L'iris bleu

Chapitre 40

Le samedi 25 janvier 2020,

Point de vue Abrían

Assis sur le canapé, le portable dans les mains, je regarde des vidéos et consulte par la même occasion les réseaux sociaux. Je vois que Meï a posté de nouvelles photos de Fenghuang. Elle est au milieu des enfants de l'orphelinat, une jeune femme sur sa droite, certainement Chan lui fait des oreilles de lapin derrière elle.

« Tu fais quoi ? », me demanda Stacey en se blottissant dans mes bras.

Machinalement je la serre contre moi. Plus les mois passent et plus un fossé se creuse entre nous sans que je ne puisse faire grand chose pour que cela s'arrange.

« Rien », lui dis-je.

Je verrouille mon portable et le remets sur la table basse. Elle tente de m'embrasser mais je la repousse en lui prétextant qu'on allait finir par être en retard à la soirée de Daniela et Andrew. Un peu blessée, Stacey finit par acquiescer et par se chausser.

« Tu es de plus en plus distant avec moi...

— Ne dis pas n'importe quoi !

— Tu me repousses quand je veux t'embrasser, tu passes la majorité de ton temps au travail et je ne te parle même pas de ton manque d'entrain pour avoir des moments intimes », me reprocha-t-elle.

Je ne réponds rien et ferme la porte de mon appartement derrière nous. Je sais très bien que mon comportement n'arrange en rien la situation de notre couple, mais je n'arrive tout simplement plus à être proche d'elle autant affectueusement que sexuellement.

« Le travail me prend la tête et m'épuise, me justifiai-je.

— Il n'y a pas que ça et tu le sais ! Je me rends bien compte que ça te fait chier de ne plus parler à Meï...

— Putain mais lache moi avec elle ! », m'emportai-je en pleine rue.

Elle s'arrête alors que je me tourne vers elle, elle semble ahurie par mon ton.

« J'en ai marre de toi Stacey. Marre de ta jalousie. Marre de me prendre à partie par rapport à elle. Marre que tu me fasses du chantage affectif à chaque instant. Marre que tu me prennes la tête pour un oui ou un non dès que je m'entends bien avec une fille. Marre de tes gamineries d'adolescentes de 15 ans et surtout ton caractère est devenu un tue l'amour ! »

Je la fusille du regard tandis qu'elle a les yeux écarquillés. Elle secoue la tête pour ne pas pleurer. Je ne voulais pas la blesser mais là j'arrive à saturation.

« Je suis désolé, je ne voulais pas te blesser !

— Au moins les choses sont claires, je ne pensais pas être aussi invivable que ça ! Désolé si Meï ça a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Je ne pensais pas qu'elle était plus importante que moi !, rétorqua-t-elle sèchement.

— Putain arrête de te comparer à elle ! Vous n'êtes pas comparable !, soufflai-je.

— De mieux en mieux et elle est mieux que moi en quoi ?

— Ce n'est pas ce que j'ai dit ! J'ai dit qu'elle était différente de toi !

— En quoi !?, vociféra Stacey.

— Déjà elle ne me prend pas le chou à la moindre occasion ! Ensuite si tu veux tout savoir de vous deux, c'est toi la plus gamine.

— Qu'est-ce que tu fais avec moi alors si je suis invivable et gamine ?

— Je ne sais plus Stacey. Je ne sais plus. Tu m'épuises et tu me fatigues avec tes crises de jalousies. J'ai l'impression que je pourrais te montrer pleins de fois mon attachement à toi que ça ne suffira toujours pas... Je suis fatigué et je me lasse de cette situation où ni toi, ni moi ne sommes heureux...

— Je rêve où tu es en train de me quitter là ?

— Non je ne te quitte pas mais je veux simplement que tu comprennes que ce n'est plus vivable pour moi. J'ai de plus en plus de mal à être proche de toi parce que je redoute le moment où tu vas encore me faire du chantage affectif.

— Tu veux que l'on fasse une pause ?, me demanda-t-elle.

— Je ne sais pas. Je suis perdu. »

Un silence se fait entre nous, seule la circulation routière trahit ce silence de mort. Elle me regarde sans savoir quoi répondre.

« Je suis désolé Stacey mais j'ai besoin d'être seul alors oui je crois que j'ai besoin d'un break...

— Combien ?

— Aucune idée, soupirai-je.

— Je crois qu'il vaut mieux que l'on se quitte alors... Je ne veux pas t'attendre indéfiniment surtout si tu ne reviens pas vers moi.

— Comme tu veux...

— Donc on se quitte là, en plein milieu du trottoir ?, pleura-t-elle.

— Écoute c'est toi qui veut me quitter, moi j'ai juste demandé une pause. Est-ce qu'il serait possible juste une fois dans ta vie de faire quelque chose pour moi ? Juste une fois ? »

Elle semble prise de court par mes propos. Elle finit par acquiescer et me dit qu'elle préférerait rentrer chez elle plutôt que d'aller à la soirée. Je peux comprendre je viens de lui demander un break, elle pense plus à pleurer qu'à faire la fête à l'heure actuelle. Pour ma part, j'ai plutôt besoin et envie d'être avec mes amis.

Quand j'arrive chez Daniela, tout le monde est surpris de me voir sans Stacey. Je prends alors la décision de jouer carte sur table avec eux et de leur avouer que nous avions d'un commun accord décidé de faire une pause dans notre couple.

« Je crois que tu as bien fait... Tu es de plus en plus perdu, me dit June en souriant.

— Je ne sais pas. Je ne voulais pas la faire pleurer non plus. »

Andrew me donne une bière avant de me tapoter l'épaule. Pourquoi tout le monde semble si content que je ne sois plus avec Stacey pour le moment ? Pourquoi sont-ils si peu compatissant avec elle ?

« Tu as besoin de te retrouver...

— Je devrais partir au Mexique comme Meï en Chine », tentai-je de dire pour détendre l'atmosphère.

Je remarque qu'ils se regardent tous avant de finalement me sourire.

« Quoi ?

— Rien je crois que l'on a pas finit d'être surpris par toi et Meï », rit Daniela.

Je la fixe sans comprendre où elle voulait en venir. Andrew la prend par les épaules et lui embrasse la tempe. Il devrait apprendre à la lâcher avant qu'il ne finisse par se transformer en guimauve. Je réprime un rictus.

« Je vais aller fumer !

— Je viens avec toi ! », s'exclama Daniela.

Je fais une moue septique. Je crois que c'est la première fois qu'elle vient dehors avec moi, je regarde Andrew qui hausse des épaules. Visiblement, il ne sait pas plus que moi ce qui pousse Dani a vouloir me parler.