MAURICE
« Désolé de vous avoir laissés tous seuls, marmonna Charles, attablé pour le dîner.
— Ce n'est rien, le rassura Philémon, nous avons fait une visite extraordinaire ! N'est-ce pas, Eric ? Vous vous êtes amusé également, n'est-ce pas ?
— J'ai fait la meilleure sieste de ma vie, confirma le chevalier. En dehors des têtes coupées, c'était beau et intéressant. »
Charles haussa les épaules, ne sachant visiblement pas s'il s'agissait d'un mensonge ou non. Le dîner se déroula dans une ambiance morose. La soirée prit un tournant tragique lorsque Charles ne se mit plus à prononcer que quelques phrases cohérentes. Le reste de sa logorrhée était une suite ininterrompue de plaintes à propos de Louis Loguend.
« Il était tout... tout..., gémit Charles.
— Chut, le consola Nok, ça va aller.
— Je n'ai pas eu le temps de lui dire...
— Le passé est le passé. Je suis sûr que tout s'est bien passé pour lui.
— J'aurais dû lui dire... J'aurais dû faire quelque chose... »
Maurice regardait Charles s'effondrer en mangeant de la tarte aux poires, totalement impuissant. Il va finir par mourir de désespoir. Son cerveau ne pourra pas tenir indéfiniment dans un tel état de tristesse. Maurice commençait à avoir peur de l'avenir. Il avait attendu un signe de Philémon ou de Nok, ses plus fidèles alliés. Un signe pour trouver un moyen de s'enfuir... Mais rien n'était venu, et à présent ils craquaient tous les uns après les autres.
Agnès regardait droit devant elle comme si personne n'existait autour de la table. J'aimerais être aussi calme qu'elle. Enfin, aussi calme que quelqu'un qui poignarde des gens au réveil puisse être. Peut-être que je vais devoir être ami avec elle pour ne pas devenir fou, moi aussi. Agnès pouvait être un rempart infranchissable derrière lequel il se protégerait jusqu'à la fin. Parce qu'il y aura une fin. Aucun doute là-dessus.
Au milieu des plaintes de Charles, Philémon proposa de remettre en place le calendrier habituel maintenant que le tourisme était terminé.
« Je pense que nous avons tous besoin de nous plonger dans des activités variées, ajouta-t-il. Comme le disait Voltaire, le travail est important pour être heureux.
— Nous ferons des fêtes le plus souvent possible, proposa Anna. J'avais mieux dormi que d'habitude !
— J'irai faire la sieste dans l'époque de Charles, dit Julius. On y dort très bien.
— Vous êtes bien le seul, se lamenta le révolutionnaire.
— Je vais me coucher. » annonça brusquement Stanislas en quittant la table.
Ils restèrent silencieux, surpris de voir leur cuisinier si mal en point.
« Stan va finir par maigrir, commenta Agnès. On le reconnaîtra plus !
— On va mourir... » soupira Charles, le visage enfoui dans ses mains.
Ils se levèrent les uns après les autres, incapables de se forcer à rester à table. Maurice termina sa tarte en deux bouchées et alla directement se coucher. Il se sentait plus vieux que jamais.
Il se réveilla au milieu d'un cauchemar où Galina se faisait abattre par les services secrets soviétiques. Maurice se frotta les yeux pour oublier ce qu'il venait de voir et ouvrit une puce d'infos sur les moteurs du XXIème siècle pour se distraire. Seule la physique l'empêchait de pleurer et de céder au désespoir. Vers onze heures du matin, il s'aperçut qu'il avait raté le petit-déjeuner. Il vaudrait mieux que je sorte tout de suite ! Je vais rater le déjeuner aussi, sinon...
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B
AventuraDouze hommes et femmes se réveillent dans une sorte de manoir dont les pièces changent selon le bon vouloir d'un maître des lieux capricieux, dont les objectifs ne semblent pas... limpides. Après quelques quiproquos, les nouveaux "...