Inception

n a e m a |19|

-Qu'est-ce que tu as mis à la troisième question ? demande Bruce.

-Sur les états totalitaires ? J'ai mis qu'ils étaient dirigés par un dictateur, qu'il n'y avait pas de liberté d'expression et que la propagande était fortement utilisée pour contrôler le peuple. Par exemple... le fascisme de Mussolini ou le nazisme d'Hitler. C'était facile, dit Aguir.

Il est tellement sexy quand il dit des trucs intelligents. Aguir me regarde et je mordille ma lèvre en effleurant sa cuisse de la mienne. Il ouvre la bouche puis la ferme rapidement, gêné, en plongeant son regard sur la table. Trop mignon.

Lid repousse son plateau et soupire.

-J'ai raté alors. Moi, j'ai écrit « ce sont des régimes où il n'y a pas d'état ».

-Moi, j'ai rien mis, dit Soo en fourrant sa tête dans ses bras croisés.

-Fermez vos gueules. Moi j'ai même pas remis ce devoir, dis-je amèrement.

Il m'offrent un silence compatissant et je roule des yeux. Bruce rassure mon amie qui râle encore en la prenant dans ses bras et en lui embrassant la joue. Je devine qu'il lui demande si elle va bien et elle acquiesce. Il pose ensuite ses yeux sur moi et je détourne mon attention sur mon âme-sœur.

Je serre la main d'Aguir sous la table et discrètement, il me lance un sourire rassurant. J'aimerai tellement le galoche ici, dans la cantine. Je n'ai vraiment pas l'habitude de me cacher. Si je m'écoutais, je le plaquerais sur la table et mes mains iraient- bref. En résumé, il faut que je crie haut et fort mon amour pour Aguir. Mais sa sécurité m'importe plus.

-Ah, on a oublié de vous le dire. Bruce va jouer de la guitare à la fête de l'école !

-Guitare ou guitare électrique ?

-Guitare électrique.

Lid a toujours eu un faible pour les guitaristes. Tonto en était un. J'espère qu'il brûle en enfer.

-Hâte de voir ça, dis-je en sortant mon miroir.

J'applique du rouge pétant sur mes lèvres qui me semblent trop à découvert. Sacré Aguir. Je vais devoir emporter tous les jours deux tubes avec moi s'il continue de m'embrasser comme ça. Dès que nous sommes seuls, il s'attaque à mes lèvres. J'avoue ne pas être innocente dans l'histoire.

Je me demande comment et quand offrir sa première fois à Aguir. Je la joue normal et on fait ça chez lui ou chez moi ? Ou je plagie les films et lui offre un dîner aux chandelles avant de sauvagement le foutre à poil ? Nan, c'est pas moi, enfin, pour le côté dîner au chandelles seulement.

Est-ce que je lui sors la phrase type bien nunuche 'je serais douce' ou je vais droit au but et éclate les ressorts du matelas ? J'espère qu'Aguir a un lit solide. Est-ce qu'il préfère commencer par un 'accouplement normal' ou je sors les menottes et les bandeaux ? Nan, c'est trop tôt pour ça.

Bon, ce qui compte, c'est qu'on le fasse, le décor est pas si important. Faut avouer que je suis en manque de zizi, mais l'abstinence, c'est cool aussi. Pour l'instant.

Dans le reflet de mon miroir, mes pensées philosophiques sont interrompues et les mouvements circulaires de ma main sur ma bouche se figent. Derrière moi, j'ai l'impression de reconnaître une tache blanche.

Non, pas une tache.

Comme un masque. Troué.

Je me retourne brusquement, mon miroir tombe par terre. Je scanne tout le monde. Les élèves mangent bruyamment et j'ignore les regards qu'on me lance.