22h30.
La lumière vacillante du néon jetait des ombres étranges et mouvantes sur les murs de mon bureau. Tout autour de moi, le chaos régnait. Les papiers, éparpillés, déchirés, griffonnés à la hâte, étaient les vestiges d'une bataille silencieuse. Mon bureau, autrefois un sanctuaire d'ordre et de contrôle, n'était plus qu'un champ de ruines. Les dossiers éventrés, les objets renversés, tout témoignait de la violence qui m'avait traversée. Même la lampe de bureau clignotait, hésitante, comme si elle craignait de braver les ténèbres qui semblaient m'envelopper.
J'étais assise, seule, au milieu de ce désastre, les jambes croisées, mes mains crispées sur les accoudoirs du fauteuil. Mes jointures, blanchies sous la pression, trahissaient la tension qui me consumait. Mon regard, fixe, perçait le vide, mais mon esprit était un maelström de rage et de tourments. À l'extérieur, le monde pouvait sembler calme, mais à l'intérieur de moi, tout brûlait.
Puis, soudain, la porte s'ouvrit brusquement, coupant le silence. Leur arrivée ne fit aucun bruit, mais elle était lourde, oppressante, comme si l'atmosphère elle-même se durcissait autour d'eux. Trois hommes se tenaient là, immobiles. Leurs silhouettes, larges et imposantes, taillées dans la violence, semblaient appartenir à un autre monde. Leurs vêtements, maculés de sang frais, laissaient échapper des gouttes rouges qui s'écrasaient sur le sol avec une lenteur effrayante. L'odeur métallique du sang flottait dans l'air, se mêlant au tabac froid qui imprégnait l'espace, ajoutant à l'atmosphère suffocante.
Leurs regards se posèrent sur moi, glacials, impitoyables. C'était comme être face à des prédateurs. Chaque geste était mesuré, chaque respiration calculée. Ils attendaient, observant. La tension, palpable, s'épaississait de seconde en seconde.
— Parlez ! lançai-je, d'une voix tranchante, brisant le silence avec la force d'un coup de fouet.
L'un des hommes, le plus imposant, s'avança. Une barbe épaisse couvrait son visage, mais c'était ses yeux, durs comme l'acier, qui captivaient. Son regard, impassible, inébranlable, se planta dans le mien alors qu'il ouvrait la bouche. Sa voix, grave et lente, résonna dans la pièce comme un grondement lointain.
— Silène et Terra ont reçu des ordres de V..., commença-t-il, chaque mot pesant lourdement dans l'air. V... était autrefois un employé de votre réseau, un homme de confiance, jusqu'à ce que vos parents le renvoient après une tentative de renversement. Il a voulu prendre le contrôle de l'organisation...
Mes mains se crispèrent encore davantage sur les accoudoirs. Un frisson glacial parcourut ma colonne vertébrale. La mention de mes parents fit resurgir des souvenirs que j'avais tenté d'enfouir, mais cette révélation, liée à eux, nourrissait ma colère, réveillait mes peurs les plus profondes. Mon cœur battait à une vitesse folle, mais mon visage resta de marbre, tandis que mes lèvres se pinçaient, contenant une fureur grandissante.
— Son nom complet ? demandai-je, d'une voix glaciale, chaque syllabe tranchante comme une lame bien aiguisée.
Le silence qui suivit fut insoutenable. L'homme à la barbe hésita, échangeant un regard bref avec son compagnon, celui dont la cicatrice, profonde, déformait un côté de son visage. Une seconde d'hésitation qui en disait long sur la gravité de la situation.
— Nous l'ignorons, Madame, répondit le cicatrisé, sa voix aussi grave que celle de son partenaire. Seuls vos parents et quelques proches connaissent vraiment son identité. Même lorsqu'il travaillait ici, son nom était l'un des secrets les mieux gardés.
Un vide s'ouvrit en moi, un gouffre sans fond. Un nom sans visage, un ennemi sans forme... Cette ombre qui rôdait autour de moi depuis si longtemps se faisait encore plus insaisissable. Je pouvais sentir la panique gronder en moi, mais je la repoussai, farouchement, la remplaçant par une froide détermination.
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LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]
Mystery / ThrillerQue faire quand les apparences trompent et que le destin vous trahit ? Dans le monde luxueux mais impitoyable d'Anastasia Miller, bien qu'elle soit née dans une richesse apparente, elle n'a jamais connu l'amour de ses parents, toujours absents. Mais...