- Mina ? Non... Mina, réveille toi ! Dis-je les larmes aux yeux.
Je secoue son corps. Son visage commence à devenir pâle, ses lèvres deviennent bleues et ses couleurs disparaissent petit à petit. La chaleur se transforme en froid et ce corps devient un corps vide, séparé de son âme.
- Mina... ma femme... comment je vais faire sans toi ? Dis-je faiblement.
Je lève les yeux vers le haut.
- Ô Allah... Tu as repris ce qui T'appartenait, ma sœur, mon père et maintenant ma femme. Ô Allah, donne moi la patience ! Criais-je. Donne moi la patience et la force de continuer !
Je m'assois face au corps de Mina puis me mets à pleurer. Troisième fois que je vis la même chose, troisième fois que mon cœur se déchire.
Je regarde la feuille avec l'adresse. C'est là. Je sonne à la porte et une femme m'ouvre.
- Bonjour, vous êtes Mina ? Demandais-je.
C'était notre première rencontre. Mes yeux ne voulaient pas se détacher d'elle. C'était l'une des plus belles femmes que j'ai vu de ma vie. Elle dégageait un charme. Puis, on s'est de plus en plus rapprocher. On s'était allié pour retrouver ma sœur.
- Suhayl... laisse moi mourir. Me dit-elle difficilement. Va protéger ma Syhem. Elle a besoin de toi. Ils l'ont attrapés, ils vont la tuer. Sauve la.
- Ecoute moi, je ne te laisserais jamais mourir. D'accord ? Lui dis-je.
Je prends le drap blanc avec mes deux mains et c'est avec les larmes aux yeux que je couvre son corps. Ce bout de tissu blanc que j'ai posée sur elle est synonyme de repos éternel. Une fois que je le lâche, c'était une évidence. Mina est morte. Elle est morte et ne va plus revivre. Comment je vais vivre ? Comment ?
Je sors de la chambre et rejoins Emin et ses enfants. Je le prends dans mes bras et pleure.
- Une autre âme s'est envolé... Dis-je faiblement.
Emin me serre alors dans ses bras.
- Qu'Allah lui fasse miséricorde et lui accorde le plus haut degrés du Paradis. Dit-il.
- ... Amin. Répondis-je. Elle m'a laissée un garçon, un fils, Yûsuf. Comment je vais faire ?
- On sera avec toi, Suhayl. J'ai élevé mes deux enfants seul aussi... Dit-il en soupirant.
Les femmes rentrent une par une dans la chambre avec des seaux d'eau. Elles vont la laver. Mina est partit.
- Je veux l'enterrer à côté de ma sœur. Dis-je les larmes aux yeux.
- D'accord. Suhayl, va voir ton fils le temps qu'elle finisse le lavage. Me dit Emin.
Je hoche la tête et rentre voir mon fils. Je le prends doucement dans mes bras.
- ... Tu verras dans ses yeux, ta sœur... Dit-elle faiblement.
Mina avait raison. Il a les mêmes yeux que Syhem. Je la vois en Yûsuf. Mon fils se met alors à pleurer.
- Ne pleure pas... tout va bien. Tout va bien. Dis-je les larmes aux yeux.
EMIN
Je m'assois, les mains sur mon visage. Syhem est morte puis Mina aussi. Qui sera le prochain ? Ça me fait tellement mal... Mina, je la considérais comme une sœur même si on ne se parlait pas beaucoup.
Les sœurs qui lavaient son corps sortent puis les hommes viennent prendre son corps pour l'enterrer et prier sur elle. Suhayl arrive et rentre en même temps que moi. On porte le corps sur nos épaules et on se dirige vers le cimetière.
Les hommes qui creusaient sa tombe posent leurs pelles et se mettent à nos côtés. On se descend le corps à terre puis on le couvre. On se met en rang et on prie. Je sens Suhayl pleurer avec mes côtés.
Une fois finis, les hommes s'en vont et ne reste plus que moi et Suhayl. Je me mets de côté et le laisse un peu seul. Je m'arrête devant la tombe de ma femme.
- On y va ? Me demande Suhayl.
Je lance encore un regard vers sa tombe.
- Vas-y toi, je vais rester encore un peu. Dis-je.
Il hoche la tête et s'en va. Je m'accroupis et touche le sol.
- Aujourd'hui, Mina est arrivé aussi. Dis-je en soupirant. Ton frère est triste mais il ne le montre pas. Ça me rend triste aussi car ton frère est comme mon frère et Mina était comme ma sœur... mais vous êtes mieux où vous êtes, pas vrai ? Ton père, toi et ta meilleure amie...
Je lâche un petit sourire triste.
- Tu me manques, Syhem. Allah sait comment aurait été la vie avec toi. Dis-je en baissant la tête. J'aurais traversé les pires tempêtes les yeux fermés mais que tu sois là... que tu sois avec moi.
Je me lève en soupirant.
- Je ne t'oublierai jamais ma petite Syhem. Même après quarante ans, je ne t'oublierai jamais. J'ai tellement hâte qu'on se retrouve. J'espère qu'Allah nous accordera le paradis à tous les deux pour qu'on puisse revivre notre vie à deux et cette fois, éternellement... Dis-je la voix brisée.
J'efface les larmes qui ont coulés puis je m'en vais. Encore un triste jour. Et ce qui me déprime encore plus est que j'ai l'impression que je suis en train d'oublier Syhem. Qu'on me fasse subir une mort lente et douloureuse plutôt que son souvenir s'efface de ma mémoire.
J'arrive devant chez moi. J'ouvre avec les clés et vois Ahlam devant la porte.
- Enfin tu es rentré, Emin ! Je commençais à être inquiète... Dit-elle doucement, tu vas bien ?
J'ai envie de lui crier dessus, de la virer de chez moi et lui dire qu'elle n'a plus intérêt de s'approcher de moi et mes enfants mais je n'en ai pas la force. Je suis fatigué de tout le temps devoir me battre... et puis, je pourrais perdre la seule chance pour retrouver Hind vivante.
- J'ai une surprise pour toi. Je sais que tu es triste alors je veux te voir sourire. Dit-elle en souriant.
Quelqu'un sonne à la porte et Ahlam s'approche d'elle. Elle ouvre lentement la porte puis je vois une femme venir. Derrière elle, une petite fille.
- Je te rends ta fille. Me dit-elle.
Hind... je m'approche d'elle et la prend dans mes bras.
- Baba ! Crie Hind en pleurant. Ne me laisse plus jamais !
- Jamais mon cœur, jamais. Dis-je, les larmes aux yeux.
Je me lève alors et regarde Ahlam dans les yeux. L'heure est venue pour les adieux.
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La Belle et le Djîhādîste
Teen FictionAlors que la guerre éclate en mars 2011, des milliers de civils se font tuer. En 2014, le groupe terroriste, Daesh, prennent Raqqa. Ils étaient vus dans la ville comme «héros» à leur entrée. Ils étaient doux avec les enfants, ils leur offraient des...