Chapitre 67 : Mensonge

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Décembre 1933

Adossé au mur du salon du troisième étage, Luca observa sa nièce.

Elle portait comme à son habitude sa barrette à cheveux incrustée de deux tourmalines roses. Sa tante lui avait dit que ça avait été le cadeau de son père avant de rejoindre le ciel et depuis, elle avait développé un attachement profond pour cet objet.

Planquée derrière Ophelia, Lucetta était en train de faire connaissance de la nouvelle recrue qui allait prendre la place de Vania dans son escouade.

Clemente était sorti de l'infirmerie, le corps rafistolé, avec des bandages visibles sous ses manches et sur ses mains, mais le Dr. Diop et l'infirmière Liz l'avaient assuré qu'il était capable de reprendre du service.

Il l'avait alors intégré provisoirement à l'équipe d'Ottavia pour le tester, malgré son scepticisme sur les capacités du jeune garçon.

Toutefois, la trahison de Vania et les suspicions d'Andrea sur Nera l'avaient finalement fait réaliser qu'avoir un garçon naïf, prêt à suivre les ordres aveuglément, était peut-être ce dont il avait besoin pour protéger la fillette.

Et il en était sincèrement désolé.

Mais après avoir perdu Lucio, il ne ferait plus aucun compromis pour protéger ceux qu'il aimait.

Aucun.

Lucetta était en train d'observer timidement Clemente, cachée derrière Ophelia et son cœur se serra pour cette enfant qui dès la naissance, n'avait pas été bénie par Dieu.

Sa mère avait été une prostituée de la Maison Rouge.

Lucio, qui fréquentait souvent les bordels, avait eu une favorite. Une femme qu'il avait jusqu'à laisser venir au manoir pour ses besoins, la mettant ainsi sur un piédestal.

Jusqu'au jour où elle était tombée enceinte.

Elle avait utilisé le futur petit-enfant du Parrain qu'elle portait dans son ventre, comme un moyen de pression pour avoir de l'argent et satisfaire tous ses besoins.

Luca ne l'avait rencontrée qu'une fois. Toujours à Boston, il était rentré en Italie quand sa sœur lui avait écrit que Lucio allait devenir père. Et qu'il n'arrivait pas à se débarrasser d'une femme qui l'avait eu par son bijou de famille.

À sa rencontre, en toute honnêteté, Luca n'avait éprouvé aucune véritable malice de la part de la prostituée. De l'avidité ? De la cupidité ? De la vanité ? Oui. Mais pas d'un danger imminent, si ce n'était d'ordonner aux employés de la maison d'assouvir ses caprices.

Puis quelques mois plus tard, Lucetta était née d'une union hors mariage.

Et le lendemain de sa naissance, l'organisation tua sa mère.

Ça avait été son châtiment pour une femme de bas étage, avide, qui avait cru pouvoir un jour être l'égal d'un Verratti.

Les Capos fidèles au Parrain avaient puni son arrogance.

Si quelque chose était considérée comme de la faiblesse pour son Parrain ou ses héritiers, on s'en débarrassait. C'était comme ça que l'organisation fonctionnait pour se protéger et protéger les personnes au pouvoir. Autrefois, on aurait pu apparenter cela à de la loyauté. L'organisation était composée d'hommes que son père avait sauvés et accueillis qui souhaitaient simplement retourner la faveur en se débarrassant d'une épine dans le pied de leur bienfaiteur.

Mais à présent, Luca ne pouvait s'empêcher de penser que cette loyauté s'était transformée en quelque chose de difforme et malsaine, poussée à l'extrême.

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant