Un tremblement me soustrait à ma rêverie. J'ai dû dormir un quart d'heure tout au plus mais ça m'a plus reposée qu'une nuit entière de sommeil. Des bras me posent délicatement sur le sol. Je mets quelques secondes à revenir à la réalité.
La voie lactée nous chapeaute toujours de ses millions d'étoiles scintillantes. Quand je regarde Morgan, je suis surprise de découvrir pour la première fois que ses joues sont rouges, et non de colère.
- On devrait rentrer, propose-t-il.
- Oui.
Tout cela peut ressembler à une fin assez cassante après notre échange si révélateur mais même dans des phrases si petites nous savons que c'est ce qu'il nous faut. Nous avons besoin de banalité pour avoir un semblant de tranquillité après la mort de ma mère, la disparition de mon frère, la révélation de Morgan et les actions du Dirigeant.
Je me lève précédée par Morgan puis nous regagnons l'auberge d'un pas lent pour faire durer ce silence si agréable.
Une fois les marches montées, la porte s'ouvre et Rebekah apparaît, agacée comme le serait une mère attendant ses enfants, ayant dépassé un couvre-feu imposé. Elle me fait rire ainsi que mon ami. Je crois que je peux le considérer comme. Je lui fais pleinement confiance maintenant. J'attendais ça avant de me lier d'amitié avec lui.
Rebekah finit pas nous rejoindre avec son rire cristallin et nous nous installons sur mon lit toujours prit d'un fou rire commun. J'en pleure et j'accueille ses larmes avec adoration, celles-ci sont mes préférés, elles ne témoignent pas de mon malheur mais de son contraire, le bonheur.
Malheureusement il faut mettre fin à cette intermède pour parler de choses plus sérieuses.
- Il faut qu'on parte, annoncé-je.
- Oui, mais parlons en demain, on est tous fatigués, répond la rouquine.
Nous ne nous opposons pas et je me retrouve debout devant le miroir de la minuscule salle de bains. Mes cheveux blonds ainsi coupés me donnent meilleur mine que je ne l'ai. Je décide d'effectuer un dernier lavage en profondeur, qui sait quand nous aurons encore la possibilité de prendre ne serait-ce qu'une douche?
Le savon forme des petites bulles parfumées sur ma peau bronzée par des jours de marches au soleil. Dans ces moments-là, je ne pense plus à rien mais une fois sortie, tout revient. En me séchant, je remarque le fil qui lie ma peau tuméfiée, une croute noire s'est formée, j'ai dû forcer un peu ces jours-ci mais quand tout aura cicatrisé, je pourrai enfin enlever ces points de suture qui me tiraillent.
J'enfile ensuite un haut et un pantalon informe, j'ai pris goût à ce nouveau vêtement très pratique.
Il faut retrouver les filles avant qu'elles n'aient plus de pouvoirs comme Rebekah. D'ailleurs en parlant de leur capacité, je n'ai jamais vraiment su ce qu'elles faisaient réellement. J'ai seulement observé quelques exercices, insuffisants pour révéler l'ampleur de leur talent.
Voilà une question qu'il faudra ressortir le lendemain. Mais pour l'instant, je m'effondre sur mon lit en envoyant des «bonne nuit» à la cantonade. Des chapes de plombs. Mes paupières sont des chapes de plombs et elles se ferment d'un coup, laissant place à un sommeil sans rêve.
Je suis réveillée la première et prépare déjà nos sacs pour partir. Une excitation que je n'ai jamais ressentie m'étreint. Je pense que si nous partons maintenant on arrivera dans quelques jours au Manoir. Je suis certaine qu'il est là-bas, Morgan ne m'a pas mentit même s'il a recueillit cette information d'un façon qui ne m'a pas plus.
Je finis de remplir ma sacoche et descend voir notre hôte. Jean se tient devant son comptoir même si tôt le matin.
- Bonjour, commencé-je, un peu hésitante.
- Salut ma p'tite ! Comment ça va ?
