11 : L'entreprise des Miller

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Les jours suivants, je franchissais enfin les portes du célèbre quartier général des Miller.

L'immense bâtiment, tel un monstre de verre et d'acier, s'élevait majestueusement devant moi. Ses lignes blanches, immaculées, captaient les rayons du soleil et les renvoyaient avec une intensité presque aveuglante, comme si l'édifice tout entier cherchait à repousser quiconque oserait s'en approcher. Il y avait une beauté froide dans cette architecture — une beauté menaçante, presque inhumaine. Je pouvais sentir, dans chaque centimètre de cette structure lisse et glaciale, la puissance qu'elle renfermait. Mais cette perfection de surface n'était qu'un leurre.

Derrière les vitres teintées et les murs insondables, je savais qu'un autre monde existait. Un monde d'ombres et de secrets, où des affaires douteuses se concluaient dans le silence, où des objets illégaux transitaient sous l'œil vigilant des caméras et des dispositifs de sécurité sophistiqués.

Cet endroit, vanté pour être inattaquable, me donnait des frissons. Plus qu'un simple bâtiment, c'était un sanctuaire dédié au mensonge, à l'illusion du pouvoir et à la manipulation des apparences.

Alors que je sortais de la voiture, mon regard accrocha celui d'Ezekiel. Appuyé nonchalamment contre la portière d'une autre voiture, une cigarette au bout des doigts, il m'observait. Son regard était oppressant, brûlant d'une intensité dérangeante. Un sourire narquois, presque cruel, dansait sur ses lèvres, tandis qu'il me dévisageait comme un prédateur savourant l'agonie de sa proie. Un frisson glacial me parcourut, me rappelant que, malgré mes efforts pour paraître impassible, je restais vulnérable sous son regard. Ezekiel ne parlait pas, mais chaque fibre de son être transmettait un message limpide : dans ce monde, tu n'es qu'un pion.

À l'intérieur du bâtiment, je fus accueillie par une scène étrangement choregraphiée. Les employés, impeccablement alignés, se tenaient droits comme des soldats au garde-à-vous. Leurs sourires étirés, figés sur leurs visages, semblaient dénués de toute sincérité. L'atmosphère était lourde, presque suffocante, saturée par un parfum de lavande qui me donnait la nausée, comme si cette senteur envahissante cherchait à masquer la pourriture sous-jacente. La tension était palpable dans l'air, invisible mais présente à chaque respiration.

— Bienvenue, cheffe, lança une voix féminine, tranchant dans le silence comme une lame affûtée.

Je me tournai vers l'origine de cette voix, et mes yeux rencontrèrent ceux d'une femme blonde. Ses cheveux impeccablement lissés encadraient un visage aux traits durs, presque inexpressifs, mais c'étaient ses yeux qui captivaient mon attention. D'un bleu perçant, ils me scrutaient, froids et calculateurs. Elle avançait vers moi avec une grâce mécanique, chaque pas mesuré, chaque mouvement calculé.

— Je m'appelle Silène, je suis votre secrétaire.

Nous échangeâmes une poignée de main. Sa main, bien que chaude, dégageait une froideur émotionnelle, et son sourire ne toucha jamais ses yeux. Quelque chose clochait dans cette perfection feinte. C'était comme si toute cette courtoisie n'était qu'un écran de fumée, une mise en scène destinée à dissimuler des vérités bien plus sombres.

— Enchantée de vous rencontrer. Je suis Anastasia Miller, déclarai-je d'une voix ferme, bien que mon cœur battait à tout rompre. À partir d'aujourd'hui, je suis à la tête de cet établissement. J'espère que nous pourrons avancer ensemble dans le respect et la confiance.

Un silence s'abattit sur la pièce. Pendant un instant, le temps sembla suspendu. Puis, comme un ordre silencieux, une vague d'applaudissements éclata. Le bruit résonnait dans l'espace immense, mais il n'apportait aucune chaleur. Les sourires autour de moi s'élargirent, se firent plus éclatants, mais leur fausseté n'en devint que plus évidente. Je sentais en moi un mélange troublant d'orgueil et de malaise. Tout cela ressemblait à une pièce de théâtre, mais combien de temps avant que le rideau ne tombe et que la véritable nature de cet endroit ne se dévoile ?

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant