LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]

50 : L'amie

Quelques jours plus tard...

J'étais enfin remise de ma maladie, les forces me revenaient lentement, insufflant dans mes veines une vigueur nouvelle. L'anticipation me portait, une chaleur douce dans le cœur à l'idée de retrouver mon mari. La maison se découpait dans la lumière du crépuscule, sereine et familière, comme un refuge après l'épreuve. Mais ce soir-là, en franchissant le seuil, une tempête inattendue me foudroya.

En ouvrant la porte du salon, je me figeai, comme happée par une scène qui me coupait le souffle. Ezekiel était là, assis, un verre de vin à la main, avec une nonchalance qui me frappa de plein fouet. Mais ce n'était pas lui qui m'ôta l'air des poumons. C'était elle. Une femme blonde, d'une beauté glaciale, presque irréelle, était assise près de lui — bien trop près. Chaque mouvement qu'elle faisait semblait parfait, étudié, comme si elle était une œuvre d'art vivante. Une vague de jalousie brûlante monta en moi, un brasier qui s'enroula autour de mon cœur, serrant chaque battement, m'étouffant.

Leurs rires doux, la complicité dans leurs regards, cette aisance naturelle... Ils paraissaient si à l'aise, comme si j'étais devenue une intruse dans ma propre vie. Mes mains tremblèrent, un flot d'émotions contradictoires menaçant de m'engloutir. Comment osait-il ?

Finalement, Ezekiel tourna son visage vers moi, et son sourire... Oh, ce sourire ! Sournois, cruel, comme s'il savourait la tempête qu'il déclenchait en moi. Il tendit la main, effleurant une mèche de cheveux du visage de la femme, son regard verrouillé dans le mien.

— Elle est là, murmura-t-il d'un ton qui vibrait de moquerie.

— Ah bon ? J'avais hâte de la rencontrer... répondit-elle, ses yeux bleus d'un froid saisissant se posant sur moi avec une précision perçante.

Chaque mot qu'elle prononçait résonnait comme un coup de poignard. Ils parlaient de moi, et pourtant, je me sentais invisible, spectatrice démunie de leur petit jeu. Je les observais, ma colère et ma douleur formant une boule de feu dans ma poitrine. Puis, la femme se leva, glissant de son siège avec une grâce insolente. Elle ajusta sa robe, chaque geste semblant étudié pour irriter, pour m'éclipser. Elle s'approcha de moi, un sourire figé aux lèvres, un sourire qui semblait dire : Je n'ai pas besoin de toi ici.

— Bonsoir, je m'appelle Elodie, dit-elle d'une voix soyeuse, tendant une main froide comme le marbre. Je suis une vieille amie d'enfance d'Ezekiel.

Je pris une inspiration profonde, contenant la tempête qui grondait en moi. D'un pas lourd de fureur contenue, je m'avançai et lui tendis la main, glaciale.

— Anastasia, dis-je d'un ton sec, marquant une pause avant d'ajouter, d'une voix acérée : Sa femme.

Son sourire ne fléchit pas, mais une lueur de triomphe s'alluma dans ses yeux.

— Oui, je sais. Ezekiel m'a beaucoup parlé de vous... Vous êtes comme sur vos photos de mariage, ajouta-t-elle avec une chaleur fausse, presque mielleuse.

Les photos de mariage... Un souvenir oublié, un moment où mon sourire était figé pour la caméra, une façade. Ezekiel les avait, les chérissait même, comme s'ils étaient des reliques de notre union. Chaque fois que je les apercevais dans son bureau, une pointe de douleur se glissait dans ma poitrine, un rappel de cette façade que je n'avais jamais vraiment embrassée.

— Ah... je vois, répondis-je, la voix à peine plus qu'un murmure, tentant de ne pas flancher.

Le masque d'Elodie sembla alors se fissurer, révélant une froideur mordante, une cruauté tranquille qui dansait dans ses yeux.

— Mais... il aurait pu trouver mieux que vous, murmura-t-elle, son regard étincelant de défi.

Mon cœur explosa, la rage jaillissant comme un torrent incontrôlable. J'étais prête à répondre, à lui faire comprendre la place qu'elle n'avait pas, mais Ezekiel se redressa, brisant l'électricité de la pièce. Il prit une longue gorgée de son vin, posant le verre avec une lenteur calculée, son regard passant de moi à elle.