𝓭𝓸𝓵𝓵 𝓱𝓸𝓾𝓼𝓮 /6/

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TW : pensées suicidaires

°°°

Je lui ai dit que s'il me laissait partir, je ne dirais rien à la police. Honnêtement. Que s'il me laissait m'en aller, il n'aurait rien à craindre.

Je lui ai dit de me laisser partir. Je le lui ai demandé. Plusieurs fois. Supplié. Montré à quel point il m'avait détruite, je lui ai montré à quel point j'étais devenue faible. Plusieurs fois.

Sale. Inutile. Idiote. Dévalorisée. Droguée. Je ne compte plus les adjectifs qui peuvent me décrire.

Je ne suis qu'un objet. Son fantasme. Il me prend pour quelqu'un que je ne suis pas et je ne lutte plus pour le contredire. A quoi bon ? Me ramasser une cicatrice de plus ?

A quoi bon lutter désormais ?

A quoi bon résister ?

A quoi bon vivre ?

A quoi bon... tout court.

Je n'ai plus de raison de vivre. Je ne sais plus ce que ça fait de sourire. Quand j'essaie, ce n'est qu'une horrible grimace. Je ne sais plus ce que ça fait de rire, de se sentir aimée. Ça fait une éternité que je ne me suis pas regardée dans un miroir.

Je devrais pourtant. Pour me rappeler de ce à quoi je ressemble. Pour voir les vestiges de celle que j'étais avant. Pour garder un contact avec la réalité et ne pas perdre la tête. Mon nom ? Je ne sais plus tellement. Chaque fois que j'essaye de me rappeler, "Bee" clignote devant mes yeux. Confiance en soi ? Je ne sais plus ce que c'est. Ma famille ? La couleur de mes yeux ? Mes amis ? Cela m'importe peu.

Papa ne me retrouvera pas. Il faut que je voie la réalité en face. C'est fini et il faut que je l'assimile. Cependant, je ne compte pas le laisser jouer encore avec moi. Je ne le laisserai pas avoir le dernier mot. J'ai un plan, rapide et efficace. Je ne lui appartiendrai plus. Je serai libérée. Libérée de lui, de cet endroit qu'est ma prison, de ma tristesse, de ma douleur, je serai libérée de mon corps ravagé, cette loque misérable.

Je vais quitter ce monde, tout simplement.

La corde qui lie constamment mes mains, j'ai réussi à défaire son noeud avec le crochet que j'avais cassé de la fausse fenêtre de la salle de bain. Je n'ai pas le choix. C'est ma dernière option. Il n'y a aucune sortie dans cette pièce. J'ai tenté de chercher, mais j'avais trop peur qu'il me tombe dessus en pleine action. Alors je me suis recroquevillée dans mon coin et j'ai continué à faire tout ce qu'il me demandait.

A fumer quand il voulait que je fume.
A lui répondre quand il m'appelait Bee.
A faire comme si je l'aimais alors qu'il me répulse du plus profond de mon âme.

Mais, peut-être qu'en mettant fin à mes jours, je me réveillerais pour constater que ce n'était qu'un cauchemar. Oh oui, ce serait parfait. J'ai hâte de passer à l'acte et d'en finir définitivement. Laissez-moi me libérer de mon corps.

Lassée d'écouter le silence qui ne répond jamais à mes questions, je me lève et défais le noeud. Avec un pincement au coeur, je vérifie qu'il est bien assez long.

InceptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant