Le lundi 23 septembre, Saguenay
Point de vue Abrían
Tandis que je regarde la télé, quelqu'un toque à la porte de chez moi. Certainement Stacey. Je ne lui ai pas donné signe de vie de toute la journée, j'aurai eu le temps mais je n'en ai pas eu le coeur. Hier, elle a vraiment été au comble de l'insupportable autant avec Meï qu'avec les autres. On était là pour passer un bon moment et elle gâche tout avec ses crises de jalousies à répétition. Je ne sais pas comment lui faire comprendre qu'en étant comme ça, elle va finir par me perdre. Il existe des gens qui se quittent en ayant encore des sentiments et ça serait dommage que l'on en arrive à un tel point.
Je me lève du canapé et pars ouvrir la porte. Sans grande surprise, je vois Stacey. Elle semble assez gênée, ne sachant pas comment j'allais la recevoir. Ma cocotte, crois-moi que tu vas ramer. De simples excuses ne suffiront pas cette fois-ci.
« Vas-y entre ! », lui dis-je froidement.
Elle est surprise par mon ton et sans doute aussi par le fait que je n'ai aucun geste tendre avec elle. En réalité, je me contiens de ne pas exploser. Elle a de la chance d'être une femme, si ça avait été un homme je lui aurais foutu un coup de poing dans le visage.
Intimidée, elle reste immobile dans l'entrée.
« Je... je voulais te parler...
— Effectivement je crois qu'il faut que l'on parle ! », m'exclamai-je sèchement.
Elle me regarde intensément avant de baisser son regard, toute penaude. Elle rentre dans le salon, moi sur ses pas. Je lui fais signe de s'assoir alors que je reste debout. J'ai besoin de pouvoir bouger en cas d'envie soudaine de meurtre.
« Je suis désolé pour hier. Je me suis comportée comme une idiote !
— Non tu crois ?, ironisai-je.
— Je suis désolé. Je n'aurais pas du me comporter de cette manière !
— Tu crois qu'un simple désolé va suffire ? Je crois que tu ne saisis pas les dégâts que ton comportement a sur notre couple ! »
Mon ton est amer et je me contiens de ne pas lui sortir toute ma haine. Je suis en colère certes mais je ne veux pas la blesser en disant des choses que je ne pense pas au fond.
« Je sais... Je suis trop jalouse et possessive !
— Mais ce n'est même pas ça que je te reproche en faite !
— Alors tu me reproches quoi ?
— Ça ! », m'exclamai-je en tendant les bras vers elle.
Elle me fixe intensément, plonge son regard dans le mien. Elle semble perdue.
« Quoi, ça ?
— Un jour Stacey, je ne t'excuserais plus pour ton comportement. Un jour j'en aurais tellement marre que je te quitterais et ça ne sera pas la faute d'une autre fille mais uniquement ta faute. Pour le moment je te pardonne facilement mais un jour ça sera le pardon de trop.
— Alors quitte moi si je t'insupportes autant !, s'exclama-t-elle les larmes aux yeux.
— Je ne désire pas te quitter ! Je te préviens juste que mon seuil de tolérance commence à sérieusement baisser. Je ne peux avoir aucune amie fille sans que tu ne la vois comme un danger potentiel pour nous ! T'oublies juste que c'est avec toi que je suis et pas une autre !
— Parce que Meï est un danger pour nous !
— Mais tu délires ma parole !, m'emportai-je.
— Je délire ? T'en es sûr ? Pourquoi vous êtes si proche tous les deux ? Puis vos regards complices n'échappent à personne !, s'écria Stacey en se levant.
— Parce que j'étais le médecin de Matthew. C'est le premier patient dont j'avais la charge et que j'ai malheureusement perdu ! »
Elle me regarde, les yeux comme des soucoupes et un long silence se fait entre nous.
« Je ne savais pas... Je suis désolé !
— Arrête d'être désolé putain ! Justement quand on ne sait pas on se tait !
— Pourquoi tu ne m'as rien dit aussi ?
— Mais qu'est-ce que ça aurait changé ? Rien ! Tu es une jalouse maladive et tu es possessive.
— Ça aurait changé dans le sens où je n'aurais plus vu Meï comme une menace ! Je ne t'aurais pas fait de scènes comme j'ai pu t'en faire !
— Putain mais Meï n'est pas une menace. Arrête avec ça ! Arrête ! Tu deviens insupportable ! », hurlai-je.
Je la fusille du regard tandis que mon ton est de plus en plus haineux. Elle reste silencieuse.
« J'avoue Meï est une jolie fille et oui je m'entends bien avec elle, mais je ne suis pas intéressée une seule seconde par elle. Quand on parle, on parle essentiellement de Matthew ou de toi. Où tu vois que c'est propice à une tromperie ? Dis-moi où ?
— Mais tu reconnais quand même que c'est une jolie fille !
— Andrew aussi te le dirait. Pourtant il aime plus que tout Daniela. Je ne vais pas te répéter toutes les heures que je t'aime et que je suis amoureux de toi parce que ça finirait par dénaturer notre couple. Prends sur toi ou je ne sais pas, mais si vraiment tu m'aimes il va falloir que tu changes un tantinet ton comportement.
— Comment tu peux douter une seule minutes de mes sentiments ?, me dit-elle ahurie.
— Depuis que j'ai plus l'impression d'être ton objet que ton copain », rétorquai-je.
Il fallait bien que ça sorte un jour ou l'autre. Je ne supporte plus son besoin viscéral de faire comprendre que je suis à elle et à personne d'autre. Elle s'approche de moi et tente de me prendre les mains mais je la repousse froidement. Elle pousse un long soupir.
« Écoute Stacey, je sais que tu veux que l'on vive ensemble mais je ne pourrais pas vivre avec quelqu'un qui ne me fait pas confiance et qui m'emprisonne. Alors tant que tu n'auras pas mis de l'eau dans ton vin, je te proposerai pas et n'accepterai pas de vivre ensemble !
— D'accord je vais changer mais à la seule condition que tu arrêtes de parler à Meï ! »
Je la regarde avec incompréhension. Je ne compte pas m'arrêter de parler à Meï, elle n'a rien demandé dans tout ça.
« Tu crois sincèrement que tu es en position de force là ?, lui répliquai-je.
— C'est soit ça, soit rien ! Tu m'aimes, non ?
— Oui !
— Alors ne lui parles plus et j'arrêterai de te faire des crises de jalousies ou de possessivité comme tu veux ! »
Je reste interdit, ne sachant pas quoi lui répondre. Je suis entre deux personnes qui comptent pour moi mais pas de la même manière. Je me retrouve à devoir une énième fois faire un choix entre ma copine et mes amis.
« D'accord », capitulai-je.
A cet instant je me sens tellement lâche que j'espère que Meï comprendra ma position et saura me le pardonner un jour. Stacey me sourit et s'approche de moi afin de m'embrasser mais je finis par me rendre dans la cuisine pour boire. Je n'ai pas envie d'avoir un quelconque geste d'amour avec elle ce soir, pas après le chantage qu'elle vient de me faire.
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L'iris bleu
RomanceDepuis la mort de son compagnon, trois ans auparavant, Meï Sullivan ne se sent plus tout à fait la même. Tout est devenu plus difficile et compliqué. Ses relations avec la gente masculine sont au point mort et ceci semble lui convenir au grand dam d...