- Bien. Je voulais vous parler de la chambre.
- Qu'est ce qu'il y a ? Vous avez vu des rats ? Ne me dites pas que ces vermines sont revenus à la charge sinon...
Je le coupe dans son élan. Si je ne l'avais pas fait, il allait continuer à parler pendant des heures.
- Non, non, ce n'est pas ça ! Tout c'est bien passé c'est juste que je pense qu'on a assez profité de votre hospitalité. Je suis venue pour régler la chambre.
- Non, garde ton argent ma p'tite. Je vois bien que tu n'es pas très en forme et tes amis aussi. Je ne veux pas que tu payes pour un tel placard à balais. Tiens je te rends même l'acompte de ton copain.
Il cherche sous le comptoir et en prélève une petite bourse fermée d'un nœud rouge. Le tintement des pièces me révèle l'importance de son geste.
- Monsieur, non, je tiens à vous payer. Je ne veux pas tirer profit de votre gentilesse.
- Tu m'as déjà payer sans t'en rendre compte. Quand tu es arrivée, tu ressemblais à un animal malade et ton changement en quelques jours me suffit amplement. Je n'ai pas besoin de plus à part d'une promesse.
- Laquelle ?
- Ne lâches rien et crois en toi.
Entre temps, il s'est accroupis face à moi pour être à ma hauteur et me regarde dans les yeux en déposant le sac de pièce dans mes mains.
- Tiens, tu en as plus besoin que moi de toutes façons. Je te souhaite une bonne route.
Il recule et disparaît derrière une porte adjacente au comptoir. Avant de partir, il me lance :
- Au fait très jolie coupe ma p'tite. Ça te vas bien !
Ce sont ces derniers mots après il ne revient pas.
Il y a peu de personnes aussi altruiste dans ce monde, je ne suis même pas offensée par son geste, je n'aime pas la charité habituellement mais aujourd'hui c'est différent. Je remonte les marches, le cœur délesté d'un poids. Jean est vraiment un homme en or et je le remercie intérieurement.
Je franchis le seuil de notre chambre et rencontre un torse. Levant les yeux plus haut, je distingue ceux de mon professeur. Je souris et lui me montre une mine surprise.
- Où tu étais ?
- Je suis allée régler la chambre.
- Comment ?
- Je me suis arrangée, dis-je d'un ton mystérieux qui me fait encore plus sourire.
- Tu peux m'expliquer ?
- Non.
Il n'a pas besoin de savoir. Le moment que j'ai passé avec Jean n'apporte et n'enlève rien. Ce qui s'est passé profite à notre bourse et c'est tout ce qu'il faut retenir. J'ai envie de garder cet instant et l'affection de Jean seulement pour moi. Il me fait penser à un oncle que je n'ai jamais eu et qui m'aurait sûrement donner des bonbons à chaque visite dans sa petite chaumière s'il avait été membre de ma famille.
Morgan me laisse tranquille et finit de préparer son sac. Rebekah revoit les contenus des sacoches quand je m'approche :
- Ne t'inquiètes pas, j'ai déjà vérifié.
Elle acquiesce mais continue son inventaire. Je ne me fâche même pas. Avant ça m'aurait énervée mais maintenant j'ai d'autres problèmes, je ne dois pas m'arrêter sur ça. Mon frère, je sais qu'il m'attend quelque part et je viens le chercher.
- Il faudrait penser à prendre une carte, proposais-je.
- Non, j'ai tout là-dedans, me répond Morgan en désignant son front.
Je voudrai savoir comment il fait pour tout retenir et d'où il tire ses informations mais je ne pose pas la question car je lui fais confiance.
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L'Élémentaire {En Réécriture}
FantasíaQui a dit qu'une vie banale le resterait forcément ? Coincée au cœur d'un monde tyrannique, Katelynn ne rêve que d'une chose : la liberté. Alors qu'elle doit à tout prix se trouver un partenaire avant son dix-septième anniversaire, elle fait une r...