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Plusieurs années sont passés. Énormément de choses ont changés, le président syrien a lâché la Syrie et bientôt aura lieu de nouvelles élections. En Palestine, les morts se font de plus en plus et les terres commencent à être rongés par la colonisation sioniste.

Les bons gouverneurs des pays musulmans sont tombés, les uns après les autres, puis ont été remplacés par des personnes soutenant l'apartheid et la colonisation sioniste. Mais parallèlement, les musulmans se sont renforcés. Bientôt éclatera une guerre, je le sens.

Du côté personnel, Ahlam est morte... ça ne m'a rien fait, de toute façon, j'avais retrouvé ma fille. Je ne m'étais marié avec elle que pour ça.

- Hind, Rehan, allez dans votre chambre. Leur dis-je.

Ils hochent la tête et se mettent à courir.

- ça me fait du bien de te voir souriant. Dit-ele en souriant. De te voir heureux...

- Heureux ? Je ne serais plus jamais heureux à cause de toi, Ahlam. Dis-je et elle me regarde perdue, tu m'as pris ma femme. Elle faisait mon bonheur.

Elle lève son regard vers moi. 

- Après tout ce temps, tu parles encore d'elle ? Dit-elle. 

- Ahlam... tu es divorcé. Dis-je fermement.

Elle fait les yeux ronds puis se baisse et se met à genoux devant moi en tenant mon qamis.

- Non ! Je t'en supplie, Emin... Dit-elle les larmes aux yeux.

- Tu es divorcée. Dis-je encore une fois. Et... Tu es...

- Non ! Ne le dis pas ! Ne le dis pas ! Réfléchis bien, si tu le dis encore, on sera réellement divorcé. Emin ! Dit-elle en pleurant.

- Tu es divorcé. Ahlam, prends tes affaires et sors de chez moi. Lui dis-je d'un ton ferme.

Shehab a été exécuté aussi. Ils l'ont exécutés et j'ai tout vu. Absolument tout.

- Non ! Je vous en supplie ! Je ne veux pas mourir ! Non ! Non ! Crie-t-il.

Je m'avance dans la foule et regarde d'un air neutre.

- Emin ! Mon frère ! Tu vas me lâcher pour une femme ? Me dit-il.

- Pas n'importe quelle femme... tu as ce que tu mérites. Si tu ne voulais pas mourir, t'aurais dû y penser avant de tirer sur ma femme. Vie pour vie, Shehab.

Un homme cagoulé arrive avec une arme et la pointe sur l'arrière de son crâne.

- Adieu, Shehab. Dis-je en souriant.

- Non, je vous en supplie ! Non ! Crie-t-il en panique.

Puis l'homme tire sur la gâchette. Je ne cligne pas des yeux et regarde son corps tomber au sol et son sang couler. Aucune émotion n'apparaît sur mon visage, ni joie ni tristesse. Je reste neutre, je suis soulagé que ceux qui ont fait du mal à ma femme aient payés le prix.

- Je pars bientôt en Syrie. Entendis-je. Ils vont bientôt commencer à recruter.

Je me tourne alors vers l'homme en question.

- Qu'est-ce qu'il y a en Syrie ? Lui demandais-je.

- Leur futur président prévoie de faire une armée musulmane. Une seule et même armée pour reprendre Jérusalem et la Palestine. M'explique-t-il.

- Comment faire pour être recruté ? Lui demandais-je.

Il me répond qu'il faut que je parte en Syrie et c'est là, qu'ils verront si je suis apte à faire partie de leur armée. J'ai envie d'y aller, d'y participer mais Rehan et Hind n'ont que quinze ans. Je ne peux partir et les laisser.

Je rentre chez moi, la tête dans les nuages. Partir ou rester ?

- Suhayl, les enfants, il faut que je vous parle. Leur dis-je.

On s'assoit et ils me regardent, attendant que je continue.

- Il y a en Syrie, une nouvelle armée. Une armée musulmane. Je veux en faire partie. Dis-je.

- Hind, va dans ta chambre. Je vais venir après. Lui dit Rehan.

Elle hoche la tête puis s'en va.

- Papa, tu t'es enfuis de Syrie pour y retourner ? Me dit Rehan.

- C'est différent Rehan, c'est pour sauver nos frères musulmans. C'est pour libérer la Palestine et reprendre Jérusalem. Répondis-je.

- Emin, réfléchis bien. Si tu meurs, tes enfants resteront seuls. Me dit Suhayl.

- J'ai réfléchis à ça, et c'est pour ça que je vous en parle. Dis-je en grimaçant.

- Baba, j'ai quinze ans. Je ne suis plus un enfant, pense à toi. Me dit Rehan. Puis si tu vas à la guerre, je veux venir avec toi...

- Non, Rehan. Tu restes avec ta sœur. Dis-je.

Finalement, je pense que je vais y aller. Peut-être que je pourrais me racheter au moins... Me faire pardonner pour toutes les vies que j'ai prise quand j'étais ignorant et faisais partie de Daesh.

- Ils commencent l'embarquement vers la Syrie demain soir. Dis-je en soupirant.

- Baba, si tu y vas, fais attention à toi. Même si nous sommes plus des enfants, on a encore besoin de toi. T'es notre père, tu es tout ce qui nous reste avec tonton et Yûsuf. Me dit Rehan doucement.

Je me lève alors et le serre fort dans mes bras. Suhayl arrive et me prend aussi dans ses bras. C'est décidé. Demain soir, je m'en vais.

De plus, je pourrais énormément servir à l'armée avec mon expérience. J'avais été entrainé comme un robot.

Je rentre dans ma chambre et commence à préparer mes affaires. Pendant que je rangeais mes habits, une photo tombe par terre. Je me baisse et la ramasse. Je m'assois sur le lit en la tenant entre mes mains.

C'est une photo de moi et Syhem, le jour de notre mariage. Elle ne portait pas son niqab ce jour-là, je me dis heureusement, comme ça j'ai au moins un souvenir de son visage. Son sourire, ses yeux, elle. Les larmes me montent aux yeux en nous voyant.

- Tu avais rêvée qu'un jour ton pays redevienne comme il l'était, ton rêve est en train de se réaliser. Dis-je faiblement. J'aurais aimée que tu sois là pour le voir.

Je lâche un petit sourire en coin en caressant son visage sur la photo.

- Est-ce qu'Allah va me donner la chance qu'on se retrouve enfin ? Quinze ans sont passés depuis le jour où j'ai pu voir ton visage pour la dernière fois, où tes yeux fixaient les miens avant qu'ils ne se ferment à jamais, où ton âme s'est envolée, me laissant errer sur terre. Allah seul sait comment j'ai pu survivre sans toi. Chuchotais-je tristement. Je t'aime, hayatim. Je t'aime, aşkim.

Je soupire en posant la photo à côté de ma valise, sur mon lit. Je mets mes mains sur mon visage. Mon cœur n'arrive pas à trouver la tranquillité, l'apaisement.

- Baba ? Entendis-je.

Je lève le regard et vois Hind. Elle court vers moi et me prends dans ses bras.

- Tu pars baba ? Me dit-elle en pleurant. Ne nous laisse pas comme maman !

- Je ne vous lâcherais jamais. Je vous écrirais tous les jours mon cœur. Dis-je en lui embrassant le crâne.

Je la serre contre moi alors et la console jusqu'à qu'elle s'endort dans mes bras.

La Belle et le DjîhādîsteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant