Chapitre 11 - Dolores - Traqués

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Le mur d'enceinte de l'Institut dessine des ombres fantomatiques sur une route déserte. Quatre heures du matin et pas un chat n'occupe ces lieux à l'exception d'une Range Rover de couleur foncée. Tous feux éteints, elle patiente à l'abri d'un accotement en gravier. À l'intérieur de l'habitacle, la tension grimpe à son paroxysme. Oscar et Dolores sont maintenus dans un mutisme forcé. Depuis leur échappée de chez les Darville, ils ne trouvent plus les mots. Même leur arrêt pour remplir le réservoir de diesel quinze minutes plus tôt s'est déroulé dans un silence quasi absolu.

Dolo scrute le mur d'enceinte à la recherche d'un signe. Elle vient d'envoyer son message, ce n'est qu'une question de minutes avant que son fils n'apparaisse. Du moins, c'est ce qu'elle espère.

— Je sors fumer une clope, annonce Oscar.

Dolores serre les dents, elle voudrait le retenir, lui dire que son fils risque de surgir à tout instant, qu'il faut se tenir prêts à fuir, mais ne parvient pas à le formuler. Oserait-elle lui interdire une cigarette ? Oscar en a déjà tant fait, elle n'aurait jamais cru qu'il accepterait de se joindre à elle pour venir récupérer son fils et pourtant, il est là.

Le latino s'extirpe du véhicule. La portière claque. Il se décale légèrement pour observer avec plus de facilité les deux voies, désertes. Pas de doute, ils sont seuls. Cette constatation le frustre. Son message envoyé de la station-service était trop imprécis, il ne connaissait pas l'adresse exacte de leur destination.

L'urgentiste fait mine de scruter l'horizon. En réalité, il cherche l'angle mort du rétroviseur. Le tabac rougeoie. Entre deux bouffées, il saisit son téléphone et vérifie ses notifications. Son court texto envoyé est resté sans réponse. Il prend la pose, mais le long de sa veste, ses doigts rédigent un nouveau message en toute discrétion. À peine termine-t-il son message que le moteur de la voiture se met en marche. D'un mouvement rapide, Oscar range son téléphone et jette sa cigarette. Dolores a pris le volant. Elle ouvre la portière d'un geste rageur et crie sans même le regarder.

— Grimpe ! Vite !!!

Oscar fonce vers le siège passager tout en sondant l'obscurité. Du mouvement sur le mur d'enceinte. Ce n'est pas une, mais deux silhouettes qui se meuvent. Il rejoint l'autre côté de la voiture, saute dans l'habitacle et claque la portière. Au même instant, les pneus crissent dans une gerbe de graviers projetés. Le puissant tout terrain se lance à l'assaut de la route et pointe ses yeux jaunes vers les deux adolescents en fuite. Ils semblent hésiter. Le mur mesure deux mètres quatre-vingts de haut. Un saut serait synonyme, au mieux, de jambe cassée. Dolores fonce dans leur direction et se gare juste sous eux. L'instant suivant, un bruit de tôle cabossée se répercute à l'intérieur. Un second impact, plus léger cette fois, rompt le silence. Oscar bondit du véhicule. Il tend les bras en direction du toit.

— Venez, je suis un ami de votre Maman.

Au loin, des aboiements de chiens se font entendre. Chloé est la première à plonger sur la banquette arrière. Dolores la dévisage, le regard affolé. Arrive ensuite son fils. Il lui crie :

— Vite, file Maman ! Ils sont à nos trousses !

Oscar rejoint son siège et la Range Rover démarre en trombe.

Dolores multiplie les œillades en direction de Max. Elle lui demande, la panique au bord des lèvres :

— Tu vas bien ? Tu es blessé ?

Max secoue un visage transi.

— Ça va, fonce, mets le plus de distance possible entre cet endroit et nous.

— Que s'est-il...

Dolores s'interrompt, son visage blêmit.

- Maman ?

L'infirmière met un instant avant de pouvoir reprendre le contrôle de sa parole. Dans son rétroviseur, deux véhicules foncent à toute allure dans leur direction. 

L'Égalease - [GAGNANT WATTYS 2022]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant