Je monte dans ce vieux bâtiment, je n'aurais jamais cru revenir ici. Je reste devant la porte pendant plusieurs secondes. Je viens de faire trembler une ville entière, un pays entier et j'ai peur de frapper sur une porte ?
- Bon... euh, je monte sur le toit vite fait. Tu m'appelles quand t'as finis. Me dit Ibrahim.
Je hoche la tête puis soupire avant de frapper contre cette porte. La dernière fois que j'étais venu ici, c'était pour demander sa main... la porte s'ouvre lentement.
Je reste comme un idiot sans rien dire, je ne sais pas quoi faire. Puis, je vois ses yeux se remplir de larmes. Elle lève ses mains tremblantes vers mon visage puis les pose sur ma barbe et caresse mes joues avec ses pouces.
Je pose mes mains sur les siennes tout en gardant le regard fixe sur ses yeux. Je retire lentement ses mains.
- Emin... dit-elle doucement.
- Je... Ahlam... ça fait tellement longtemps. Lui dis-je.
Elle me sourit timidement avant de me faire rentrer.
- T'as du sang, Emin. Tu t'es blessé ? Me demande-t-elle.
Je secoue ma tête de droite à gauche. Je regarde Ahlam encore une fois mais je vois à la place Syhem. Je me frotte les yeux et secoue ma tête.
- Tu peux nous héberger ce soir, Ahlam ? Lui demandais-je.
- Oui, oui, bien-sûr ! Mais pourquoi "nous" ? Dit-elle en fronçant les sourcils.
- J'ai mon ami, Ibrahim. Il arrive. Lui dis-je.
Elle hoche la tête comme si elle était déçu.
- Tu sais Emin, je ne t'ai jamais oubliée. Je t'aime toujours. Dit-elle en baissant sa tête.
- Et moi, j'en aime une autre. Lui dis-je d'un ton sec.
Elle s'approche rapidement de moi et mets ses mains sur mes joues tout en me regardant dans les yeux.
- Mais tu ne l'aimes pas comme tu m'as aimé et elle ne t'aime pas comme je t'aime... aşkım... dit-elle les larmes aux yeux.
- Je vais aller chercher mon ami. Lui dis-je en sortant.
Je monte sur le toit et trouve Ibrahim, je lui demande de venir et je lui explique qu'on restera ici. J'entre dans l'appartement suivie d'Ibrahim. Ahlam nous demande de rester au salon pendant qu'elle nous prépare du thé. Elle revient quelques minutes plus tard.
- Je t'ai fais du café turc, je sais que tu aimes ça. Dit-elle en souriant.
Je hoche la tête en soupirant. Elle s'assoit en face de nous puis nous regarde à tour de rôle.
- Je sais pourquoi vous êtes là... c'est vous qui avez fait ça ? Nous demande-t-elle en pointant la télé.
Ibrahim sort un couteau directement.
- Calme toi Ibrahim, elle ne dira rien. Lui dis-je.
- Oui, ne t'inquiète pas. Emin a raison, je ne dirais rien. Nous rassure-t-elle.
Plus personne ne parle, elle se lève et nous montre notre chambre. Il y a deux lits. On se change et ensuite on s'endort enfin... il me tarde de rentrer, j'ai envie de revoir ma petite Syhem.
SYHEM
Je regarde par la fenêtre en attendant une nouvelle. Qui est mort ? Qui est en vie ? J'ai tellement peur. Tellement.
Je baisse la tête et regarde mon ventre. Dans six mois. Dans six mois, je vais avoir mes premiers enfants. Mais... un enfant... dans ces conditions ?
Ils n'auront pas l'éducation d'un enfant normal, ils n'iront pas à l'école pour apprendre à jouer et à apprendre à lire et à écrire mais plutôt à haïr et tirer.
Je caresse mon ventre et je me rends compte de mon erreur. Je ne veux pas qu'ils naissent. Je ne veux pas que mes bébés naissent, non... Je ne veux pas.
Ils deviendront eux aussi, des terroristes... ça, je ne veux pas. Non ! Shehab veut qu'ils soient ses héritiers, moi, je veux juste le bonheur de mes futurs petits.
Au fond, j'ai plus l'impression que Shehab pense comme eux que ce qu'il m'avait dit au tout début. Il n'est pas différent... il veut juste de bons héritiers.
- Je n'aurais jamais dû naitre... chuchotais-je en regardant et caressant mon ventre, je suis la pire des mères. Pas vrai ? Ils vous ont déjà préparés votre place auprès d'eux avant même que vous soyez là. Je ne veux pas que vous soyez comme eux... ils sont mauvais, méchants, ils ne méritent rien de bien. Ne décevez pas maman, hein ?
Ma voix se brise et je continue mon monologue. Quelques minutes plus tard, Shehab rentre. Il n'a pas l'air de bonne humeur. Il s'approche de moi et me prend dans ses bras. Il me sert fort et pour la première fois... Pour la première fois, je l'entends pleurer !
- Il est partit. Dit-il.
Je me détache de lui et le regarde en fronçant les sourcils. Qui ?
- Mon frère est mort, Syhem ! Tu t'en rends compte ? Me dit-il tristement.
Je ne réponds pas. Il pleure la mort de son frère mais je ne sais pas qui c'est.
- Syhem... tu crois que j'aurais dû partir en France ? Me demande-t-il.
- Pourquoi ? Lui demandais-je.
- Je le savais... j'aurais dû ! J'aurais dû partir et mourir à sa place ! C'est à cause de toi... oui, c'est ça ! C'est à cause de toi et de tes fils ! Dit-il en tenant fermement mon bras.
- Et tu sais pourquoi ? Parce que j'ai été trop gentil avec toi. Combien de fois j'ai mentis pour te rassurer ? Je suis comme eux, je pense comme eux et ce n'est pas par amour que je t'ai gardé mais je sais que tu portera mes héritiers. Me dit-il, à cause de toi, je me suis battu avec mon frère et je l'ai laissé partir vers la mort sans l'aider. C'EST A CAUSE DE TOI PETITE PROSTITUEE !
Il lève son poing, prêt à me frapper mais s'arrête en regardant mon ventre. Il respire fortement.
- T'as de la chance que je ne peux pas te faire de mal... tu devrais remercier mes héritiers... dit-il fou de rage, mais...
Il me regarde avec un petit sourire en coin. Il me prend par le bras et m'emmène vers la chambre.
- Non non non, Shehab ! Je t'en supplie, ne fais pas ça ! Dis-je les larmes aux yeux.
Il ne m'écoute pas. Il continue à nous avancer puis il s'arrête devant la porte.
- Ecoute moi bien, tu vas m'obéir à tout, y compris mes plaisirs. D'accord ? Me dit-il d'un ton menaçant.
J'ai peur. J'ai peur de ce qu'il va me faire. Mes larmes commencent à couler de mes yeux sans s'arrêter.
- Je t'en supplie, Shehab. Ne fais pas ça ! Ne fais pas comme Yezid ! Je t'en supplie... Lui dis-je en pleurant.
Il ne m'écoute pas, il commence à soulever ma abaya. Et c'est comme ça que se ferme la porte sur nous, une femme effrayée avec un homme qui prend plaisir à lui faire du mal. Une femme qui devra subir encore une fois, le comportement fou d'un homme mais cette fois, le père de ses enfants...
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La Belle et le Djîhādîste
Teen FictionAlors que la guerre éclate en mars 2011, des milliers de civils se font tuer. En 2014, le groupe terroriste, Daesh, prennent Raqqa. Ils étaient vus dans la ville comme «héros» à leur entrée. Ils étaient doux avec les enfants, ils leur offraient des...