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Alors que la guerre éclate en mars 2011, des milliers de civil se font tués. En 2014, l'état terroriste, Daesh, prennent Raqqa. Ils étaient vus dans la ville comme «héros» à leur entrée. Ils étaient doux avec les enfants, ils leur offraient des sucreries et jeux. Puis petit à petit, leurs comportements changent.Ils deviennent agressifs, remplis de haine.

....

«Je me bats pour la cause d'Allah, je suis prêt à mourir. Je suis prêt à me battre. Je suisprêt à faire disparaître le monde occidental. Les kouffar ont tués ma mère, on était restés à New-York. Elle a été tuée par balles car elle portait le jilbeb. Je suis un soldat d'Allah. Je vais tous les détruire. Tous.

- Tu promets que tu te battras pour Allah ?

- Je jure par Allah que je me battrais pour Lui et contre les ennemis de l'Islam. »

La haine de l'occident. La hainedes mécréants. C'est la seule chose qui m'anime. Et surtout lesgouverneurs. Oui, tous. Tout les gouverneurs.

Aujourd'hui, on prend Raqqa. Nos tanks s'avancent avec nos drapeaux noirs. Les habitants sortent deleurs maisons. Mes frères lancent des sucreries et des jeux aux enfants. Ils sont heureux. Le but est que nos frères et sœurs d'ici nous fasse confiance.

Puis, on installera la Charia. On établira la loi d'Allah, on établira les enseignements du Prophète. On reconquerra le Cham comme avant ! Le Cham est musulman, le Cham est à nous !

Et pour ça, on nous traite de terroristes. Ces occidentaux sans pudeur ni moral, ils n'ont aucune valeur. Le pire est que certains musulmans pensent comme eux. Ils ont tous apostasiés ! Quand on imposera la Charia, on les tuera. Oui. Le sang de l'apostat nous purifiera. On pourra entrer au Paradis.

- Qu'Allah bénisse le Cham !

On arrive devant la mosquée. On sort, on enlève nos chaussures. Je me mets au premier rang. Le calife arrive enfin. Il est très respecté et il serait un descendant du Prophète. Je pense que c'est plus légitime de lui remettre le titre de "calife" du coup.

- Al salam aleykum wa rahmatulLahi wa barakatuh. Dit le calife, mes frères, aujourd'hui je nomme mon nouveau bras droit car l'ancien est mort pour Allah, rahimu Allah.

Des chuchotement se font entendre de partout. Il nous regardait avec un regard de puissance.

- Toi. Dit-il en me pointant. Ton nom ?

Je me lève.

- Anis. Dis-je d'un air neutre.

- Vrai nom ? Me demande-t-il.

- Non, pseudonyme. Répondis-je.

Il fait un petit sourire en coin et me dit de m'approcher avec un signe de la main. Je m'avance jusqu'à devant le minaret.

- Mon bras droit, Anis. Annonce-t-il aux hommes.

Je hoche la tête. C'est un grand honneur. Je suis le bras droit du calife. Nous faisons notre prière et nous sortons, chacun fait ce qu'il veut. Tant qu'on ne péche pas, tant qu'on ne désobéit pas à Allah, on peut faire ce que l'on veut. Sinon, comme l'a dit le Prophète, on doit égorger tous pêcheurs pour que nous gagnons le Paradis et pour que les pêcheurs soient pardonnés.

Je marche dans les rues de Raqqa avec mon arme à la main, la barbe bien taillée, le regard dur et un bandeau autour de la tête écrit "la illaha ila Allah".

Les femmes se promènent toutes en niqab ou en sitar. Ni talon, ni maquillage, ni habit court ou serré, les femmes du Cham sont respectées. Les femmes du Cham sont pudiques. C'est ça, qu'on veut ! Et si elles ne veulent pas, elles y sont obligées. Le voile est une obligation d'Allah, ici c'est pas l'occident ! Elles y seront forcées.

SYHEM.

Je porte mon niqab et sort dans les rues de Raqqa. Je suis bien-sûr accompagnée d'une amie. Je ne peux pas sortir seule. Déjà qu'avec Bachar, on était totalement oppressés, alors avec Bachar et Daesh ? C'est notre mort.

Seul ma Foi peut m'aider à survivre. Si je ne craignais pas Allah, je me serais tuée. Ce n'est pas une vie, ça. Qui voudrait d'une vie comme ça ? Plus les jours passent, plus la guerre devient dur.

L'année dernière, ma grande soeur est morte, bombardée dans sa maison avec son mari et son nourrisson, mon neveu. Je n'arrive pas à oublier et je n'oublierai jamais. Ma mère, quant à elle, elle s'est faite violée par l'armée syrienne. L'armée de Bachar. Elle s'est suicidée par la suite. En m'oubliant...

Daesh était pour moi comme un groupe de résistance contre Bachar. Contre le tyran. Aujourd'hui, j'ai ouvert les yeux. Ils ne sont pas là pour la résistance mais pour semer le désordre. C'est comme ça...

- Ton niqab, ma soeur. Me dit un membre de Daesh. Il est mal mis vers ton visage.

- Oh, barakAllahu fik. Lui répondis-je.

Il hoche la tête et s'en va. Ses yeux me disent quelque chose... Je l'avais déjà vu quelque part. Mais où ? C'est difficile de l'identifier puisqu'il porte sa cagoule.

Je rentre dans un magasin pour acheter quelque chose à manger. Il n'y a plus rien chez moi. À dix-sept ans, c'est ça mon quotidien.

J'achète ce dont j'ai besoin, en sortant, un soldat de Daesh m'arrête. Il regarde ce que j'ai achetée pour voir s'il n'y a rien de haram. D'illicite. Ici, parfois les commerçants ont une bouteille de champagne, du porc ou des trucs comme ça. Et vu, qu'il y'a des syriens chrétiens et que c'est bientôt noël, daesh fait encore plus attention.

Moi, je n'ai rien à craindre. Je crains Allah pour acheter des choses illicites. Je Le crains Lui, pas eux. Une fois qu'il finit, je rentre chez moi. J'enlève mon niqab, ma cousine était là.

- Tu as pris du temps... Ils t'ont arrêtés ? Me demande-t-elle.

- Oui. Il vérifiait si je n'avais pas d'alcool ou de porc. Répondis-je.

- Dis toi qu'ils se disent musulmans quand même... Dit-elle en soupirant, s'ils sont musulmans, on est quoi, nous ?

- J'espère qu'ils ne feront pas des attentats comme le 11 septembre. Les non-musulmans détesteront les musulmans pour des choses qu'ils n'ont pas faites ! Dis-je en grimaçant.

- Ils vont le faire, ils préparent quelque chose de grand. Ils voulaient le faire le jour de l'an, mais ils n'ont assez de soldats ni d'armes. Dit-elle.

- In shaa Allah ils ne pourront rien faire. Déjà qu'on se fait bombarder, s'ils embêtent les Européens, on est mort. L'occident nous bombardera aussi. Dis-je en regardant par la fenêtre.

La Syrie n'est plus comme avant. Ça me fait mal. Les plaines où je jouais étant petite ne sont plus que de la Terre trouée. Il n'y a plus rien qui me rappelle mon enfance. Plus rien.

D'ici quelques années, j'ai peur que la Syrie devienne un désert oublié. Que les personnes qui passeront diront "Ici, il y'avait un pays. Un beau pays qui est tombé en guerre puis qui a disparu"...

La Belle et le DjîhādîsteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant