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Je suis en plein centre d'un cercle d'hommes et de femmes riant de moi. Ils prennent des pierres et me les jettent au visage. Je me baisse en me cachant mon visage.

- Il n'y a d'autre divinité digne d'être adoré qu'Allah ! Criais-je.

- Apostate ! Apostate ! Apostate ! Crie la foule.

Je me mets alors à pleurer tant la douleur est forte.

- Prosterne toi devant notre seigneur et nous te châtierons plus ! Crient-ils.

- Mon front ne se pose au sol que pour Allah, le Seigneur des seigneurs ! Leur dis-je.

- Étrangère ! Étrangère ! Étrangère ! Mort à l'étrangère ! Crient-ils.

Petit à petit, je vois que tout le monde s'arrête. Un homme d'entre eux me tend sa main et m'éloigne loin d'eux.

- Viens, viens vite. Me dit-il.

Je le suis sans broncher et il m'emmène dans une petite maison. Je vois trois hommes dans la maison et deux femmes. Je regarde bien et je reconnais mon père.

- Baba ! Criais-je.

Il m'ouvre ses bras où je m'y réfugie.

- J'avais raison baba, tu es en vie ! Ils n'ont pas voulu m'écouter. Dis-je en souriant.

- Ma fille, nous sommes des étrangers ici. Toute personne dans cette maison est musulmane, ceux qui sont dehors ne le sont pas. Dans ton monde ma fille, tu es une étrangère. Mais sois fière de ton étrangeté ! Me dit-il.

Deux hommes arrivent par l'arrière et l'attrape par le bras.

- Rappelle toi de ce que je t'ai dis ! Sois fière de ton étrangeté ! Sois fière ! Sois fière ! Crie-t-il avant de disparaître.

Je tombe au sol en pleurant. Mon père vient de partir... Je sens ensuite deux mains me tenir par les bras. C'est une des femmes et un des hommes de la maison.

- Qui êtes-vous ? Demandais-je.

Ils se mettent devant moi en souriant.

- Je me présente, je suis Rehan. Et voici ma sœur jumelle, Hind. Tes enfants... Me dit-il.

Je m'approche d'eux alors et je les prends dans mes bras.

- Et moi, alors ? Entendis-je.

Je me retourne et vois Suhayl avec Mina. Je saute sur leur cou en les prenant dans mes bras.

- Ma Syhem... entendis-je.

Je me retourne et vois un homme blessé. C'est celui qui m'a sauvé de la foule. Sans lui, je serais morte sous le coup des pierres. Mais sans comprendre, je le prends dans mes bras en pleurant.

- Tu vois ? Tout va bien. Me dit-il.

Je me détache de lui puis le fixe. C'est... Emin. Mon mari. Je lui souris. Mais il a l'air triste. Fatigué.

- Syhem... dis le moi, dis moi ce que tu ressens pour moi. Dis moi tout. Me dit-il.

Je lui prends ses mains dans les miennes.

- Allah m'a fait revivre en t'envoyant vers moi. Lui dis-je. Je... Je suis tombée amoureuse de to, Emin. Je t'aime plus que tout, tu sais ? Et même qu'à cette heure-ci, je serais sûrement morte sans toi.

A ma dernière phrase, il baisse la tête et lâche mes mains.

- Je suis désolé. Souffle-t-il.

Il se sépare de moi et rejoins nos enfants qui le prennent dans ses bras.

- Tu m'abandonnes comme mon père, Emin ? Rehan ? Hind ? Mes enfants ! Et Suhayl, tu ne dis rien ? Mina ! Dis-je les larmes aux yeux.

Ils baissent tous leurs têtes puis je vois Mina s'évanouir.

- MINA ! Criais-je.

Je cours vers elle mais je vois mon frère tombe à genoux, Rehan et Hind se mettent à pleurer et Emin les serre contre lui en pleurant et en criant. Je tourne et tourne mais revois la même scène.

Puis finalement, je vois une personne face à moi qui tiens une arme. Je me tourne pour revoir ma famille mais avant même que je ne puisse poser les yeux sur eux, j'entends le bruit de tir.

- SYHEM ! Entendis-je.

J'ouvre les yeux d'un coup, je respire rapidement.

- Il... il n'a pas tiré ? Chuchotais-je.

- Tu rêvais Syhem, c'est finis. Me dit Mina.

Je me lève d'un coup.

- Tu  vas bien, Mina ? Lui demandais-je.

- Oui mais calme toi, qu'est-ce qu'il t'arrive ? Me demande-t-elle.

- Où sont Rehan et Hind ? Demandais-je.

Mina m'emmène dans la chambre des enfants, je suis soulagée de les voir calme. Ce n'était qu'un rêve, un cauchemar...

- J'ai vu mon père... il était tout... tout lumineux... mais deux... deux hommes l'ont pris ! Dis-je faiblement.

- Calme toi, viens, assis toi. Ton mari arrive bientôt. Me dit-elle.

Je hoche doucement la tête puis m'assois.

- C'était bizarre. J'étais à une époque, une vieille époque. Tout le monde me demandait de me prosterner devant un seigneur mais moi, je ne voulais pas. Je leur disais que je ne me prosterne que pour Allah, ils allaient me tuer. Et Emin m'a sauvé. Dans une maison, il y avait toi, moi, Suhayl, Emin et mes enfants. Un moment, tu t'es évanouie et eux, ils pleuraient. Quand un homme est venu et m'a tiré dessus. Lui racontais-je.

Elle écoutait attentivement jusqu'à que la porte s'ouvre. Elle se couvre correctement puis on sort rejoindre les hommes. Je vois Emin et le prend dans mes bras. Mina part rejoindre Suhayl et chacun rentre dans son appartement.

- C'est le plus bel enterrement auquel j'ai assisté. Me dit Emin. Allah lui a accordé une belle fin. Il est mort proche de Lui. Quand on l'enterrait, il était tellement léger. Comme si l'on portait une plume.

Les larmes me montent aux yeux.

- J'ai jamais doutée que mon baba était quelqu'un de bien. Dis-je tristement.

Je me lève et cherche quelque chose dans mon tiroir.

- Regarde, c'est le jour de notre mariage ! Regarde comment il était heureux ! Dis-je en souriant tristement. Emin... j'ai perdue une personne unique, il n'y en pas deux comme lui. Il n'était pas comme les autres mon baba.

Emin m'écoutait en me caressant les cheveux.

- Tu sais, même si mon grand père me mentait quand j'étais petite, qu'il me disait que baba m'a abandonné et qu'il ne m'aimait pas, moi, je l'aimais sans le connaître. Le soir, avant de dormir, je parlais à mon père comme s'il était à côté de moi. Je demandais à Allah de me le donner. Dis-je en me perdant dans mes pensées.

J'étais petite mais je l'aimais, je ne l'ai jamais connu mais je l'aimais...

- Ma mère me racontait tout le temps une histoire, celle d'un homme et d'une femme qui s'aimaient, ils s'aimaient tellement qu'ils pouvaient mourir l'un pour l'autre. Quand j'ai connu baba, j'ai compris qu'elle me racontait son histoire avec lui. Et j'ai aussi compris que je t'aime autant que ma maman aimait mon baba. Lui dis-je timidement.

Il m'attrape la tête et m'embrasse sur le front.

- Ne me laisse jamais, Emin... Lui demandais-je.

Il met sa main dans la mienne.

- Jamais. Répète-t-il.

La Belle et le DjîhādîsteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant