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Je m'assois sur mon lit. Je suis dans une cellule isolée mais à côté, il y a une autre cellule. Je ne sais pas qui est là.

J'ai avoué tout ce que j'ai fais, je n'ai mentis sur rien. Puis, à quoi ça sert de mentir ? Il fallait que justice soit faite. Si ce n'était pas ici-bas, ça aurait été dans l'au-delà. Peut-être que ça me fera éviter l'enfer...

- Eh, le nouveau ! T'as de l'argent sur toi ? Entendis-je.

Je relève la tête, ça doit être l'homme qui est dans la cellule à côté de la mienne. Je lève le regard puis ne bouge plus.

Syhem lève la tête et le voit. Elle marche vers lui et lui, il court vers elle. Je reste à les regarder, les poings fermés, sans rien dire.

...

Je vois ensuite une personne en noir, il a une carrure d'homme. Il a un pantalon noir,  un haut noir et une cagoule noir. Il reste fixé sur le même endroit, ou je dirais, sur la même femme...

...

- MA SOEUR EST MORTE ! TU AS TUÉ MA SOEUR ! TU AS TUÉ MA PERLE ! TOUT CE QUI ME RESTAIT ! QU'EST-CE QUE TU AS DANS LE COEUR ? UNE PIERRE ? TU AS RENDU UNE FAMILLE MALHEUREUSE ET DES ENFANTS ORPHELINS DE LEUR MÈRE ! ILS VONT GRANDIR SANS L'AMOUR DE LEUR MÈRE ! Crie Suhayl, plein de rage.

Je me précipite vers lui, sauf qu'il y a les barres de la cellule qui m'empêche de l'atteindre.

- Calme toi, Anis. Fais une roqya. Me dit-il en riant.

- Tu as tué ma femme et tu m'as privé de mes enfants ! Qu'Allah te maudisse, Shehab ! Qu'Allah te maudisse ! Criais-je.

- Syhem, c'était soit moi qui l'avait soit c'était personne. Surtout pas toi. Me dit-il.

- Pourquoi t'es si obsédée par elle ? ELLE NE T'AIMAIT PAS ! Lui dis-je, fou de rage.

- Non, elle ne m'aimait pas mais elle est la soeur d'un ancien chef d'un puissant groupe palestinien. Je ne perdrais rien mais gagnait tout. T'imagines on serait resté marié ? Et qu'on aurait eu des enfants ? Je fais tomber ce groupe facilement. Me dit-il en souriant.

Donc ma femme a souffert puis elle a perdue la vie pour une histoire de pouvoir ?

- Tu as ruiné ma vie pour une histoire de pouvoir que tu n'auras jamais ? Chuchotais-je.

C'est pour ça que Suhayl se cachait. Il ne voulait pas que les autres sachent que c'est sa sœur. C'est pour ça aussi que le "calife" ne voulait pas que je me marie avec elle. Il voulait que  ce soit le commandement de l'armée pour faire tomber ce groupe et s'emparer de Gaza. Tout le monde savait, sauf moi...

J'aurais dû insister ! J'aurais dû le savoir ! J'aurais dû... mais comment j'aurais pu deviner ? Elle était sous surveillance depuis le début, comment je n'ai pas pu le remarquer ? Comment ?

Yezid... il lui faisait du mal pour se venger parce que ce groupe avait pris en otage un proche à lui. Shehab, il la voulait pour l'utiliser contre son frère. Tout le monde était au courant. Tout le monde. Et quand ils m'ont demandés de partir à Paris... ! C'était une tentative de m'éloigner de Syhem ! Tout était calculé. Tout.

- Vous m'avez pris la moitié de mon âme. Vous nous avez suivis jusqu'ici. Shehab... Pourquoi ne pas m'avoir tué après elle ? Lui demandais-je.

- C'était tentant mais je savais que tu serais inoffensif. Tu n'es un danger pour personne. Dit-il en riant.

Je le fixe longuement puis court vers lui encore une fois et frappe sur sa cellule alors que lui s'est reculé. Je cris et je laisse ma rage parler.

Shehab s'en va pour appeler les gardiens en riant de moi. Il sait qu'il n'aura rien tant que je suis loin de lui. Les gardiens viennent et m'attrapent dans ma cellule.

- IL A TUÉ MA FEMME ! IL L'A TUÉ DEVANT MES YEUX ! PENDEZ LE ! LAPIDEZ LE ! DÉCAPITEZ LE ! FAITES CE QUE VOUS VOULEZ MAIS TUEZ LE ! IL NE MERITE PAS DE VIVRE ! QU'ALLAH TE MAUDISSE SHEHAB ! TU AS PERDU TA VIE ET TU VAS PERDRE TON AU-DELA ! QU'ALLAH TE MAUDISSE ET TE PUNISSE ! Dis-je en criant.

Ils me sortent alors de la cellule puis me menotte. Ils m'emmènent dans une autre cellule, il n'y a ni lumière ni rien. Il y a juste du vide. Ils ferment la porte et je m'assois au sol. Je mets mes mains sur mon visage en pleurant.

- Pourquoi tu pleures, mon coeur ? Me demande-t-elle.

- Tu me manques, Syhem... Je n'arrive plus. Je n'arrive plus sans toi. Dis-je les larmes aux yeux.

- Tu es le premier homme qui est rentré dans ma vie et je ne le regrette pas.

- Quand sera mon tour ? Chuchotais-je. Je ne peux plus supporter la vie sans toi.

Je la sens près de moi, c'est comme si elle s'asseyait à côté de moi puis elle pose sa tête sur mon épaule en regardant devant elle.

- L'épreuve ne dure qu'un temps puis nous sommes rappelés à Allah.

- L'épreuve est si dur, Syhem... tu te rappelles la première fois qu'on s'est vu ? Je t'avais laissée passer quand j'ai vérifié les médicaments que tu avais ramené à ta cousine. Dis-je en souriant tristement.

- Tu étais dur mais ton cœur était mort.

- ... et tu l'as fais revivre, Syhem. Mon coeur, mon unique amour, la femme de ma vie. Seni seviyorum, je t'aime Syhem. Dis-je en baissant la tête.

Je la sens se lever et se mettre en face de moi.

- Ne pars pas. La suppliais-je.

Elle saute alors dans mes bras. Je ferme les yeux et l'imagine. Ma femme... peu à peu, je la sens s'éloigner jusqu'à ne plus la ressentir. Je garde les yeux fermés en me rappelant de son visage, son sourire, ses yeux, ses cheveux...

Je m'allonge sur le sol.

- Je n'ai jamais été aussi malheureux que depuis que je t'ai perdue. Dis-je doucement. Notre vie à deux venait de commencer, peut-être que je suis le fautif ? Peut-être que j'aurais dû m'éloigner de toi et te cacher puis les laisser me tuer. Mais si je m'étais éloignée de toi, je n'aurais jamais eu des enfants et je n'aurais jamais pu aimer.

Je ferme les yeux et me laisse emporter par le sommeil.

La Belle et le DjîhādîsteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant