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Cela fait une nuit que je suis ici. Je me suis endormie quelques minutes avant de me réveiller. Je ne peux pas trouver le sommeil, c'est tellement silencieux que le seul bruit qu'on entend sont les gouttes d'eaux qui tombent sur le sol.

Alors que je fixais le sol, j'entends la porte s'ouvrir. C'est le même qu'hier. Je ne le regarde même pas avec peur, je n'ai plus peur. Ce qui arrivera m'est écrit, je vais vivre ce qu'il m'est destiné.

- J'ai une petite surprise pour toi... princesse. Dit-il en riant.

Il recule et appelle quelqu'un. Deux hommes rentrent en tenant un troisième entre eux. C'est lui. Anis. Ô Allah... il traîne ses jambes sur le sol alors que les deux hommes le tiennent par le bras.

- Mettez le sur l'autre chaise et attachez le. Ordonne-t-il aux hommes.

- Anis ! Qu'est-ce que vous lui avez fais ? Dis-je les larmes aux yeux.

- Ce qu'il mérite. Dit-il. Bon, assez parlé.

Les hommes finissent d'attacher les mains et pieds d'Anis avant d'approcher sa chaise de la mienne. La situation d'Anis me donne envie de pleurer.

- Je te laisse avec ton amoureux, profitez en avant que je revienne. Dit-il avant de s'en aller.

Il s'en va avec ses hommes et ferme la porte. Je fixe Anis, inquiète. J'ai les mains et pieds attachés, je ne peux que toucher Anis avec les yeux.

- Anis... tu m'entends ? Dis-je les larmes aux yeux.

Il relève sa tête difficilement.

- Syhem... chuchote-t-il.

Il a les yeux mi ouverts et il parle comme s'il était ivre. Il est blessé sur le visage et tout son corps.

- Je suis... Je suis désole. Dit-il faiblement. C'est... c'est de... ma faute.

- Anis ! Je t'en supplie, ne baisse pas les bras. Tu verras, Allah nous sauvera ! Allah ne nous laissera pas seuls ! Dis-je tristement.

- A... Allah ? J'ai... j'ai fais... tellement de mal. Il... Il ne va... ne va jamais me... me par... pardonner. Dit-il la voix brisée.

- Ne dis pas ça, Allah pardonne à ceux qui ont un cœur sincère... Anis... dis-je.

Il relève sa tête et me regarde. Un faible sourire se dessine sur son visage.

- Je... Je me sens... libre... car tu es... tu es là... Sy... Syhem. Me dit-il.

Il tourne sa tête vers la porte puis pose son regard sur moi.

- Je n'imaginais pas... pas dire ça... ici mais... mais la... mais la mort nous... nous guette... Je... je veux que... que tu saches que... que... dit-il difficilement.

- Arrête de parler, tu te fatigues, Anis. Dis-je les larmes aux yeux.

Un silence plane entre nous.

- Seni seviyorum, Syhem. Souffle-t-il.

Je n'ai pas compris ce qu'il a dit... ça doit être quelque chose dans sa langue. Mais quoi ? Je ne cesse de le regarder inquiète de sa situation... je ne veux pas qu'ils le tuent. S'il meurt, je meurs avec lui.

La porte s'ouvre encore une fois, plus aucun homme ne porte de masque cette fois. Ils ont tous le visage dur et sec. Ils font peur...

Un des hommes passent devant Anis mais s'arrête. Il lui donne un coup de genoux dans son ventre, Anis tombe au sol avec sa chaise. Je me mords les lèvres en fermant les yeux et je coupe ma respiration de seconde.

L'homme se met sur lui et le frappe de toutes ses forces. Anis ne réagit pas. Il se laisse faire. Dans tous les cas, qu'est-ce qu'il aurait pu faire ? Ça me fait mal de voir ça, très mal...

- ANIS ! Criais-je en larmes. Vous n'avez pas de coeurs à ce point ? Il va mourir !

L'homme me fixe et s'avance vers moi.

- Et il avait un cœur quand il a tué des innocents ? Me dit-il d'un ton sec.

- Je vous en supplie, frappez moi. Frappez moi, tuez moi, faites ce que vous voulez et laissez Anis libre ! Le suppliais-je.

Il me fait un sourire en coin puis me fait un coup de poing dans le ventre. Ma respiration s'est coupée pendant un instant.

- Tu ne seras jamais capable de supporter ça jusqu'à ta mort. Vous partagerez votre douleur à deux. Dit-il en riant sarcastiquement.

Il tourne autour de moi puis revient devant. Il se baisse à ma hauteur.

- Avoue que tu fais partis d'eux. Me dit-il.

Je ne réponds pas. Pourquoi avouer quelque chose de faux ? J'ai été contre Daesh depuis le début.

- Réponds moi. M'ordonne-t-il.

- Je n'ai jamais été avec eux. Lui dis-je.

Il s'approche de moi et mets sa main autour de mon cou. Il sert sa mâchoire et me regarde dans les yeux.

- Avoue. Crache le morceau ! Allez ! Dit-il d'un ton dur.

- La... Lâchez la... elle... est... est innocente... Lui dit Anis. Emme... emmenez la loin d'ici.

L'homme ne se retourne pas et continue à serrer ma gorge. Je sens l'air de plus en plus dur à respirer. J'ai mal...

- ARAZ ! Crie l'homme.

Il desserre sa main de mon cou. Je reprends ma respiration et je ne fais que tousser.

- Oui patron. Répond-il.

- Prenez notre cher djihadiste, soignez le. Il doit être en forme pour répondre à nos questions. Dit-il.

L'homme hoche la tête à son patron et sort. Deux autres hommes viennent et prennent Anis. Je ne fais que de l'appeler mais il est inconscient. Il ne répond pas.

- A nous deux... princesse. Dit-il en souriant.

SUHAYL

On arrive enfin en Turquie. Mon corps est ici mais ma tête est en Syrie. Ce qui me rassure un peu est le fait qu'Anis soit avec ma soeur... mais je m'inquiète tout de même. De toute façon, je dépose Mina à l'hôpital et je repars en Syrie.

- Mon père va nous rejoindre à l'hôpital, d'accord ? Lui dis-je.

Elle hoche la tête. Elle n'a pas prononcée un mot depuis qu'on est partit... à vrai dire, moi non plus. On arrive enfin à l'hôpital, je paye le passeur comme prévu et  je prends Mina à l'intérieur.

Les médecins la prennent en charge et je l'attends dans la salle d'attente. Je m'assois et me perds dans mes pensées.

- Iyi misin (tu vas bien ?) Entendis-je.

Je lève la tête, c'est un des hommes qui sont assis avec moi.

- Iyiyim... iyiyim. (Je vais bien... je vais bien). Dis-je en soupirant.

Je suis juste déçu de moi-même. Comment j'ai pu laisser ma sœur ? Comment ? Quel grand frère je fais ?

- Suhayl bey ? Me dit le médecin.

La Belle et le DjîhādîsteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant