II 8 - Le grimoire sacré

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À l'âge de neuf ans, un jour, j'en vins à parler de viol avec ma mère. Ce n'était pas du tout son genre de parler de choses comme ça et je croyais qu'elle allait me rabrouer.

À la place, elle me dit d'un ton tranquille :

« Parle ! Je t'écoute. »

Elle me laissa vider mon sac, comme si de rien n'était mais dès que tout eut été dit, elle évoqua la Bible.

C'était inattendu et surprenant. Ça me faisait penser aux gens des campagnes qui, autrefois, faisaient leur signe de croix à tout bout de champ, par superstition, pour éloigner le mauvais sort (comme dans les films, à la télé).

De même, on eût dit que ma mère avait sorti la Bible (de sa bouche) pour purifier son appartement et tout ce qui avait été souillé par la notion de viol.

« Oui, c'est exactement ça »

précisa ma mère.

Je trouvais ça parfaitement grotesque et protestai :

« En plus, tu avais dit que ce sont les paroles des grandes personnes qui sont moches, que moi, j'avais le droit de dire mes pensées de petite fille. Tu me laisses parler et, après, tu mets la Bible entre nous comme si j'avais dit quelque chose de moche !

- Je ne te reproche rien, répondit ma mère. J'éprouve seulement le besoin de me référer à la Bible. Pourquoi émets-tu cette réticence ? Ça te gêne ?

- Non. Je dis pas que je veux pas. Je trouve ça bizarre, c'est tout... »

Cela me paraissait d'autant plus étrange que j'avais l'impression que le livre de la Bible avait été matériellement posé au milieu de nous, alors que ma mère en avait seulement mentionné le nom. On aurait dit de la magie. De la même façon, j'eus l'impression que ma mère ouvrît le livre au hasard quand elle parla spontanément de... mon rêve du roi Hérode.

« Qui t'a dit que j'avais rêvé du roi Hérode ?

- Toi. »

DATE ET LIEU DE NAISSANCEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant