X 14 - L'obscurité du boudoir

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Qu'allait-il donc se passer après déjeuner ? Caki et Nani allaient-ils, finalement, écouter leur bon cœur et m'emmener faire une promenade en vélo ? Ou bien le désir de bien s'amuser allait-il les pousser sur la place Firmin Mercier ? Ils n'allaient tout de même pas gâcher une pleine journée de vacances à bouder !

À quatorze heures très précises, la cloche du portail sonna.

« Tiens ! Qui c'est ça ? »

demanda Maman.

Elle sortit dans le jardin et revint en annonçant :

« C'est Françoise . »

Mon cœur fit un bond dans ma poitrine.

« J'peux aller jouer ? »

En ayant reçu la permission, je me dirigeai vers la sortie aussi vite que je pus, retardée que j'étais par des petits sauts de joie que mes jambes faisaient à mon insu ; jusqu'à ce que, passant devant la porte du salon, je perçus intérieurement que mon attention y était appelée.

Oui. Quoi ?

Le salon était plongé dans l'obscurité parce que Maman en avait fermé les volets pour protéger des rayons du soleil. Caki et Nani y étaient installés en silence, l'un bouquinant et l'autre faisant des mots croisés. Visiblement, ils s'ennuyaient comme des rats morts.

En regard de la chaleur extérieure d'où j'étais invitée à jouer, la froideur émanant du salon m'inspirait du remord. J'aurais tant aimé être encouragée par un sourire de mon grand frère et ma grande sœur, un petit signe quelconque témoignant qu'ils me reconnaissaient le droit de sortir m'amuser entre amis, comme ils faisaient eux-mêmes, à longueur d'année, à Courbevoie. Mais non, rien. Au mieux, ma sœur leva brièvement les yeux vers moi et j'entendis son avertissement dans mon cœur :

« Les vacances, ça devrait être pour tout le monde . »

Que faire ?

« Eh ben, dépêche-toi ! Elle t'attend, ta copine. »

me rappela Maman.

Je repris ma course vers la sortie mais, cette fois, en prenant soin d'avoir une démarche bien horizontale, c'est-à-dire sans faire des petits sauts de joie qui auraient pu faire croire à Caki et Nani que je voulais les narguer.

Les vacances, ça devrait être pour tout le monde. Résoudrai-je cette énigme, moi qui ne suis que la petite sœur ? Après tout, je ne suis plus si petite... 

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