18 : Les règles

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Je me traînai jusqu'à la chambre, mon esprit engourdi par le poids de tout ce que je venais de vivre. En passant devant un miroir, mon regard se posa sur une tache rouge vive sur mon pantalon. Mes règles. Comme si la journée ne pouvait pas empirer. La frustration monta en moi, et je sentis une boule se former dans ma gorge. Le stress, la fatigue... tout s'était accumulé. Et maintenant ça, une douleur sourde et familière qui s'étalait dans mon bas-ventre, me rappelant à quel point mon corps se rebellait contre moi.

Avec un soupir, je commençai à désinfecter ma plaie, appliquant une crème anti-inflammatoire avant de poser un pansement sur la paume de ma main. Ensuite, j'enfilai une robe plus confortable, mais rien n'atténuait la douleur qui pulsait dans mes entrailles, grandissant à chaque seconde.

Je m'allongeai sur le lit, mes bras serrés autour de mon ventre, tentant de contrôler cette souffrance, mais les larmes montèrent, incontrôlables. Chaque respiration devenait un effort, chaque battement de mon cœur était un poids.

Alors que la nuit tombait et que les bruits du dîner résonnaient au loin, je restai prostrée dans la chambre, une tasse de thé tiède entre mes mains tremblantes. Le silence amplifiait tout, la douleur, l'épuisement, les pensées qui tourbillonnaient sans cesse. L'idée de descendre pour manger quelque chose finit par me contraindre à me lever, mes jambes lourdes et maladroites sous le poids de la fatigue.

Lorsque je franchis les derniers escaliers, l'obscurité me sembla plus dense, comme si la maison entière respirait cette tension. J'ouvris la porte du frigo, cherchant machinalement quelque chose à manger. Mais une voix basse et rauque brisa le silence.

— Ta robe est tachée de sang.

Mon cœur s'arrêta. Je me retournai, et Ezekiel se tenait là, torse nu, les bras croisés. Ses yeux, si perçants, semblaient déshabiller mon âme, capturant chaque détail de ma silhouette avec une intensité glaçante. Un frisson de honte me parcourut. Je baissai les yeux, et c'est là que je vis la tache, rouge et visible sur le tissu de ma robe.

La panique me submergea. Je m'attendais à un rictus, à une remarque acerbe, mais à ma surprise, il ne souriait pas. Ses traits étaient figés, son expression... indéchiffrable. Pas de moquerie, pas de mépris. Juste une froideur presque neutre.

— Tu empestes, ajouta-t-il enfin, ses mots secs me frappant de plein fouet.

Les larmes refoulées plus tôt remontèrent d'un coup, et je sentis mes mains trembler davantage. C'était trop. Trop pour une seule journée. Trop pour un seul corps à supporter.

—  Désolée, murmurai-je, ma voix à peine audible, brisée par l'épuisement et la honte.

Ezekiel ne bougea pas. Ses yeux restaient ancrés sur moi, mais il ne parlait plus. Puis, quelque chose changea. Son regard s'adoucit, juste un peu, à peine perceptible, mais suffisant pour que je le remarque. Il poussa un léger soupir, comme s'il était lui-même fatigué de ce jeu de brutalité qu'il s'imposait.

— Est-ce vraiment une raison de pleurer ? dit-il d'une voix plus calme, presque douce. Pour quelque chose d'aussi naturel, princesse ?

Ses mots, bien que simples, me figèrent sur place. Il n'y avait ni ironie, ni sarcasme, juste une question, sincère. Je le regardai, cherchant dans ses yeux un signe de moquerie, mais il n'y en avait pas. Pour la première fois, il semblait... humain, vulnérable même. Comme s'il s'interrogeait sur sa propre réaction, sur ce qu'il devait faire face à moi.

Je ne savais pas quoi répondre. Une chaleur étrange montait en moi, un mélange de confusion et de réconfort, et malgré moi, une larme solitaire glissa sur ma joue.

— Je suis... juste fatiguée..., murmurai-je, la voix brisée sous le poids de la douleur.

Fatiguée de tout. De lui, de ses piques cruelles, de cette lutte constante pour respirer dans son ombre. Je me sentais vide, épuisée, incapable de résister plus longtemps. Mon corps se plia sous une nouvelle crampe qui déchira mes entrailles, me laissant à bout de souffle. Les larmes me trahirent, glissant sur mes joues sans que je puisse les contenir. Une partie de moi espérait, en vain, qu'il me verrait autrement, qu'il comprendrait.

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant