Chapitre 54

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Le 12 mars 2021,

Point de vue Abrían

Ce matin, je me réveille complètement à l'Ouest. J'ai de plus en plus de mal avec l'intensité due à mes gardes à l'hôpital, il va vraiment falloir que je baisse mes heures car sinon je vais finir par faire un burn out. Je pars dans ma cuisine où je me prépare un café bien fort afin de me réveiller. Je frotte mes yeux et manque de mettre du sel au lieu du sucre dans ma tasse.

Une fois mon café chaud, je m'assois sur la chaise et regarde quelques vidéos humoristiques sur mon ordinateur. Je grimace en le buvant, j'ai peut-être mis la dose un peu trop forte. Ne parvenant pas à me concentrer sur la vidéo, je décide de voir si Meï est connectée, voyant qu'elle l'est, je la joins. Elle me répond quelques secondes plus tard, elle ne semble pas plus fraîche que moi. A la seule différence c'est que pour elle il est temps de dormir tandis que moi je viens de me réveiller.

« Tu es de pire en pire », constata-t-elle.

Elle a toujours la phrase pour me mettre en valeur. Heureusement que je ne me vexe pas facilement ou que je ne suis pas très susceptible.

« Salut à toi aussi, Pichoncita !

— Je ne te demande pas comment tu vas, ton visage parle pour toi !

— Très drôle !

— Mais je n'ai pas envie de rire Abrían ! Tu m'avais dit que tu baisserais le régime ! »

Indignée, elle me toise longuement. Il est vrai que je lui avais dit que je baisserai le régime mais c'était plus pour la calmer et la rassurer que par réelle volonté de le faire.

« Oui c'est ce que je t'avais dit et je compte le faire, lui expliquai-je.

— C'est ça comme arrêter de fumer avec Stacey !, s'emporta-t-elle.

— Tu es vraiment en train de m'engueuler ?

— Fais ce que tu veux, meurs à la tâche si ça te fait plaisir ! Mais viens pas te plaindre !, vociféra-t-elle.

— Mais je ne me plains pas ! Je dis rien c'est toi qui me parle de ça !

— Bah justement je ne compte plus t'en parler ! Après tout comme tu te crois plus fort que tout le monde !

— Mais t'as pas bientôt fini de t'énerver toute seule ? »

Je réprime vraiment mon envie de rire. Si je ris, elle va s'énerver encore plus et je sais à quel point elle est mauvaise quand elle est en colère. Elle me dévisage avant de secouer la tête, visiblement abattue par mon entêtement.

« Je ne m'énerve pas...

— Ah oui excuse-moi tu exprimes ton désaccord et ton point de vue, dis-je sarcastique.

— C'est ça c'est ça fait le malin Abrían ! »

Elle est complètement blasée et ne cherche même plus à me rétorquer quoique ce soit. Je continue de boire mon café avant de lui sourire.

« Bon à part t'énerver contre moi, tu me racontes quoi ?

— Rien, me dit-elle froidement.

— Tu ne vas pas me faire la tête pour ça quand même ?

— Si parce que tu me l'avais promis. Et une promesse c'est une promesse ! »

Son air boudeur pourrait presque être mignon, si elle ne me fusillait pas du regard par la même occasion.

« Bon je te promets que la prochaine fois que l'on se parlera, je te dirai que j'ai baissé mes heures. Ça te va ?

— On verra », me dit-elle sèchement.

Sans le vouloir je me mets à rire devant son air boudeur.

« Pourquoi tu ris ?

— Parce que tu serais presque mignonne si tu ne me faisais pas ce regard de tueuse ! »

Elle pique un fard avant de regarder quelque chose sur sa droite. Elle est très mal à l'aise ce qui me fait arborer un léger rictus.

« Qu'est-ce que tu regardes ?, lui demandai-je.

— Rien j'étais en train d'écrire avant que tu ne me téléphones !

— En mandarin ?

— Oui, me dit-elle. J'ai d'ailleurs bien progresser ! »

Elle me montre son bloc note où est inscrit des signes qui me sont complètement méconnus. Son écriture semble plus nette que ce qu'elle avait pu me montrer dans le passé.

« Mouais... Tu trouves que tu as progressé ? Moi je trouve que c'est pareil que la dernière fois !, mentis-je.

— Tu es sérieux ? Tu ne peux pas dire ça, c'est nettement plus nette !

— Je plaisante, tu t'es améliorée visiblement sauf que je ne sais toujours pas ce que ça veut dire. »

Elle m'explique brièvement quelques signes avant de finalement déposer son bloc à côté d'elle. Si ça continue je vais finir par connaître quelques mots de chinois, du moins du dialecte de sa mère.

« Et au faite, je ne t'ai jamais demandé ce que voulait dire Pichoncita ?

— Tu n'as jamais poussé ta curiosité ? »

Elle hoche négativement la tête.

« Comme tu me l'as toujours dit d'une manière douce, je n'avais pas de raison de chercher absolument à savoir ce que ça voulait dire.

— Eh bien cherche par toi-même, la taquinai-je

— Mais je ne sais même pas comment cela s'écrit !

— Quelle tragédie ! Je suis désolé pour toi Meï, ris-je.

— Pas grave, toute façon ce n'est pas méchant !

— Effectivement ça n'a rien de méchant », la rassurai-je.

Je pensais que depuis le temps que je la surnomme comme ça, elle avait trouvé un moyen pour savoir ce qu'il signifiait mais visiblement je me suis trompé. Je finis de boire ma tasse de café.

« Tu fais une de ces grimaces !, s'exclama Meï

— Oui je me suis préparé un café fort mais un peu trop fort... J'étais tellement à l'ouest en me réveillant ce matin !

— Tu vois tu commences à te plaindre !

— Je ne me plains pas, je t'explique pourquoi je fais une grimace !, rectifiai-je.

— Non tu te plains ! », insista-t-elle en riant.

Je pousse un long soupir avant de secouer la tête de gauche à droite. Elle me fait signe que si.

« Bon d'accord je raccroche, lui dis-je sérieusement.

— Non ! », me lacha-t-elle précipitamment.

J'éclate de rire devant son air renfrogné. J'adore la menacer en lui disant que je vais raccrocher, à chaque fois elle me répond un non précipité et catégorique. En réalité, c'est plus un moyen de la faire enrager qu'autre chose. Discuter avec elle est tellement agréable que je pourrais facilement lui parler longtemps si nous n'avions pas douze heures de décalage horaire.

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