C'était la période de confrontation, période qui fit apparaître que l'orgueil est un défaut de grandes personnes. Les parents ayant, tous en même temps et chacun de son côté, découvert qu'ils bénéficiaient de la compagnie d'un enfant intelligent, durent mettre de l'eau dans leur vin pour dire d'une seule voix :
« Nos enfants sont intelligents » ;
« Les enfants de maintenant sont intelligents ».
Comment ça se faisait, qu'on était si intelligents ?
Était-ce le progrès qui voulait ça ? Le cerveau humain évoluait-il en même temps que les avancées de la science ? Nos grands-parents étaient incapables de faire marcher un électrophone... entre autre. Au fur et à mesure que le modernisme grandissait, l'individu naissant devait apprendre à s'adapter à un monde plus intelligent.
Une autre hypothèse consistait à mettre l'épanouissement de l'intelligence sur le compte d'une éducation libérale : un enfant argumente dans la mesure où on respecte sa liberté d'expression. Si l'enfant ne peut pas dire ce qu'il pense de peur d'être frappé, son intellect se recroqueville sur lui-même ; ça donne un être troublé. S'il est effectivement frappé, c'est encore pire car la douleur provoque un étourdissement qui l'empêche de raisonner correctement ; ça donne un être borné. S'il reçoit des coups sur la tête ou le visage, ça provoque des dysfonctionnements cérébraux pouvant aller jusqu'à des lésions irréversibles ; ça donne un abruti.
Cela ayant été scientifiquement prouvé, les cruels châtiments corporels que nos parents avaient abondamment reçus à l'école étaient désormais interdits.
Il existait encore une autre hypothèse, que les parents oubliaient tout le temps de mentionner : celle selon laquelle nous ne devions notre intelligence qu'à nous-mêmes, à l'exercice de la réflexion à laquelle nous la soumettions toujours ; hypothèse d'autant plus plausible que cette intelligence ne se manifestait jamais là où ils auraient voulu mais toujours là où ça les arrangeait le moins.
De fait, à l'âge de dix ans, nous étions capables, en bien des circonstances, de tenir tête à nos parents et, même, de trouver le dernier mot.
C'est une lourde responsabilité. Pour ça, nous n'étions pas fâchés de trouver chez nos semblables une intelligence égale à la nôtre. Gérer seul une telle situation aurait été impossible.
En outre, une intelligence isolée tourne à vide. Elle éprouve un impérieux besoin de dualité ; elle se nourrit de discussion. Tandis que nos chers parents échangeaient leurs photos de vacances et leurs recettes de cuisine, nous échangions nos observations et nos questionnements. Tandis que nos braves parents se plaisaient à faire la course dans des sacs de pommes de terre, nous analysions les paroles de nos chansons préférées.
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DATE ET LIEU DE NAISSANCE
Non-FictionPremière partie de : SEX AND DESTROY Un nouveau son rock ?