52. Nok

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NOK

Nok et Maurice étaient en admiration devant une puce d'infos. Ils étudiaient une technologie datant de 2350 permettant de mélanger à la perfection plusieurs aliments, créant un plat impeccable. Ce n'est même pas chimique... c'est de la vraie nourriture ! Et tout cela avait été inventé à peine trois siècles avant la Troisième Guerre mondiale. Dire que les scientifiques d'avant 2402 n'avaient aucune idée de ce qui les attendait... Ils étaient là, quelque part sur Terre, dans leurs laboratoires, heureux d'avoir découvert tel ou tel vaccin. Et puis une bombe atomique avait rasé tout leur département, entraînant l'Europe à sa perte. Puis le monde entier.

Nok renifla, ému. Il avait l'impression de vivre dans un monde où tous ses problèmes avaient disparu. Certes, il avait hésité à accepter la proposition de Philémon, mais il fallait qu'il pense un peu à lui-même : la vie dans sa ville désaffectée était rude. Il mangeait n'importe quoi de comestible en priant pour toujours trouver des aliments dans les réfrigérateurs épargnés par les bombes. Par chance, plus rien ne périmait. Un scientifique d'il ne savait quel pays avait créé ce procédé miraculeux de conservation contre les bactéries et la radioactivité. Sans cela, l'espèce humaine se serait éteinte avant 2450. Et ils étaient toujours là, en 5032, tristes mais vivants.

« Eh, gamin, encore une perte de mémoire ?

— N-Non, bafouilla Nok. Plutôt l'inverse.

— Tu veux rentrer chez toi ? Tu sais bien que ça ne ressemble plus à rien, là-bas. J'aimerais bien voir quelques photos, d'ailleurs, parce que ça m'intrigue...

— Tu verras ça pendant ma séance tourisme. Je ne veux pas du tout retourner chez moi, je repensais juste à... à la différence entre ici et là-bas. Je n'arrive pas à croire qu'on soit tombés si bas. Et ça m'inquiète beaucoup, parce que je suis le dernier d'entre nous, tu comprends ? Peut-être qu'il n'y a plus rien après.

— Tu penses que l'humanité s'est éteinte après toi ? marmonna Maurice en se grattant le crâne. C'est difficile à imaginer, tu sais. Vous auriez juste continué de vivre dans vos villes détruites, et puis d'un seul coup... plus rien ? Les gens sont capables de remonter la pente et de reconstruire des pays entiers. »

Nok haussa les épaules.

« On n'a pas pu le faire en deux millénaires... On a laissé tomber, je crois. Les gens survivent en ne pensant pas au lendemain.

— Et les présidents, les dirigeants, ils sont passés où ? s'étonna Maurice. Personne ne veut reprendre le pouvoir ? »

Nok sentit son cœur rater un battement. Il venait de comprendre la chose la plus importante de sa propre histoire.

« J'ai toujours cru que les puissants s'étaient cachés dans des souterrains, dans des lieux sécurisés ! Je pensais qu'ils attendraient le moment venu pour se montrer au grand jour, que ça faisait plusieurs milliers d'années qu'ils avaient reconstitué des villes à l'abri de tout... Mais si je suis le dernier ici, ça veut dire que c'était complètement faux ! Ils sont tous morts pendant ou juste après la guerre nucléaire !

— Tu devais être sacrément désespéré pour t'imaginer que l'élite avait évité un truc pareil, gamin.

— C'est vrai... Mais c'était presque rassurant de pouvoir détester quelqu'un quand j'avais trop faim pour réfléchir. »

Nok remarqua que ses dernières paroles avaient peiné Maurice. Pourtant, il est maigre comme pas permis. Il devrait savoir ce qu'est la famine ! Ne désirant pas se faire plaindre sur son ancienne vie, Nok changea rapidement de sujet.

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