LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]

59 : L'évènement des Prescott - partie 2

ANASTASIA -

La soirée battait son plein, les éclats de rire et le tumulte des conversations se mêlaient au tintement délicat des coupes de champagne. Les invités, parés de leurs plus beaux atours, semblaient danser dans une chorégraphie parfaitement orchestrée, leurs sourires étincelants masquant des secrets inavouables.

À mes côtés, Ezekiel affichait un masque de calme, mais je percevais la tension sous ses traits, la crispation de sa mâchoire. L'incident précédent semblait lui coller à la peau, comme une ombre invisible.

Cette femme... Elle avait dit vouloir s'excuser, mais ce mot, dans sa bouche, sonnait creux. Qu'avait-elle pu faire pour qu'il la déteste à ce point ?

Perdue dans mes pensées, je sentais la fatigue peser sur moi, chaque seconde de cette interminable soirée accentuant le poids de la journée. Tout à coup, une voix douce et sucrée perça mon brouillard intérieur.

— Madame Prescott, vous êtes sublime dans cette robe, me dit une femme au sourire enjôleur. Pourrais-je connaître le nom de votre couturier ?

Je relevai les yeux pour croiser son regard brillant d'une malice mal dissimulée. Son sourire, étiré d'une manière presque trop parfaite, laissait deviner qu'elle n'était pas là par simple curiosité.

— Merci beaucoup, répondis-je d'un ton mesuré. Malheureusement, je ne connais pas le nom du créateur de cette robe. Mon époux a eu la délicatesse de me l'offrir.

Un sourire plus large encore se dessina sur ses lèvres, son regard se plissant d'un amusement insidieux.

— Vous avez bien de la chance, murmura-t-elle, son ton mielleux dégoulinant de sous-entendus. On raconte que votre mariage est le fruit d'un arrangement politique... mais il semblerait que l'amour ait su trouver sa place entre vous deux.

Cette phrase me laissa interdite un instant. Ce secret, un arrangement, était censé rester entre quelques initiés. Un frisson glacé remonta le long de mon dos alors que je jetais un coup d'œil vers Ezekiel. Debout à quelques pas, il avait entendu. Son regard se fit plus sombre, ses traits se durcirent. Il n'y avait qu'une seule personne capable de lancer une rumeur aussi pernicieuse : Olga. Son nom m'effleura les lèvres, comme un murmure, et la tension monta d'un cran.

— Vous semblez bien informée, rétorquai-je d'une voix calme, teintée d'une ironie glaciale. Mais un conseil : il est toujours dangereux de prendre les ragots pour des vérités, surtout dans des cercles comme le nôtre... influents et impitoyables.

Mes mots flottaient dans l'air, une menace subtile mais indéniable. Je la fixai, impassible, mes yeux sondant les siens. Elle eut un léger sursaut, probablement surprise par l'intensité de ma réponse.

— L'amour, la politique... ce sont des jeux risqués, continuai-je doucement. Certaines curiosités ont mené bien des âmes à des fins regrettables.

Avant même qu'elle ne trouve une réplique, Ezekiel s'approcha de nous. Ses pas étaient lents, calculés, et son sourire — presque un rictus — ne laissait aucune place au doute.

— Olga... cette chère Olga, murmura-t-il, chaque syllabe trempant dans un venin froid. Toujours à se mêler de ce qui ne la regarde pas.

Il inclina légèrement la tête, ses yeux transperçant les siens avec une intensité glaciale.

— Il est amusant de constater combien certains aiment s'approcher des flammes, reprit-il, la voix douce mais chargée d'une cruauté implacable. Mais il faut savoir que cette curiosité finit souvent par se payer très cher.