VII 8 - Invisible

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- Alors que moi, chuis mignonne ! Je m'efforce de rêver que chuis belle, que j'souris... je chante, même, pour appeler mon amoureux et ça fait venir le monstre à chaque fois. C'est pas juste !

- Tu devrais peut-être changer de stratégie : te concentrer un peu moins sur ta propre apparence et un peu plus sur celui que tu as envie de rencontrer.

- Ah, ouais ! Tu veux dire que j'attire le mal sur moi parce que je pense trop à moi-même et pas assez à Camille ?

- Ça peut être une interprétation. Non, moi, c'que je voulais dire, c'est que si tu mets tes attraits en avant, on a vu que ça attire aussi bien celui que tu veux voir et celui que tu ne veux pas voir. Tu ramasses tout ce qui traîne ; tu ne choisis pas. Alors, concentre-toi sur celui que tu veux voir pour essayer de le mettre en avant de ton rêve !... »

Le lendemain soir, à la fin du repas, quand il fut question d'aller au lit, j'annonçai fièrement à la tablée :

« Ce soir, j'dors dans ma chambre »

comme un soldat paré au combat.

C'est ma mère qui fut étonnée : moi qui faisais toujours des comédies pour ne pas aller dormir dans le lit qui était dans ma chambre, d'habitude.

Le rêve de Camille ne revint peut-être pas dès le premier soir. Un rêve, c'est comme une prière au bon Dieu : on n'exige pas, on demande et on attend. Quand, finalement, il revint, je ne parvins pas tout de suite à y apporter de modifications notables. Les images se succédant toujours pareil, il me fallut un gros effort de concentration pour secouer les habitudes.

Bof ! Peut-être pas si gros que ça, tout compte fait. Se rendre invisible, transparente, c'est beaucoup plus facile dans un rêve que dans la réalité.

Je rêvai que j'étais dans la cour de l'école des garçons mais personne ne me voyait ; personne ne savait que j'étais là. Je marchais au milieu des garçons. Tous avaient pour moi des visages anonymes : aucun n'était mon amoureux. Alors, je marchais et marchais encore, à la recherche de celui qui aurait été mon amoureux...

En fin de compte, j'étais revenue au commencement de mon rêve et je n'en décollais plus. Pourtant, c'était Nani qui m'avait dit !

À force de faire semblant de ne pas exister, j'avais perdu mon amoureux. Il semblait qu'il n'y en eût plus qui habitât mes rêves.

Inquiète, je fis réapparaître le bout de mon nez... et fis chanter ma voix. Aussitôt, je le vis sortir de... (sa classe ?) et venir vers moi d'un pas décidé. Oh ! non... je me réveillai... je venais de faire un cauchemar. 

DATE ET LIEU DE NAISSANCEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant