27 : Jeu de rôle

347 13 1
                                    

À l'intérieur de la salle de bal, l'ambiance était imprégnée d'une élégance mystérieuse. De gigantesques lustres en cristal pendaient comme des constellations au plafond, diffusant une lumière dorée qui faisait briller chaque recoin de la pièce. Les fresques mythologiques sur les murs, baignées dans cette lueur douce, semblaient presque s'animer, leurs héros anciens partageant leurs histoires silencieuses avec les invités. Le bruissement des robes en soie, les murmures feutrés, et le cliquetis discret des coupes de champagne créaient une symphonie de luxe et de secrets à peine chuchotés. Chaque détail contribuait à une atmosphère envoûtante où les apparences régnaient en maîtres.

Lorsque je franchis le seuil, les conversations se suspendirent momentanément. Toutes les têtes se tournèrent dans ma direction, exactement comme je l'avais espéré. Leur attention, immédiate et palpable, me couvrit comme un voile de soie invisible. Leurs regards glissaient sur moi, explorant chaque courbe de ma silhouette, fascinés par la manière dont ma robe noire s'embrasait sous les reflets dorés des lustres. Ce pouvoir, la séduction purement visuelle, était un art que j'avais appris à manier avec une précision mortelle.

Rapidement, je balayai la pièce du regard jusqu'à repérer notre cible. Hugo. Un homme d'une quarantaine d'années, ses cheveux blonds impeccablement peignés comme s'ils étaient toujours à la perfection. Ses yeux d'un bleu glacial scrutaient la foule avec une aisance et une autorité naturelle. L'organisateur de la soirée, et surtout, l'homme que je devais captiver, distraire. L'enjeu de cette mission reposait entièrement sur ma capacité à monopoliser son attention, à l'emprisonner dans un jeu dont il ne comprendrait jamais les règles.

Je laissai un sourire étirer mes lèvres. Le jeu venait de commencer.

Prenant une grande inspiration, je me séparai des autres avec grâce, mon corps adoptant une démarche calculée, chaque geste mesuré. La peur qui grondait en moi devait rester invisible. J'étais devenue une comédienne de haut vol, et ce soir, ma performance devait être sans faille. Un serveur apparut à mes côtés, silencieux, me tendant un verre de vin. Je le pris avec une délicatesse feinte, la coupe se portant à mes lèvres, le liquide rouge s'écoulant lentement sur mes lèvres carminées. C'était un spectacle en soi, et je savais que chaque mouvement était observé, disséqué.

Je pouvais sentir les regards. Certains étaient curieux, d'autres désireux. Parfait. C'était exactement ce qu'il me fallait. Pendant que je devenais le centre d'attention, Sonia et Tania glissèrent dans la foule comme des ombres, invisibles et efficaces. Leur mission était en cours. La mienne aussi.

Je m'approchai d'un miroir discret encastré dans l'un des murs et m'y observai un instant. Le reflet qui me renvoyait cette image semblait à la fois familier et étranger. Mes lèvres pulpeuses, peintes de rouge, semblaient murmurer des promesses interdites. Ma silhouette, mise en valeur par la robe noire moulante, dégageait une sensualité calculée, un piège dans lequel beaucoup tomberaient volontiers. Était-ce vraiment moi derrière ce masque d'assurance glacée ? Ou étais-je devenue une projection de ce que j'avais été forcée de devenir ? Une marionnette sophistiquée dans un théâtre de luxe.

— Veuillez m'excuser, messieurs, dis-je avec une voix douce et chaude, alors que je m'éloignais d'un groupe d'hommes qui tentaient d'engager la conversation. J'aurais aimé prolonger cet échange, mais je dois vous quitter. Au plaisir de vous revoir.

Mon sourire était une promesse suspendue, un leurre habile. Je me retirai avec aisance, chacun de mes pas une danse calculée, jusqu'à ce que je me retrouve face à ma véritable cible. Hugo se tenait à l'autre bout de la pièce, entouré d'une poignée d'invités, son air détendu dénotant une maîtrise totale de la situation. Mais cette maîtrise, je comptais la lui ôter.

Mon cœur accéléra à l'approche. Ce n'était pas simplement l'appréhension de la tâche, mais l'anticipation du contrôle que je m'apprêtais à exercer. J'offris un sourire captivant alors que nos regards se croisaient, et je sus instantanément que j'avais son attention. Ses yeux s'attardèrent un instant de plus sur moi, comme s'il avait déjà été conquis avant même que je n'ouvre la bouche.

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant