Chapitre Soixante et onze

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Tout est fini, enfin tout est sensé être fini.

Je marche, et cette fois-ci aucune douleur ne se fait ressentir. Le calme m'assaille de toutes parts comme si une douce euphorie était en train de me bombarder avec ses obus de bonheur. Et j'aime ça.

C'est à la fois si surprenant et prévisible. Je savais que la fin de cette aventure allait m'apporter une satisfaction sans faille, mais cette sensation qui tapisse maintenant mon esprit n'est comparable à rien de ce que j'ai pu ressentir jusqu'à présent.

C'est juste indescriptible...

Mes yeux encore un peu perdus se posent sur l'assemblée face à nous et parcourent chacun des visages à ma portée. Des centaines de personnes et même peut-être plus, que sais-je, nous fixent sans bruit. Avant, autant d'attention m'aurait déstabilisée, aujourd'hui aucune n'est là pour me troubler et m'offre seulement un sentiment de fierté grandissant.

J'identifie peu à peu chaque silhouette, là ne serait-ce pas le jeune garde qui nous a salué lorsqu'on s'enfuyait avec le chariot de linge sale ? Et cette femme avec son visage creusé et ses grands yeux noirs, n'est-ce pas celle qui était coincée derrière les barreaux il y a quelques heures ?

J'aperçois aussi mon frère, soutenu par... mon... père. C'est si étrange de sentir un tel mot traverser mes pensées. Bientôt il dévalera la cascade de mes cordes vocales pour enfin sortir de ma bouche et se faire entendre par tous.

Les filles sont toutes là, formant une ligne de bras emmêlés et de visages fatigués. Cassiopée, Cassandre, Alice et Rebekah me regardent toutes avec de grands yeux étincelants d'une joie contenue.

Les cheveux châtains auparavant lisses de Cassiopée ne sont plus qu'un entrelacs bruns de nœuds, sa frange plus longue que d'accoutumée lui arrive sous les sourcils et commence à entacher sur ses beaux iris azur. Une balafre lui couvre le bras gauche et quelques coupures descendent le long de ses jambes où son pantalon déchiré révèle sa maigreur.

Les yeux verts clairs de Cassandre me suivent, sa belle chevelure brune n'est plus qu'un souvenir, un côté rasé laisse apparaître le début d'une longue cicatrice sur le crâne. Ses vêtements et son état se retrouvent aussi lamentables que celui des autres. Alice qui portait toujours un petit pansement sur le nez, ne l'a maintenant plus et laisse apercevoir deux blessures distinctes, l'une plus vieille descendant sur l'aile gauche de son nez, l'autre plus récente, recouverte d'une croûte presque noire, entache sur le cartilage restant.

Des trois, c'est elle qui a le plus de mal à se tenir debout, sûrement dû au mal que doit cacher l'énorme morceau de tissu qui lui bande la jambe droite.

Rebekah, elle, n'a pas changé depuis que je l'ai quitté quelques heures plutôt et j'en ressens un soulagement immense. Ses cheveux auburn auréolés par les rayons du soleil levant et son regard décidé sont les même. Mon esprit se noircit à la vue de mes trois autres amies qui ont certainement vécu le pire pendant mon absence. En les regardant, je remarque parfaitement le mal que je leur ai fait. Je sais que sans moi, elles auraient pu continuer une existence tranquille loin des drames que nous avons tous traversé. Je pourrais me réinventer une vie et changer le monde avec tellement de "si" !

Si je n'avais pas rejoint le Sous-Noyau, ou si je n'avais pas emporté tout le monde dans cette mission irréalisable, si je... Penser à tout ça est une perte de temps. Ces conditions utopiques engendrées par ces multiples "si" ne changeront rien, les regrets encore moins. Alors pourquoi y penser maintenant ? Je voudrai me sortir tout ça de la tête et enfin me concentrer sur notre réussite mais je n'y parviens pas encore. Mes démons m'en veulent toujours et le seul remède sera une patience à toute épreuve et du temps... Énormément de temps...

L'Élémentaire {En Réécriture}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant