Chapitre 14 - Maxime - Les culottes courtes

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Dans le local technique le temps s'est arrêté. Les étagères couvertes de produits d'entretien n'existent plus. Les regards sont rivés vers cette porte dérobée. Les pleurs deviennent prégnants. La frontière qui les séparait de cet appel à l'aide vient de lâcher son dernier verrou et contre toute attente, la porte s'ouvre d'elle-même. Les trois adolescents retiennent leur souffle dans l'espoir de découvrir le mystère caché derrière le panneau amovible. La cloison pivote sur une petite frimousse blonde. Les trois faisceaux dardent vers le petit être, un enfant, un garçon, cinq ans peut-être. La lumière brille sur un visage inondé de larmes. Son chagrin est aussi grand que son sentiment d'insécurité. Le « petit bout » grelotte. Il replie ses bras en direction de ses yeux pour se protéger du flash des téléphones. Chloé s'intercale pour lui prodiguer de l'ombre. Ses bras s'écartent en signe d'accueil et son instinct parle à sa place :

— Viens là mon grand, ton cauchemar est fini, viens me faire un gros câlin.

L'enfant avance à petits pas sous les regards stupéfaits de Nic et Max. Sans attendre, il plonge vers ce nouveau refuge. Elle s'agenouille et le serre avec toute la tendresse dont elle peut faire preuve.

— Chuuuuut, c'est tout, c'est fini. Tu as été très courageux. Dis-moi, comment tu t'appelles mon grand ?

Entre deux gargouillis, il murmure :

— Léo

Pendant ce temps, Max et Nic s'engagent derrière la paroi, dans les prémisses d'un univers nouveau. Ils découvrent un couloir sombre en pente éclairé par d'éparses lampes auxiliaires. Les deux ados évaluent la déclivité avant de distinguer au fond, une série de marches s'enfonçant vers des profondeurs insondables, un escalier. Les pleurs s'estompent et la voix de Chloé rassure à nouveau.

— Tu t'es perdu, c'est ça ?

Léo répond d'un timide oui de la tête.

— Tu veux qu'on t'aide à retourner chez toi ?

Nouvelle approbation silencieuse.

— Nous allons t'aider, ne t'en fais pas mon grand, nous ne te laisserons pas seul. Il y a eu un gros orage et les lumières se sont éteintes, mais tout va bientôt rentrer dans l'ordre. Bientôt les lampes fonctionneront à nouveau.

Elle se recule et essuie les larmes du revers de sa manche.

— Voilà un gros chagrin qui disparaît, montre-moi quel beau garçon tu es quand tu souris.

Le visage de Léo s'illumine d'une risette fugace.

— Waouh, je suis certaine qu'un beau garçon comme toi aura vite tout plein d'amoureuses.

Il se redresse et plisse ses sourcils dans une mimique presqu'adulte.

— J'ai déjà deux amoureuses, Elsa et Délilah !

La spontanéité provoque un éclair d'amusement attendri chez les trois ados. Chloé embraie :

— Dis donc, déjà deux amoureuses, tu en as de la chance. Et où sont-elles ? Chez elles dans leur maison ?

Il secoue un visage fermé et dirige sa main minuscule en direction du couloir en pente.

— Elles dorment avec moi à l'école.

L'enfant plonge ensuite son regard dans celui de sa bienfaitrice.

— Tu vas les aider elles aussi ?

Sur ces mots, les trois ados s'observent, les visages ne sont plus à l'attendrissement mais à l'inquiétude. Le voile sur lequel ils ont tiré ne recèle rien de bon, et leurs prochaines décisions s'annoncent aussi décisives qu'irrémédiables.


L'Égalease - [GAGNANT WATTYS 2022]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant