas fait de victimes. Il n'y aura jamais de victimes si B continue de nous soigner juste après l'attaque.
Philémon frissonna à cette idée. Non, ce n'est pas une façon de vivre ! Nous ne pouvons pas attendre de nous faire poignarder par Agnès et espérer une guérison rapide ! Autant retourner chez nous, dans ce cas. Ce serait sans doute moins dangereux que ce manoir. Comment demander à B de calmer Agnès ? Une substance somnifère de longue durée, peut-être ? Non, c'est à l'encontre de mes principes.
Anna dut sentir qu'il tergiversait car elle lui glissa à l'oreille :
« Je sais très bien ce qu'il s'est passé, Philémon. Cette femme est folle, il faut l'enfermer.
— Non, je ne peux accepter une chose pareille. Nous allons pour l'instant éviter de la laisser seule avec quiconque.
— C'est une solution temporaire et vous le savez.
— En effet.
— Elle recommencera. Elle nous aura tous.
— Gardez votre calme, mademoiselle, nous n'avons pas besoin de cela. »
Anna haussa les épaules, ce qui amusa Philémon malgré la gravité de la situation. Elle prenait sans s'en apercevoir les tics de ses nouveaux amis. C'est Charles qui hausse les épaules ainsi !
« Quelque chose vous fait rire ? s'indigna Anna.
— C'est tellement incroyable d'être ici, avec des personnes de plusieurs époques historiques !
— Oh, fit-elle en se détendant. Oui, c'est vrai, je me demande si nous nous y habituerons un jour. Nous devrions profiter de cette accalmie pour en apprendre plus sur chacun d'entre nous à la bibliothèque. »
Philémon secoua la tête.
« Pas tout de suite. Il me semble que Nok et Maurice veulent rester seuls là-bas.
— Alors... que pourrions-nous faire ? Il doit être à peine quatre heures de l'après-midi ! Je n'ai pas très envie de rester ici... »
Camille, qui avait manifestement écouté leur conversation, proposa :

VOUS LISEZ
B
AdventureDouze hommes et femmes se réveillent dans une sorte de manoir dont les pièces changent selon le bon vouloir d'un maître des lieux capricieux, dont les objectifs ne semblent pas... limpides. Après quelques quiproquos, les nouveaux "...