Deux mois plus tard,
Point de vue Meï
Ne travaillant pas aujourd'hui et ne subissant pas les pluies diluviennes due à la mousson, je me détends dans ma chambre. Je m'entraîne à écrire en mandarin grâce à Chan et ce n'est en rien une partie de plaisir. Je ne sais pas comment ils font pour dessiner des signes plutôt que d'écrire en lettre comme nous. J'essaie de reproduire les mots de Chan plusieurs fois puis j'essaie de les différencier avec ceux que je connais déjà.
Vers 22h00, je me décide à appeler sur Skype Abrían. Je n'ai pas de ses nouvelles depuis que je suis partie et il n'y a rien d'étonnant là-dedans, je n'ai pas une minute à moi tellement bien que cela doit faire au moins trois semaines que je n'ai pas eu Daniela ou June au moins. Le décalage horaire n'aide pas non plus à ce que l'on reste régulièrement en contact.
Tandis que je suis partie dans mes pensées, je remarque une tête familière en face de moi.
« Salut Pichoncita, comment tu vas ?
— Ça va et toi ? »
S'il me répond oui, je le prendrais pour un menteur car il a les traits tirés et il fait une tête de trois mètres de long.
« Je vais bien. Juste un peu fatiguée par mes heures de gardes...
— Ah pourquoi ?
— J'ai augmenté les heures de mon contrat et même sans cela, les urgences sont toujours bondés...
— Tu veux que je te laisse pour que tu puisses te reposer ?, lui proposai-je.
— Tu plaisantes ? Ça fait deux mois que je n'ai pas de tes nouvelles !
— Comme tu veux !, lui souris-je.
— Alors la Chine ? »
C'est une très bonne question à laquelle je répondrais volontiers par géniale, magnifique et impressionnant.
« Je crois que j'ai trouvé notre Schweinbraten avec nos Knödel chinois », plaisantai-je.
Je le vois éclater de rire ce qui change de la mine déconfite qu'il avait au début. Je le préfère comme ça, d'ailleurs.
« Ah ouais ?
— Ouais je te ferais goûter quand je reviendrais !
— Qui te dit que j'accepterais de manger un truc que je ne suis pas sure d'aimer ?, rit-il.
— Personne mais je ne te donnerais pas le choix à vrai dire !
— Tu veux user de la force avec moi ? Tu sais que tu vas perdre !
— La force ? Pourquoi faire quand je peux user de mon intelligence et de ma persuasion ?
— Tu sais que tu dispose d'un melon à la place du cerveau ! », s'exclama-t-il en souriant.
Je réprime mon fou rire en faisant une mine faussement choqué. J'avais oublié durant ces quelques mois que plaisanter avec lui me faisait du bien. J'oublie souvent tout.
« Bon à part notre futur repas, la Chine s'est comment ?
— Franchement génial ! Bon je ne suis pas encore au point sur l'écriture mais pour le parler, je suis sur le point de devenir bilingue.
— Montre pour l'écriture ! »
Je lui montre mon bloc note et il réprime un sourire. Qu'est-ce qu'il va encore me sortir comme énormité ?
« Mouais ça n'a pas l'air d'être tout à fait ça quand même ! Pour une fille qui se dit intelligente, écrire des signes ne doit pas être très compliquée !
— Je t'emmerde ! »
Toutefois il a raison, j'ai encore des progrès à faire mais il n'avait pas besoin de me le faire remarquer.
« Bon sinon comment ça va à Saguenay ? Les filles vont bien ?
— Tout va bien ! June est toujours prises par ses compositions florales, Dani est toujours aussi amoureuse d'Andrew...
— Et Stacey ? »
Je suis surprise que ça ne soit pas la première personne dont il m'a fait mention. Après tout aux dernières nouvelles c'est sa copine donc il devrait penser à elle avant de penser à sa meilleure amie et à Dani.
« Elle va bien enfin je crois. En ce moment nous n'avons plus trop le temps de se voir avec mes gardes à l'hôpital »
Je fronce des sourcils avant d'acquiescer. Il me fait un léger sourire qui se veut plus forcé qu'autre chose. Je ne sais pas ce qu'il se passe là-bas mais il est certains qu'il me cache quelque chose.
« Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?
— Pour ?, demandai-je surprise.
— Pourquoi tu ne m'as pas dit oui quand je t'ai demandé si tu savais pourquoi elles avaient voulu te caser avec James ?
— Ah ça... Stacey t'en a parlé ? Tu sais ce n'est pas une mauvaise fille, elle avait juste peur de te perdre. Tu ne devrais pas lui en vouloir, la défendis-je.
— Non ce n'est pas Stacey mais June. Alors pourquoi tu n'as rien dit ?
— Parce que je n'aime pas être dans des histoires de bac à sable, me justifiai-je. Qu'est-ce qui se passe Abrían ? »
Le sujet Stacey semble être assez sensible étant donné son air renfrogné.
« Rien qui ne te regarde mais je voulais juste savoir pourquoi tu ne m'as rien dit...
— Excuse-moi mais visiblement ça me regarde vu que je suis concernée directement par ta question ! »
Sa froideur est vraiment blessante même pour moi qui ne suis pas si proche que ça de lui.
« Laisse tomber ! Je t'assure que ça ne vaut pas le coup que l'on se dispute à cause de Stacey.
— Qu'est-ce qu'elle t'a encore fait Abrían ?, m'inquiétai-je.
— Je t'ai dit « rien », Pichoncita ! »
Qu'est-ce qu'il est têtu quand il s'y met ! Je soupire avant de capituler, je crois qu'il préférerait que je lui change les idées.
« Tu sais que les plats ici sont très épicés, d'ailleurs je n'avais pas l'impression que c'était le cas quand je venais plus jeune...
— Peut-être que tes parents te faisaient manger des choses plus occidentales ?
— Oui peut-être !
— Et tu crois que c'est plus épicé que la cuisine indienne ou mexicaine ?
— Je ne sais pas ! J'ai jamais mangé les deux », lui souris-je.
Il acquiesce tandis qu'un silence se fait entre nous. Après encore quelques minutes de discussion, je finis par décrocher car demain je dois me réveiller de bonne heure afin de pouvoir m'occuper des enfants.
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L'iris bleu
RomanceDepuis la mort de son compagnon, trois ans auparavant, Meï Sullivan ne se sent plus tout à fait la même. Tout est devenu plus difficile et compliqué. Ses relations avec la gente masculine sont au point mort et ceci semble lui convenir au grand dam d...
