PHILÉMON
Philémon leva les yeux vers le plafond. Il était bien décidé à demander des explications au maître des lieux. J'ai laissé cette situation durer beaucoup trop longtemps. J'ai accepté l'amnésie partielle... J'ai accepté le coup de poignard... J'ai accepté la fatigue qui nous a accablés, les cauchemars, la folie qui s'est emparée de Charles... Mais là, c'est trop.
« B, nous devons vous demander deux choses. Premièrement, comment fonctionne ce manoir ? Pourquoi sommes-nous ici ? Et deuxièmement... pouvez-vous rendre Agnès hors d'état de nuire ?
— Vous voulez m'enfermer ? demanda-t-elle d'une voix blanche.
— Oui. Je crois malheureusement que ce sera nécessaire pour notre sécurité.
— Je comprends. » dit-elle, résignée.
Agnès prit son visage entre ses mains et ses épaules furent secouées de sanglots. Je suis désolé de vous enfermer, mais nous n'avons pas le choix... Tout le monde a peur de vous, Agnès, et certains risqueraient même de vous tuer pour venger Eric.
« Je ne sais pas si je peux répondre à vos questions, dit B avec hésitation.
— Vous devez le faire, ordonna Philémon. Nous ne pouvons plus retourner en arrière, à présent. De plus, je crois que Lemnos va faire une crise de panique. »
L'ancien esclave grec respirait de plus en plus fort, comme s'il s'étouffait. Et puis, soudain, sa tête tomba sur l'épaule de Camille. Il dormait.
« Je ne peux rien faire de mieux. Je suis désolé.
— Ne vous excusez pas, expliquez-nous, intima Philémon.
— Je ne peux... Oh, de toute façon, je vais me faire taper sur les doigts quand même, alors je m'en fiche. Sortez du manoir par la porte que je vais faire apparaître pour vous et rejoignez-moi dans la forêt. »
Philémon était très étonné du ton employé par le maître des lieux. Il me semble qu'il a changé d'état d'esprit... B avait-il fini par craquer, lui aussi ? Camille réveilla Lemnos, qui se frotta les yeux en assurant qu'il s'était calmé. Agnès se mit à se gratter les jambes pour faire partir le sang coagulé sous ses ongles.
« On va vraiment le rencontrer ? s'étonna Lemnos. En vrai ? »
Voici le moment que nous attendions tous. Je n'arrive pas à y croire ! Après des semaines de lutte, ils allaient enfin parler à B de vive voix et savoir pourquoi ils étaient enfermés dans ce manoir. Ils sortirent de la chambre à la file indienne, contournant le lit où le cadavre d'Eric aurait dû se trouver. Philémon pouvait presque sentir sa présence. Un homme si drôle et imposant, brusquement parti... Il était dévasté.
Dans la salle à manger, Stanislas se précipita pour donner à chacun une pomme.
« Il nous faudra des forces pour écouter ce que B va nous dire. »
Philémon le remercia et croqua dans le fruit. Après avoir failli voir un cadavre, il avait besoin d'un peu de sucre. Agnès marchait entre Julius et Nok, qui la surveillaient attentivement. Elle ne va pas les attaquer, c'est évident, mais sait-on jamais ! Agnès n'était un danger que lorsqu'elle était endormie, mais qui pouvait blâmer ceux qui avaient peur d'elle le reste du temps ?
Ils aperçurent une grande porte qui ne se trouvait pas là auparavant. Philémon l'ouvrit en retenant son souffle. Il sortit du manoir, plein d'appréhension. Devant lui s'étalait une lande déserte à l'exception de quelques arbres touffus. Voilà ce qu'il appelle une forêt... Philémon déglutit en croyant voir une silhouette les attendre devant l'un des chênes.
« C'est bon, alors ? murmura Charles. C'est fini ?
— Je crois que ce n'est que le commencement. » répondit Philémon.

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B
AdventureDouze hommes et femmes se réveillent dans une sorte de manoir dont les pièces changent selon le bon vouloir d'un maître des lieux capricieux, dont les objectifs ne semblent pas... limpides. Après quelques quiproquos, les nouveaux "...