ERIC
Le chevalier déserteur se redressa avec difficulté dans sa cotte de mailles. Oh... ma tête ! Il ouvrit les yeux et crut s'étouffer de surprise.
La pièce dans laquelle il s'était éveillé était une réplique exacte de ses appartements privés au château de... Je ne sais plus où j'habite, mais c'est exactement pareil ! La petite table avec des parchemins étalés dans tous les sens, la chaise confortable mais sommaire – Eric n'aimait pas le luxe inutile –, une petite clochette en permanence accrochée à sa porte pour réclamer de la viande... Tout était là, comme s'il était encore au matin de son départ à la guerre.
Pourtant, quelque chose n'allait pas. Il se serait attendu à retrouver les livres de sa bibliothèque, des ouvrages hors de prix dans des langues qu'il parlait à peine. À leur place se trouvaient des boîtes en bois de quelques pouces de large.
Eric se leva péniblement et s'empara de l'un des coffrets. Il sourit en entendant le bruit que ses chausses faisaient sur le parquet. Cela m'avait déjà manqué... Après chaque guerre qu'il avait lâchement évitée, il était retourné chez lui avec soulagement. À Azincourt, lorsque le soldat anglais s'était approché de son corps immobilisé dans la boue, il avait ressenti plus de regret que de peur. J'aurais dû déserter cette bataille aussi. Au diable, les exceptions.
Attristé par ces souvenirs, il ouvrit le coffret. Il en sortit un morceau de parchemin immaculé. Ce n'est pas à moi. Mêmes ces boîtes ne me disent rien... Eric devina qu'il s'agissait d'une nouvelle facétie de leur hôte et examina le parchemin de plus près. Il finit par y discerner un message dans une écriture minuscule.
« Monsieur, lut-il en plissant les yeux. Ceci est une partie de cache-cache. Cachez-vous successivement dans les huit salles que vous visiterez, et vous aurez un présent. »
Il haussa les sourcils et reposa la boîte, songeur. Le chevalier se frotta la barbe en se dirigeant vers son lit. S'il lui fallait se cacher, il savait exactement où aller... Le passage secret fera l'affaire. Eric tira sur les deux pieds au chevet du lit, espérant que ces appartements fussent vraiment identiques aux siens. Le cliquetis caractéristique de la porte cachée derrière sa bibliothèque se fit entendre. Merci Seigneur. Il se redressa pesamment et se hâta de déplacer le meuble pour se glisser dans l'ouverture. Il tira la bibliothèque vers lui pour s'enfermer et cligna des yeux dans le noir.
Bon. Et maintenant ? Il étendit les bras pour voir si le passage secret se prolongeait jusqu'à l'extérieur – peut-être pourrait-il fuir d'ici ! – mais rencontra immédiatement le mur d'en face : le tunnel était bouché. Ses espoirs de cavale s'envolèrent.
Eric soupira en silence et s'appuya contre le mur, les sens en alerte. Quelques secondes plus tard, il entendit le bois de la porte d'entrée craquer. Le souffle coupé, Eric se raidit. Il ne savait pas qui était là, mais il s'approchait déjà de la bibliothèque. Le chevalier écarquilla les yeux, certain d'avoir refermé le passage mais tout de même terrorisé. Le maître des lieux n'avait tué personne depuis son arrivée, mais comment savoir ce qu'il s'était passé... avant ? Peut-être qu'il y avait seize personnes au départ. Parbleu, et s'il avait tué quatre d'entre nous ? Il sentit qu'il allait paniquer et tenta de se calmer. Il devait se faire le plus discret possible...
Eric entendit alors des doigts se poser sur le bois de la bibliothèque. Il retint sa respiration, blême de terreur. Le bruit se rapprocha dangereusement du bord du meuble. Ne me dites pas qu'il va le déplacer. Par pitié, non ! Incapable de bouger le moindre orteil, il ferma les yeux et réprima des sanglots de panique. Même à Azincourt, il n'avait pas ressenti un tel affolement !

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B
AvventuraDouze hommes et femmes se réveillent dans une sorte de manoir dont les pièces changent selon le bon vouloir d'un maître des lieux capricieux, dont les objectifs ne semblent pas... limpides. Après quelques quiproquos, les nouveaux "...