LIÉE À LUI MALGRÉ MOI [TOME 1]

56 : Des vacances ensemble

La nuit avait enveloppé la ville dans un manteau de calme trompeur, un silence tendu qui amplifiait le poids de la culpabilité écrasant mes épaules. Après notre dispute, la tristesse m'avait envahie, me noyant dans un océan d'émotions lourdes et sombres. Chaque battement de mon cœur me rappelait les mots amers que nous avions échangés, et un besoin irrépressible de le retrouver m'étreignit. Incapable de supporter ce vide, je décidais de rentrer avec lui. Ce soir, j'avais besoin d'être près de lui.

J'ouvris doucement la porte de son bureau, hésitante. La scène qui s'offrit à moi me coupa le souffle : Ezekiel était là, assis, le regard perdu dans le vide. La lumière tamisée accentuait les ombres sur son visage, rendant plus évidente la douleur dissimulée dans ses traits. Une tristesse sourde flottait autour de lui, presque palpable, comme une aura de mélancolie qui me transperça de part en part. Il semblait figé, emprisonné dans un moment de silence et de regret.

Mes pas étaient feutrés, hésitants, de peur de briser l'équilibre fragile de cette scène. Je m'approchai de lui, et lorsqu'il leva les yeux, son regard se posa sur moi. Il tenta de me sourire, mais c'était un sourire vide, une façade qui ne cachait rien de la tempête silencieuse qui le rongeait. Un serrement étrange étreignit mon cœur, et sans dire un mot, je m'installai lentement sur ses genoux, mes bras entourant son cou, cherchant à lui offrir un réconfort que les mots ne pouvaient traduire.

Nos regards se croisèrent, puis nos lèvres se frôlèrent dans des baisers lents, désespérés, comme si chaque contact était une promesse silencieuse, un moyen de chasser les fantômes qui le hantaient. Il y avait dans ses gestes une douceur presque douloureuse, comme si, malgré lui, il me demandait pardon.

Le silence entre nous se fit lourd, presque tangible, jusqu'à ce qu'il le brise enfin, sa voix hésitante, presque cassée, comme s'il luttait contre chaque mot avant de le libérer.

— Je vais te laisser profiter de tes vacances dehors, murmura-t-il, son regard fuyant le mien, empli d'une hésitation poignante.

Ses mots frappèrent mon cœur comme un coup de tonnerre. Je sentis une vague de culpabilité m'envahir. Je savais que ce n'était pas une vraie décision, mais plutôt une reddition, un acte de désespoir. Une part de lui cédait, mais non pas par confiance, seulement pour apaiser ma souffrance. Je voulais lui dire que je ne voulais pas qu'il cède de cette façon, mais il reprit, sa voix légèrement plus ferme, comme s'il voulait se convaincre lui-même :

— Je serai avec toi tout au long des vacances. Je ne referai pas la même erreur qu'avec ma sœur. Le jour où elle a disparu... je n'étais pas là pour la protéger. Et je ne me le pardonnerai jamais.

Ses paroles s'infiltrèrent en moi, glaciales, et chaque mot semblait porter un poids dévastateur, une douleur profonde qui m'effleura l'âme. La culpabilité qu'il portait depuis toutes ces années, le fardeau d'une perte qu'il n'avait jamais pu combler... Je comprenais enfin pourquoi il tenait tant à me protéger, pourquoi il semblait prêt à me garder sous clé si cela pouvait apaiser cette terreur viscérale de revivre cette tragédie.

Sans un mot, je posai mes mains sur son visage, l'obligeant à me regarder dans les yeux. Son regard était voilé de tristesse, une tristesse que des années de colère et de contrôle n'avaient pu effacer. Dans ses prunelles, je vis la vulnérabilité d'un homme qui avait perdu quelqu'un de cher, et qui craignait de revivre cette douleur une nouvelle fois. Lentement, je l'embrassai, mes lèvres effleurant les siennes avec une douceur infinie, espérant lui transmettre une part de mon amour et de ma compréhension.

— Merci, murmurai-je contre ses lèvres, la voix douce mais brisée, emplie de gratitude. Merci pour tout ce que tu fais... même si cela te blesse.

Il me regarda un instant, comme s'il cherchait des réponses dans mes yeux. Puis, il resserra son étreinte, m'enveloppant dans ses bras avec une intensité qui disait tout ce que les mots ne pouvaient exprimer. Son souffle chaud se mêla au mien, et, dans un murmure presque imperceptible, il répondit, la voix brisée par l'émotion :