51 : Moments - partie 1

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Elodie essuya ses larmes d'un revers de main, et dans son regard brisé, la douleur se mua peu à peu en une rage froide et implacable. Son visage, encore trempé de larmes, s'assombrit, et une lueur de détermination naquit au fond de ses yeux. Comme deux soldats marqués par les cicatrices de leurs blessures, elle et Ezekiel se redressèrent, unis dans cette soif commune de vengeance.

Une part de moi comprit, soudainement, toute la souffrance que portait Ezekiel. Cet homme, que je croyais impassible, avait été profondément meurtri en amour. Sous son masque dur et distant, je découvrais un cœur cicatrisé, un homme qui n'avait cessé de lutter contre des trahisons et des illusions perdues.

Elodie, les larmes encore présentes, baissa légèrement la tête, marquée par le poids des remords.

— Je suis désolée... pour le manque de respect que j'ai pu vous témoigner, à toi et à elle, murmura-t-elle d'une voix brisée, la voix empreinte de sincérité. Je pensais bien faire, mais je me suis trompée...

— Moi, je m'en fiche, rétorqua Ezekiel, le regard glacé, d'une indifférence tranchante. Mais pour ce qui est de ma femme...

Il se tourna vers moi, et ses traits se radoucirent soudainement. Un éclat de douceur inédite passa dans ses yeux, un regard protecteur qui m'arracha un frisson de chaleur. Je restai silencieuse, laissant mes pensées se bousculer en moi, en résonance avec les émotions contradictoires qui tourbillonnaient. Je comprenais Elodie et la souffrance de tout perdre, de voir s'effondrer ce en quoi on croyait.

— C'est oublié, dis-je enfin d'une voix tremblante, sentant chaque mot vibrer avec émotion.

Elle hocha la tête, ramassant les photos éparpillées au sol. Mais Ezekiel, lui, semblait se battre avec quelque chose d'invisible. Ses sourcils se froncèrent, ses poings se serrant alors qu'il contenait des sentiments encore enfouis.

Elodie se redressa, ajusta son sac, puis, avant de partir, se tourna une dernière fois vers nous, ses yeux encore rougis mais pleins d'une nouvelle détermination.

— Ezekiel... tu devrais vraiment lui dire ce que tu ressens, lâcha-t-elle, un sourire amer aux lèvres.

Il haussa un sourcil, pris de court par ses paroles.

— Vraiment ? répondit-il avec un soupçon d'ironie, masquant peut-être un trouble qu'il ne voulait pas révéler.

Elodie me lança un dernier regard, presque complice.

— Elle aussi... Elle ressent la même chose que moi. Je reconnais une femme amoureuse, Ezekiel. J'ai été comme elle, autrefois, dit-elle doucement, avant de se détourner et de quitter la pièce.

Je restai figée, touchée par ses mots. N'avait-il pas déjà dit qu'il partageait mes sentiments ? Alors pourquoi ce silence maintenant ? Mon cœur battait fort, cherchant des réponses dans ses yeux sombres. Mais avant que je ne puisse réagir, Ezekiel s'avança vers moi, me prit dans ses bras et m'embrassa avec une intensité qui fit vaciller mes doutes.

Il me souleva avec une douceur inattendue, comme si j'étais une chose précieuse, fragile, à protéger. Lentement, il me porta dans sa chambre, un endroit que je n'avais encore jamais vu, et pourtant que j'avais imaginé tant de fois.

En entrant, je fus frappée par la simplicité élégante de la pièce. Les murs d'un gris profond ajoutaient une sérénité mystérieuse, et de grandes fenêtres donnaient sur une terrasse où la pluie s'abattait avec force. Le lit, recouvert d'une couverture en velours gris immaculée, dégageait un calme apaisant, en contraste avec le grondement de l'orage qui se déchaînait à l'extérieur.

Ezekiel m'allongea doucement sur le lit, et ses lèvres commencèrent à explorer ma peau avec une lenteur calculée, presque révérencieuse. Chaque baiser semblait une promesse silencieuse, chaque caresse une tentative de gravure indélébile. Mais je sentais aussi une hésitation en lui, une ombre qui flottait dans son regard. Sa main, d'abord assurée, se mit à trembler légèrement.

LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant