La Belle et le Djîhādîste

14.

Oui. Cet homme est bien mon père. MON PÈRE ! Vous vous rendez compte ? Celui que j'ai attendu pendant toute mon enfance et adolescence est LÀ ! Devant moi !

Je suis heureux de le voir mais je suis aussi en colère. Il m'a abandonné ! Lui, qui m'était plus cher que le monde ! J'aurais tué pour ses yeux, c'est lui à qui je dois ma vie. Quand ma mère était sévère contre moi, il était l'ami sur qui je pouvais compter. Il était un père mais aussi un frère.

Il m'a abandonné pendant toutes ces années. Il est arrivé en retard. Il est venu au moment où mon coeur ne peut plus donner d'amour. Il est venu au moment où je ne suis plus comme il m'a laissé.

- Oğlum ! (Mon fils). Me dit-il les larmes aux yeux.

Il s'approche de moi et me regarde dans les yeux. Je regarde autour de moi et je vois mes hommes en train de nous regarder.

- Sortez. Ne laissez personne venir. Dites leur que je suis occupé. Leur dis-je.

Ils hochent la tête et sortent directement. Par Allah je ne sais pas comment réagir... Si seulement j'étais encore un gamin. Je lui aurais sauté dans les bras.

- Qu'est-ce que t'es devenu mon fils... Dit-il tristement.

- Ni médecin, ni ingénieur, ni avocat. Je ne suis pas devenu quelqu'un qui rendrait fier ses parents. Je suis devenu ce que tu vois devant toi, Allah seul m'a aidé. Aujourd'hui, je suis dévoué à Sa cause. Aujourd'hui, je me bats dans le sentier d'Allah. Lui dis-je fermement.

- Ce n'est pas ça ! Tu as faux... ce n'est pas ce qu'Allah attend de toi. Allah veut que nous soyons de bonnes personnes, qu'on soit une miséricorde pour les hommes, Allah nous veut doux et non pas violent. Il veut qu'on soit juste, Il ne veut pas que l'on règne avec la terreur et la haine. Me dit-il.

- Et qu'est-ce que t'en sais ? Hein ? Tu parles de tout ça, comme si tu savais la vraie voie mais toi, tu n'es pas mieux. Tu m'as abandonné avec ma mère et ma soeur. Tu crois qu'Allah est heureux de ça ? Lui dis-je en fronçant les sourcils.

- Je ne vous ai pas abandonnés... mon passé m'a rattrapé. J'avais des dettes et j'avais tué un homme alors que j'avais ton âge. Ils m'ont kidnappés et battus pour ça. Je n'allais jamais vous - dit-il.

- Non, ne ments pas. Dis-je d'un ton dur, elle était bien ta nouvelle femme d'ailleurs ? Meilleure que maman, je suppose.

- Arrête ça, Emin... Je suis là. Je n'ai jamais voulu vous abandonner. Me dit-il en soupirant.

Je soupire et part regarder par la fenêtre. La haine me contrôle et je la laisse parler à ma place. C'est une grande erreur mais mieux vaut ça, que de croire n'importe quoi et finir par devenir un mécréant faible d'esprit.

- Mon fils, tu n'es pas comme ça... Tu n'es pas comme eux. Retourne avec moi. Me supplie-t-il.