45 : Sortie nocturne

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Le lendemain, alors que je m'efforçais de me plonger dans la lecture d'un rapport dans mon bureau à la maison, un éclat de rire soudain brisa le silence morose qui régnait dans la pièce. Avant que je n'aie le temps de lever les yeux, la porte s'ouvrit brusquement, laissant entrer Tania et Sonia dans une effusion d'énergie si vive qu'elle semblait repousser les ombres accumulées dans les coins. Leur présence illuminait la pièce, et malgré moi, un sourire discret se dessina sur mes lèvres, trahissant le plaisir inattendu que je ressentais à les voir.

— Anastasia, tu dois absolument venir avec nous ce soir ! s'exclama Tania, ses yeux pétillants d'excitation, son enthousiasme irradiant comme un soleil au milieu de la grisaille.

— En boîte de nuit, précisa Sonia, se penchant vers moi avec un sourire complice, ses yeux remplis d'une malice douce et amusée.

Un léger rire nerveux m'échappa, et pourtant, une question brûlante s'imposa dans mon esprit : Ai-je vraiment droit à ce genre de chose avec un mari comme Ezekiel ? Ce mari énigmatique et possessif dont la présence s'étendait comme une ombre au-dessus de mes libertés ?

— Ne me dis pas que tu vas rester ici, coincée entre ces murs, alors que tu pourrais être dehors à t'amuser ? lança Sonia, sournoise, comme si elle pouvait lire mes hésitations et s'amusait à les écarter d'un geste de la main.

Je les regardai tour à tour, indécise, partagée entre la tentation irrésistible de fuir l'atmosphère pesante de la maison et la prudence qui me soufflait de rester. Hugo Brown rôdait toujours, menaçant silencieusement l'équilibre fragile que je tentais de maintenir. Mais l'idée de m'échapper, de me perdre dans le tourbillon d'une nuit, ne serait-ce que pour quelques heures, était si tentante.

— Et Ezekiel, dans tout ça ? demandai-je, une pointe d'inquiétude dans la voix, ma fidélité se dressant comme une barrière fragile.

— Ne t'inquiète pas, c'est une boîte de nuit que nous fréquentons tous, et il n'y aura rien de dangereux, me rassura Tania avec un sourire joyeux, une main sur la hanche. Moi et Sonia, la Reine des Glaces, on veillera sur toi.

La Reine des Glaces... ce surnom lui allait si bien. Un sourire étira mes lèvres en pensant à tous leurs sobriquets, une sorte de code entre eux, comme si chaque nom cachait un fragment de leur personnalité.

Dick, le fauteur de trouble.
Tania, la faucheuse.
Ava, la vipère.
Ezekiel, le roi démon.
Olivier, le coureur de jupons.
Sonia, la Reine des Glaces.

Et pourtant, seul Armon semblait échapper à cette règle. Il n'avait pas de surnom. Il était comme une énigme silencieuse dans leur groupe, calme et réservé, s'exprimant seulement lorsque c'était nécessaire, insaisissable. Avec moi, cependant, il se montrait différent, plus bavard, plus attentif.

— Pourquoi Armon est-il le seul à ne pas avoir de surnom dans votre groupe ? demandai-je, une curiosité sincère dans la voix.

Tania et Sonia échangèrent un regard, visiblement surprises par ma question.

— Il en a un, murmura Sonia, son regard se durcissant légèrement. L'exécuteur.

Je restai figée, incapable de masquer mon étonnement. Le mot résonnait dans mon esprit comme un coup de tonnerre, ouvrant une brèche dans l'image que je m'étais faite de lui. Tania s'installa sur la chaise en face de moi, croisant les jambes avec un air sournois, un sourire énigmatique jouant sur ses lèvres.

— Par rapport à nous tous, qui avons déjà tué, Armon est celui qui a arraché le plus de vies humaines, annonça-t-elle d'un ton léger, presque indifférent, comme si elle me révélait un simple fait.

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant