44 : Des questions ?

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Le soleil à peine levé n'offrait qu'une lueur blafarde, insuffisante pour percer les ombres épaisses qui se bousculaient dans mon esprit. J'étais assise dans mon bureau, réfugiée derrière l'écran de mon ordinateur, cherchant désespérément dans la routine une échappatoire aux tourments de ces derniers jours. Le cliquetis familier du clavier semblait pourtant lointain, étouffé sous le poids de mon épuisement et de cette fatigue qui alourdissait mon âme autant que mon corps.

Ma tête était comme prise dans un étau, chaque pensée déclenchant un nouvel élancement douloureux. Les souvenirs des nuits passées me revenaient par vagues : les cris déchirants, les larmes brûlantes, et cette peur qui me lacérait, chaque crise d'angoisse me plongeant un peu plus dans une obscurité sans fond. J'avais voulu ignorer les signes, me convaincre que ce n'était que le stress, la fatigue accumulée, le prix à payer pour m'adapter à cette nouvelle vie. Mais au fond, une petite voix me répétait inlassablement que quelque chose en moi était brisé, irrémédiablement.

Les mains crispées sur mes tempes pour tenter d'apaiser ma migraine, je fixais l'écran sans réellement voir les lignes de texte qui défilaient. Tout était flou, irréel, comme si le monde perdait sa substance, m'enfermant dans une bulle oppressante où chaque respiration était une lutte.

La porte du bureau s'ouvrit sans bruit, tirant mon attention. Je levai les yeux, et Ezekiel apparut dans l'encadrement, ses traits empreints d'une lassitude inhabituelle. Cette fois, pas de costume impeccable, pas de masque de froideur calculée ; il portait un simple t-shirt sombre et un pantalon en coton, comme s'il avait abandonné, ne serait-ce qu'un instant, sa carapace de perfection.

Il s'avança sans un mot et s'effondra sur le canapé en cuir au fond de la pièce, un verre d'alcool à la main. Il fixait le vide devant lui, mais je savais qu'il m'avait vue, que sa présence était intentionnelle, presque calculée. Son regard semblait me peser dessus, un fil invisible me reliant à lui dans ce silence étrange. Ses cheveux en bataille, ses cernes creusés, et cette posture nonchalante, presque désabusée... Il paraissait porter un poids qui dépassait ses propres épaules.

Mon cœur s'emballa, un frisson glacial parcourut ma colonne vertébrale. C'était plus qu'une simple fatigue qui me secouait, je le sentais. Il y avait quelque chose de troublant dans cette proximité muette, une tension à peine perceptible mais intense, qui semblait s'épaissir avec chaque seconde qui passait.

Pourquoi me perturbait-il autant ? Pourquoi, dès qu'il était là, mon calme se dissolvait pour laisser place à une chaleur confuse, un trouble que je ne savais expliquer ?

Détournant les yeux, je tentai de me concentrer sur mon écran, me réfugiant derrière les chiffres et les mots qui n'avaient plus de sens. Mais c'était peine perdue. Ezekiel était là, imprégnant chaque recoin de la pièce de sa présence. J'entendais presque le rythme régulier de sa respiration, et chaque geste qu'il faisait, aussi discret soit-il, amplifiait mon malaise.

— Tu comptes rester silencieuse toute la journée ? lança-t-il enfin, sa voix rauque transperçant le silence comme une lame acérée.

Je sursautai, prise au dépourvu par la brutalité de ses mots, ce mélange singulier de sarcasme et de provocation. Il ne me regardait toujours pas directement, mais je sentais son regard, lourd et scrutateur, percer mon masque de détachement. Mon cœur s'accéléra un peu plus, une chaleur dévorante montant en moi malgré moi.

— Je travaille, répondis-je, essayant de garder une voix calme, bien que tremblante malgré mes efforts. J'ai beaucoup à faire...

Il émit un ricanement, un sourire narquois étirant ses lèvres.

— Oh, je vois ça, répondit-il d'un ton moqueur, ses yeux perçant chaque façade que j'essayais de garder. On dirait bien que ta migraine aide beaucoup à ta productivité.

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant